Fondée en 1932, la revue Urbanisme a lancé au printemps 2013 une nouvelle formule. En 2022, son nouveau rédacteur en chef, Julien MEYRIGNAC, a souhaité encore modifier la maquette afin que la revue élargisse son lectorat, notamment vers les décideurs, et son audience. Toujours destinées « à ceux qui réfléchissent, conçoivent, financent et réalisent la ville », les principaux changements concernent la forme avec notamment une plus grande place donnée à la photographie et une mise en page plus aérée. L’actualité culturelle est toujours traitée conformément à la promesse originelle du journal en lien avec les territoires, les villes et les sociétés.
Le tourisme est le sujet de ce numéro de juillet-Août 2022. Dans son édito, Julien MEYRIGNAC commence par rappeler les conséquences de la pandémie de Covid-19 qui a fait « atterrir » les touristes compulsifs à la recherche de toujours plus et l’émergence d’un nouveau tourisme du « temps retrouvé et partagé », renouant avec le concept originel de vacances, c’est-à-dire le temps du repos en dehors du cadre quotidien. Le sociologue Jean-Louis VIOLEAU confirme en effet que le tourisme semble avoir atteint une forme de point de non-retour à la veille du grand confinement de 2020. De nombreux sites naturels étaient au bord de l’asphyxie pour Maider DARRICAU. A Porquerolles par exemple, on peut avoir de 2 à 4 écrans de bateaux qui masquent l’horizon, « ce qui procure un sentiment d’enfermement lorsqu’on est la plage » pour le directeur du parc national de Port-Cros. A Venise, les habitants de la ville historique se sentent abandonnés, perdant peu à peu leur « droit à la ville » et sont livrés à la muséification (Ismaël BOUTTIER et Nicolas TRICAUX). Les stations de ski abandonnées (« les fantômes de l’or blanc ») dans les Alpes (comme La Chaud-Saint-Honoré) ou les Vosges sont des symboles de ce tourisme irraisonné. Les photos sont saisissantes.
Un autre sociologue, Rémy OUDGHIRI, se demande si la France, première destination mondiale en 2019, est entrée dans un nouveau cycle touristique et esquisse 4 France du tourisme (ou plutôt 4 comportements du touriste) : les impatients (ou le temps du rattrapage), les classes moyennes (le temps du local), le voyage déclassé et l’émergence d’un courant écoresponsable et le tourisme durable. Plusieurs profils émergent alors : le nomade numérique, l’explorateur urbain, le voyageur virtuel, le tourisme immersif ou le voyageur lent.
Axé sur le sport, la nature, la culture et le patrimoine, le tourisme peut aussi être source de redynamisation comme à Vichy (Tonino SERAFINI). L’immobilier y a pris 25% en un an avec une dynamique en partie enclenchée par les logements Airbnb qui ont contribué à la rénovation des logements, puis le marché résidentiel a suivi. Cette dynamique peut s’enclencher autour d’un musée (Hervé BARBARET) comme à Lens ou de festivals musicaux (Julien MEYRIGNAC).
De nouvelles questions se posent également comme la décarbonisation du tourisme (Thomas LAMAND), cette activité étant à l’origine de 11% des émissions de gaz à effet de serre en France. Il s’agit d’abord de mieux répartir les flux dans l’espace et de travailler sur les ailes de saison pour mieux lisser dans le temps la (sur)fréquentation touristique. Des destinations « durables » se développent également en même temps que le « smart tourisme » (Damien AUGIAS). Allons-nous vers un tourisme plus responsable et plus digital ?