Les éditions du Cavalier bleu proposent une déclinaison de leur célèbre collection « Idées reçues ». En effet, la couverture est plus travaillée, l’ouvrage plus long et donc plus cher. Ce volume s’intitule « Sur la route de Colomb et Magellan » et cherche à traquer les idées reçues sur les grandes découvertes.
Il est composé de 21 entrées, structurées en 4 chapitres, d’ une introduction et d’une conclusion. Il comprend des encarts sur certains points comme la signature de Colomb, les épices… et une bibliographie. Quelques documents complémentaires se trouvent dans l’ouvrage comme des cartes, des reproductions de documents d’époque et une chronologie repères.
Du vrai, du faux et des idées reçues
Saluons d’abord la salutaire introduction qui souligne qu’en trente ans, les connaissances ont bien progressé. Précisons également le but de ce livre qui « … n’a d’autres prétentions que d’en collecter un florilège des répandues ». Il est l’œuvre de 2 spécialistes du sujet. Michel Chandeigne et Jean-Paul Duviols. Le premier thème se centre sur les navigateurs portugais pionniers des grandes découvertes, le deuxième sur Colomb, puis les conquêtes espagnoles et enfin Magellan. Notons de suite que les idées reçues examinées par les auteurs sont de nature ou de notoriété très différente : entre « Magellan est né à Sabrosa » et « il a réalisé le tour du monde », on n’est pas vraiment dans la même ampleur d’information. Chaque article dure de 8 à 12 pages selon les cas, car parfois il y a un peu de tout cela dans une idée reçue.
Les attendus
Commençons par des classiques donc comme « au Moyen Age, les gens croyaient que la terre était plate ». Les auteurs précisent tout de suite combien cette idée était fausse, et de façon plus intéressante, ils cherchent à cerner la généalogie et la diffusion de cette idée. La Bible, souvent invoquée dans cette polémique, ne se prononce pas en réalité sur la forme de la terre. Dans la même veine, on a évidemment droit à « Christophe Colomb a découvert l’Amérique ». Le problème est tout de suite posé avec le vocabulaire, car les auteurs précisent ce que « découvrir veut dire ». Pour eux, Colomb est le premier à l’attester et, dans ce sens, les auteurs lui font crédit de l’Amérique.
On peut enfin aborder le cas de Magellan et du premier tour du monde. Il semble bien connu quand même qu’il n’est pas revenu de son tour du monde, mais certains membres de son équipage oui. En revanche, on sait peut-être moins que Magellan n’a jamais eu l’intention de faire le tour du monde pour démontrer la rotondité de la Terre. Les historiens ont aussi réévalué le bilan humain de l’expédition de Magellan avec 90 survivants. Soulignons toutefois que ces informations sont un peu éparpillées entre plusieurs articles.
Des éléments plus anecdotiques
Selon l’intérêt que l’on a pour le sujet, on pourra peut-être passer plus vite sur certaines idées reçues qui semblent moins déterminantes. Ainsi en est-il de celle qui veut que « Magellan est né à Sabrosa ». Elle est d’ailleurs traitée plus rapidement. L’auteur en souligne quand même la futilité tout en pointant le paradoxe que cela n’a pas empêché une production abondante sur le sujet. Même s’il n’est pas originaire de là, la petite ville a construit une partie de sa réputation, et notamment historique, sur cette affirmation. Dans la même veine, les auteurs abordent le cas d’Henri le navigateur et de l’école de Sagres. La notion d’école a prospéré même si elle n’a jamais existé. Ici, il faut incriminer la postérité et notamment des ouvrages du XVIIIe siècle.
Des informations pour nos cours
Dans le cadre des cours et notamment de seconde, on pourra imaginer de faire préparer un article par un élève. A cet égard, on peut utiliser le passage consacré à la controverse de Valladolid popularisé par le téléfilm de Jean-Claude Carrière. Les auteurs rappellent qu’il n’y a jamais eu de dialogue, ni de débat entre les deux protagonistes ! Sepulveda parla le premier et exposa sa théorie pendant trois heures. Il n’ y eut jamais aucun communiqué et l’on ne sut pas quelle fut la position de la couronne sur ce sujet. La force de la dramaturgie a donc créé une nouvelle vérité. Il y a là matière à une intéressante mise en perspective avec les élèves. On pourra aussi utiliser l’encart intitulé « Gagarine, c’est le Christophe Colomb du XXe siècle », manière de faire comprendre ce qu’ont pu représenter les grandes découvertes à l’époque. Le texte rapproche, compare et différencie à la fois les deux moments.
Au total, cette collection désormais bien installée, permet sous forme d’articles rapides de réviser et de revisiter cette période si forte en changements. Tout n’est pas forcément intéressant au même titre, certains passages seraient peut-être plus fluides en étant regroupés, comme ceux sur Magellan. On peut en tout cas se mettre à jour de façon agréable avec ce livre.
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