ÉDITORIAL par Gérard-François DUMONT
Aménagement du territoire : l' »ardente obligation » d’une politique globale
Les pouvoirs publics, par les décisions qu’ils prennent, concourent à l’aménagement. Mais pour parler d’une véritable politique d’Aménagement du territoire, il faut qu’elles s’inscrivent dans une logique globale œuvrant pour le bien commun de tous les territoires.
L’objectif de la politique d’Aménagement du territoire entre entre les années 1950 et 1980 était de diversifier géographiquement les emplois publics et privés face à la surconcentration à Paris. L’ouverture d’un grand marché unique au sein des pays de la Communauté européenne, puis de l’Union européenne, a balayé cette politique. Ainsi, par l’entremise de la nouvelle Agence nationale de la cohésion des territoire crée en 2020, l’Etat multiplie les appels à projet, les « programmes » ne permettant plus de corriger la somme d’inégalités territoriales : inégalités dans les financements de l’Etat, inégalités d’accès aux mobilités, inégalités d’accès aux services publics, inégalités dans les capacités d’ingénierie des territoires dans un contexte d’alourdissement des normes et des procédures.
Pour l’auteur, « seule une politique globale d’aménagement du territoire serait de nature à surmonter ces inégalités territoriales ».
DOSSIER par Jean-Marc ZANINETTI
TERRITOIRES ET GÉOGRAPHIE SOCIALE : LE CAS DES POPULATIONS DU GRAND PARIS
Nombre de discours considèrent qu’une France des métropoles créatrices de richesse s’oppose aux autres territoires. On peut se poser la questions pour la Métropole du Grand Paris additionnant des territoires de richesse et rejetant les catégories socioprofessionnelles moins avantagées au-delà.
On y assiste en effet à une spécialisation socioprofessionnelles des territoires, avec telle ou telle catégorie surreprésentée ou sous-représentée. On peut parler de « ségrégation » avec l’idée que les plus aisés se regroupent en recherchant l’entre-soi, s’approprient les territoires les plus convoités, notamment les centres urbains principaux dans un processus de « gentrification » des centres. Les classes populaires sont ainsi reléguées en périphérie.
Au-delà de cette spécialisation moyenne à l’échelle de la Métropole du Grand Paris, la spécialisation résidentielle est très forte à l’échelle de ses 2844 quartiers. Plus on regarde le territoire de près, plus les disparités ressortent. Les changements d’échelle réduisent ou augmentent les disparités territoriales visibles. On peut alors distinguer 4 types de quartiers résidentiels dans le Grand Paris : le premier concentre cadres et professions intermédiaires dans Paris intra-muros et les Hauts-de-Seine ; un deuxième rassemble les cadres et professions intellectuelles supérieures dans les « beaux quartiers » centraux de Paris ; un troisième agrège les employés et ouvriers dans des quartiers populaires au-delà de la Grande Couronne ; le quatrième forme un profil social plus équilibré majoritairement dans la partie est de la Métropole.
Pour l’auteur, la mixité sociale est sans doute « une impossible équation », malgré un volontarisme politique affiché et se pose la question : « l’existence de la Métropole du Grand Paris sera-t-il à terme de nature à réintroduire de la diversité sociale dans un paysage qui tendait à s’homogénéiser aux échelons des quartiers et ressemblant en conséquence de plus en plus à un patchwork ? »
DOCUMENT PÉDAGOGIQUE (libre de droits)
LES TERRITOIRES DU GRAND PARIS : LA DIVERSITÉ DE LA GÉOGRAPHIE SOCIALE DES POPULATIONS SELON LES 2844 QUARTIERS
EXERCICE PÉDAGOGIQUE par Eric GACHET
LES ESPACES INSULAIRES BRETONS, ENTRE INTÉGRATION ET MARGINALITÉ
Cette étude de cas s’insère dans le thème 3 du programme de géographie de Sixième intitulé : « Habiter les littoraux ». La notion d’habiter y tient une place importante, comme pendant toute l’année de 6e. Elle renvoie à une pratique de l’espace du quotidien, de l’espace de vie. Cela induit une interactivité forte des acteurs avec leur espace. Cette appropriation de l’espace révèle également un jeu d’acteurs, entre coopérations et conflit d’usages.
