Cette BD est issue de l’imaginaire de Stéphen Desberg, marqué par un voyage dans les vestiges du système concentrationnaire nazi en Europe : ghetto de Lodz et de Cracovie, camps d’Auschwitz et de Birkenau. De ces visites, Stéphen Denberg en retire un réel traumatisme personnel, mais surtout une précision dans les images et les situations évoquées.

il existe de nombreuses œuvres artistiques, romans ou BD, peintures ou sculptures, traitant du sujet des centres de mise à mort nazis. Dans cet amoncellement d’ouvrages, rien ne peut cependant être considéré comme futile, dans le sens où chacun de ces auteurs essaie de retranscrire sa vision, ses émotions, dans un but qui semble commun, celui de ne jamais banaliser ces lieux et événements, témoins de la barbarie humaine qui a explosé pendant le 2e conflit mondial.

Pour Stéphen Desberg, cette transmission personnelle passe par le destin d’une famille juive et particulièrement d’un personnage, David, capturé et envoyé à Auschwitz. Un homme juif parmi tant d’autres mais dont la particularité est de prier sans relâche les anges, gardant cette  foi et cette confiance en la religion que beaucoup d’autres ont perdu dans les camps. Ce rapport à la religion est un sujet sensible chez les anciens prisonniers, beaucoup s’étant sentis abonnés ou ne comprenant les souffrances imposées par Dieu à son peuple élu.

Cet aspect religieux est aussi présent chez le commandant du camp, Karsten, officier ambitieux classique dans le monde nazi, zélé et autoritaire. En effet, son fils, Hansel, lui aussi prie les anges pour voir son père revenir au plus vite, et vivant, de la guerre.

Hansel est au cœur de la dernière partie de l’œuvre, lorsqu’il découvre le passé de son père, ce qu’il a fait à Auschwitz, et ce alors qu’il vient de rencontrer une jeune femme juive et qu’il se décide à la présenter à ses parents.

A travers ces destins, c’est la réalité des camps qui d’abord retranscrite, parfaitement. Les violences morales et physiques, les coups et exécutions arbitraires, les tests sur les cobayes humains… Mais sont aussi abordées les relations humaines, entre prisonniers, hommes et femmes, entre prisonniers et gardes. Dans un univers hors du temps et inconcevable jusqu’à alors, qui peut semble parfois au-delà même de la compréhension humaine, David représente aussi la lumière et l’espoir, et même si lui se cache de la réalité et de son destin tragique derrière ses anges, il est porteur de cette flamme pour ceux l’entourent au quotidien, au point d’être connu même en dehors de son bloc.

Les deux auteurs nous offrent donc une plongée magistrale dans cet univers concentrationnaire nazi. La BD est accessible à tous, utile à la fois pour les érudits comme les novices. Elle peut-être un support pour collégiens de 3e et élèves de terminale qui abordent cette période dans leurs programmes. Une vraie réussite.