« Population & Avenir, revue indépendante alliant rigueur et pédagogie, vous présente une analyse originale des enjeux actuels. Vous y trouverez une source d’informations, de réflexions et d’argumentaires amplement illustrés par des cartes, des graphiques, des tableaux, des schémas… »
ÉDITORIAL par Gérard-François DUMONT
POPULATION MONDIALE : « BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN » ?
La prestigieuse revue The Lancet a reçu un écho médiatique considérable en annonçant une convergence à la baisse de la fécondité dans le monde. Pourtant cela n’a rien d’original.
Selon les données de la Division de la population de l’ONU, cette fécondité était de 4,9 enfants par femme en 1950. En 1980, la fécondité moyenne dans le monde n’était plus que de 3,75 enfants par femme. 20 ans après, en 2000, elle a encore perdu 1 point et n’est plus que de 2,7 enfants par femme. Au début des années 2020, elle passe en dessous de 2,3 enfants par femme.
Ce déclin considérable de la fécondité additionne principalement 3 éléments : assimilation par les populations que les taux de survie des nouveau-nés et des enfants s’améliorent ; augmentation du taux d’urbanisation et réduction des ménages vivant d’une économie agricole largement familiale gourmande en main d’œuvre ; la « révolution de la fécondité », c’est-à-dire la passage d’une fécondité en partie aléatoire à un très majoritaire état de contraception qui suppose d’arrêter cette contraception pour concevoir.
Surtout, dans ses projections, The Lancet fait comme si les évolutions futures de la fécondité à l’horizon 2100 allaient être linéaires dans tous les pays. Au contraire, elle paraissent variées et irrégulières parce qu’elle s’inscrivent à la fois dans des processus globaux, mais aussi dans des réalités locales dépendantes du contexte géopolitique, politique, économique, social ou culturel. C’est donc bien plutôt une fragmentation démographique du monde qu’il faut projeter.
DOSSIER par Laurent RIEUTORT
Sobriété foncière et territoires – D’autres approches du ZAN justifiées par la géographie
La France s’est fixé un objectif d’arrêt de toute utilisation de foncier supplémentaire appelé « Zéro Artificialisation Nette » (ZAN). Prôné comme un nouveau paradigme d’aménagement, il suscite pourtant de vifs débats et soulève plusieurs questions fondamentales.
A compter de 2032, toute nouvelle surface artificialisée devra être compensée par la « renaturation » d’une parcelle équivalente. Certes, le constat sur les conséquences de l’artificialisation est largement partagé : érosion de la biodiversité, appauvrissement des sols, augmentation du risque d’inondation, menaces sur les terres agricoles ou forestières… Pour autant, la notion même d’artificialisation et ses méthodes de calcul continuent à poser problème. En effet, la méthode retenue par la loi est très descendante : à partir des objectifs nationaux, on propose « en cascade » une déclinaison de la cible dans les outils de planification régionaux puis infrarégionaux. Dans ces conditions, le ZAN a généré beaucoup d’inquiétudes parmi les élus, notamment ruraux ou périurbains. Il risque de bloquer toute initiative de développement local en matière d’accueil de nouvelles populations ou d’entreprises.
En moyenne, plus de 20 000 hectares sont artificialisés chaque année, soit 0.04% de la superficie de la France métropolitaine. Mais elle s’est réduite d’environ 30% depuis le début des années 2010 pour plusieurs raisons : la baisse de la construction au niveau national et une amélioration de la densité des opérations et du recyclage foncier. Environ les 2/3 de l’artificialisation relèvent aujourd’hui de la construction de logements contre 23% pour la création de zones d’activité et 7% pour les aménagements d’infrastructures. Mais pour une lecture géographique des artificialisations foncières, nous pouvons nous baser sur une typologie en 7 catégories de territoires : les grands centres urbains, les centres urbains intermédiaires (et petites villes), les ceintures périurbaines, les bourgs ruraux, le rural à habitat dispersé et le rural à habitat très dispersé.
Les catégories ceintures périurbaines, les bourgs et le rural peu dense (à habitat dispersé) présentent des corrélations apparentes entre artificialisation foncière et croissance de la population, solde migratoire positif et gains d’actifs. Globalement, ces types d’espaces moins denses concentrent 71,6 % de l’artificialisation foncière. Au contraire, la catégorie du rural très peu dense (à habitat très dispersé), qui artificialise peu, affiche des accroissements négatifs en termes démographiques et d’emplois. L’artificialisation d’espaces est très polarisée, notamment autour des métropoles ou des villes moyennes. Mais les dynamiques régionales, voire départementales, jouent au moins autant que la taille des agglomérations ou que la densité des territoires.
La perspective du ZAN devrait conduire à revoir la façon d’aménager et de prendre en compte la diversité des situations et la subsidiarité des acteurs selon 5 modèles : compensation, adaptation, reconnexion, relocalisation et redimensionnement. Les enjeux de sobriété foncière nécessitent alors de prendre en compte l’hétérogénéité des dynamiques sociodémographiques des territoires et de travailler à une échelle locale, selon le principe de subsidiarité. Ce besoin d’une spatialisation des objectifs de sobriété foncière conduit à réinterroger les stratégies de développement à toutes les échelles ainsi que les enjeux globaux.