Dans une première étape, les élèves doivent rédiger un reportage sur l’île de Groix (localisation, activités principales, aménagements). Dans une deuxième étape, la mise en perspective à partir de cartes, d’un texte sur l’île de Sein, de données statistiques et d’une affiche vise à confronter logiques économiques et préservation de l’environnement. Dans une troisième étape, un bilan est réalisé sous la forme d’une carte mentale.
ANALYSE par Raymond WOESSNER
TRANSPORT FERROVIAIRE ET TERRITOIRES EN FRANCE : VERS LA FIN DU TOUT-TGV ?
Après avoir absorbés l’essentiel des investissements ferroviaires entre les années 1980 et 2010, les lignes et trains à grande vitesse (LGV et TGV) ont été accusés de vampiriser les autres activités de la SNCF. Les lignes les plus rentables, reliant les grandes métropoles françaises puis européennes ont été privilégiées. Parallèlement, le fret ferroviaire s’est effondré et les trains de nuit ont progressivement été abandonnés. Depuis le milieu des années 2010, les annonces se sont pourtant multipliées pour le retour du rail hors TGV.
Les LGV s’inscrivent dans la géographie de l’Hexagone. La macrocéphalie parisienne fait que les lignes les plus fréquentées relient la capitale à des grandes villes plutôt situées sur les bord du pays, conformément à la géographie du peuplement de la France. L’Allemagne et l’Italie ont fait d’autres choix avec une organisation réticulaire fondée sur les correspondances entre des villes nombreuses et relativement équilibrées par leur taille dans des territoires nationaux plus petits. En 2015 et en 2018, des rapports proposent de prioriser la rénovation de lignes et de gares par tranches successives, plutôt que la construction de nouvelles LGV. Ainsi s’est produit un renversement spectaculaire dont la réalisation devrait prendre plusieurs décennies. La construction d’une LGV coutant de plus en plus cher, mieux vaut investir dans les réseaux du quotidien autour des métropoles et aussi donner une chance aux territoires décrocheurs en y modernisant les TER. En 2020, l’État a commencé à s’intéresser aux 9200 km de petites lignes ferroviaires en s’engageant à participer à leur modernisation qui peut s’articuler avec le programme des Petites Villes de Demain. La loi LOM de 2019 peut la faciliter en permettant que « les lignes d’intérêt local ou régional à faible trafic du réseau national peuvent faire l’objet d’un transfert de gestion au profit d’une autorité organisatrice de transport ferroviaire », en clair les régions. Les intentions affichées sont bien celles d’une reconquête généralisée par le rail.
LE POINT SUR… par Gérard-François DUMONT
L’UKRAINE FACE À LA GUERRE : GÉOPILITIQUE ET POPULATION
L’Ukraine est le pays le plus vaste (603 548 km²) et le plus peuplé (41 millions d’habitants) des États d’Europe riverains de la Russie. Mais c’est aussi un pays en dépopulation et en dépeuplement. La fécondité y demeure en-dessous de la moyenne européenne, entre 1,4 et 1,5 enfant par femme. Le taux de natalité est lui aussi assez faible, moins de 12 naissances pour 1000 habitants depuis les années 1990. Comme le taux de mortalité a de son côté augmente sous l’effet du vieillissement de la population, l’Ukraine est, depuis 1991, en dépeuplement. De plus, est enregistre une forte émigration depuis 1990. Russie, Kazakhstan et Biélorussie accueillent les 2/3 des migrants nés en Ukraine, les autres vivant essentiellement dans des pays occidentaux. Leur exode y a été récemment facilité avec le déclenchement de la directive « protection temporaire » offrant une voie rapide et simplifiée pour accéder à une protection dans toute l’UE. Elle prévoit également des dispositions relatives à l’hébergement ou aux moyens de subsistance, l’accès à la santé, l’accès au travail et l’accès à l’éducation. Les diasporas jouent ainsi un rôle non seulement économique avec des transferts d’argent et de biens mais aussi géopolitique.
En conséquence, l’addition d’une dépopulation et de départs migratoires a fait perdre près de 7 millions d’habitants à l’Ukraine en 30 ans, soit une baisse de 15% de la population. Elle devrait se réduire à 30,7 millions d’habitants en 2050, soit 10 millions de moins qu’aujourd’hui. L’auteur conclut en précisant que « le bilan démographique de la guerre pourrait être encore plus grave que le bilan matériel. Et, plus la guerre sera lognue, plus elle risque de s’étendre géographiquement, et plus le déficit démographique naturel et migratoire s’aloudira ».