Document pédagogique (libre de droits)
L’artificialisation des territoires des intercommunalités en fonction de leur attractivité migratoire
Exercice pédagogique par Eric GACHET
L’émergence en question : le cas de l’Amérique Latine
L’Amérique latine désigne à la fois une entité géographique culturelle et un ensemble géopolitique singulier aux contrastes nationaux très marqués. Elle peut être l’objet d’études de cas dans toutes les classes du collèges. Ici, il s’agit de questionner l’idée d’émergence dans le cadre de la mondialisation étudiée spécifiquement en 4e.
Dans la 1ère étape, les élèves définissent l’ « émergence ». Puis, dans une 2ème étape, ils analysent des documents sur des sujets variés et à différentes échelles. Enfin, en synthèse, ils rédigent un développement construit en 2 parties : les signes de l’émergence en Amérique du Sud et les éléments qui viennent la nuancer.
Analyse par Gwénaël DORÉ
Environnement : les territoires français face aux risques naturels et technologiques
Les territoires français sont confrontés à des aléas, donc à la possibilité de déclenchement de phénomènes pouvant avoir des conséquences graves. Ces dernières dépendent toutefois du degré de vulnérabilité de la société et donc de la capacité d’adaptation en lien avec des stratégies de résilience.
Pour parer aux risques et donc diminuer la vulnérabilité des sociétés, l’outil principal consiste à rédiger des plans de prévention des risques naturels (PPRN). Il peut porter sur un type de risque naturel mais aussi sur plusieurs risques naturels concernant un territoire. En France, le principal risque concerne les inondations, mentionnée dans près de 70% des PPRN et, en deuxième lieu, les mouvements de terrain dans près de 25% des PPRN. La règlementation peut aller de l’interdiction de construction sur certains territoires soumis à un fort aléa à la possibilité de constructions sous certaines conditions. Le champ d’application du règlement du PPRN couvre à la fois les biens existants et les projets en cours et est composé de 3 documents : un rapport de présentation, un plan de zonage, un règlement décrivant les contraintes de construction et/ou d’urbanisme à respecter dans chaque zone.
Les maires des communes dotées d’un PPRN doivent mettre en place un plan communal de sauvegarde (PCS). Ce dernier a pour objet de planifier les actions de la gestion du risque en cas d’évènements majeurs naturels, technologiques ou sanitaires. Il doit prévoir l’organisation nécessaire pour assurer l’alerte des populations, l’information, la protection et le soutien de la population face aux aléas.
Outre la règlementation française déjà existante, une série de directives européennes ont été adoptées, puis transposées en droit français, pour inventorier les sites industriels présentant des risques en raison des substances qu’ils utilisent ou produisent et pour assurer une meilleure prévention. Concernant les installations Seveso haut, un de ces textes prévoit des plans de prévention des risques technologiques (PPRT). Ils demandent aux entreprises utilisatrices de substances et aux entreprises proches de procéder ensemble à une analyse des risques pouvant résulter de l’interférence entre les activités, les installations et les matériels.
Le point sur… par Gérard-François DUMONT
UNION EUROPÉENNE : les trois tenailles des dynamiques de population
L’UE se situe au 3ème rang démographique dans le monde. 3 « tenailles démographiques » structurent de façon originale la dynamique de sa population.
1ère tenaille : l’accroissement migratoire prend le pas sur l’accroissement naturel. Comme l’UE27 est attractive et que son accroissement naturel devient négatif à compter de 2012, l’accroissement migratoire devient le seul moteur de la croissance démographique.
2ème tenaille : les décès deviennent plus nombreux que les naissances. A compter des années 1970, le nombre des naissances diminue sous l’effet de la baisse de la fécondité qui s’étend dans le contexte d’une « révolution de la fécondité ». Au XXIème siècle, dans l’UE27, la poursuite d’une fécondité à 1,4 à 1,5 enfant par femme selon les années, engendre une diminution des naissances. En 2008, pour la 1ère fois depuis la Seconde Guerre Mondiale, le nombre de décès devient supérieur à celui des naissances.
3ème tenaille : les vieux deviennent plus nombreux que les jeunes. Toutes les évolutions précédentes exercent des effets sur la composition par âge. Au XXIème siècle, le vieillissement « par le bas » de la pyramide des âges s’accentue, ce qui contribue à la baisse de la proportion de jeunes. A l’opposé, la part des 65 ans s’élève continûment depuis les années 1970 grâce à la hausse de l’espérance de vie. La combinaison du vieillissement « par le bas » et du vieillissement « par le haut » finit par engendrer une nouvelle tenaille : depuis 2020, la part des personnes âgées de 65 ans ou plus devient plus importante que celle des moins de 20 ans, ce qui est un changement historique et inédit dans toute l’histoire démographique des populations de l’UE27.
Est-ce que ces tenailles aboutiront à un dépeuplement après la dépopulation ?