Cet ouvrage est le catalogue d’une exposition qui se déroule à Lyon jusqu’au 1er juin 2025. Il s’agit, à travers l’itinéraire de six personnages, de mieux comprendre l’Empire romain à la fois dans sa diversité et dans son unité. C’est une façon incarnée d’aborder l’histoire. Le catalogue est conçu pour prolonger et approfondir la visite.
L’ouvrage
On commence par le portrait de chaque personnage au travers d’une stèle retrouvée puis il y a des précisions sur lui et ce qu’il représente, soit sous forme d’article soit sous forme d’entretien avec un spécialiste. Des focus sur des objets sont aussi proposés. Il y a six courtes nouvelles, chacune centrée sur un personnage, afin de favoriser une immersion qui se veut à la fois historique et poétique.
Un empire, des peuples
Un Empire ne se conserve pas uniquement par les armes. Les six profils proposés sont : un notable, une fille d’affranchi, l’épouse d’un soldat thrace, un verrier, une ancienne esclave grecque mariée à un soldat, un négociant arrivé de Syrie. Une carte permet de les localiser dans la ville de Lyon. Le maintien des anciennes traditions chez les nouveaux citoyens témoigne du caractère juridique de la romanité. Il existait différentes façons d’être Romain. L’Empire c’est un mode pluriel, des diasporas de toutes sortes. L’empereur se révèle à la fois un facteur d’unité et de stabilité.
Caius Julius Rufus, un notable qui fit preuve d’évergétisme
A travers lui on aborde la place des élites gauloises dans l’Empire romain. Il est le mieux connu des notables gaulois au début de l’Empire. Il incarne le parcours exemplaire d’une grande famille gauloise. Même s’il y eu des révoltes, la majorité des cités gauloises semble s’être ralliée d’assez bon gré à l’autorité romaine. La prêtrise lyonnaise est un moyen de se faire connaître des gouverneurs et des autorités romaines et de trouver les appuis nécessaires pour accéder à l’ordre équestre.
Julia Hélias, une prêtresse
Les femmes avaient moins de droits que les hommes mais n’en étaient pas dénuées. Les recherches historiques de ces dernières années insistent bien sur ce point. Julia Hélias était une fille d’affranchi. Le portrait robot de la prêtresse, c’était une femme libre, âgée de 12 à 25 ans souvent, et pas obligatoirement citoyenne de la cité au sein de laquelle elle exerce. Un bon niveau de fortune est nécessaire. Lorsque la religion chrétienne devient la religion de l’Empire, les autorités religieuses excluent alors les femmes de la prêtrise. On peut mentionner aussi le fait que chaque divinité se déclinait en une multitude de manifestations.
Secunidinia Justa, l’épouse d’un soldat thrace
Le soldat a été muté à Lyon après son service. L’armée romaine est un espace d’intégration. Pour les auxiliaires comme pour d’autres provinciaux déjà citoyens romains, le service militaire était un moyen d’ascension sociale assurant un salaire régulier et un statut enviable pendant et après le service, pour eux et pour leur famille. Au cours du temps, le nombre de provinciaux dans les légions augmenta fortement. Des femmes et des civils habitaient à proximité des camps militaires. Un focus est proposé sur un trulla de légionnaire. Il s’agit d’un récipient en bronze, une sorte d’appareil multifonctionnel et relativement résistant.
Julius Alexander, artisan verrier
Un article est intitulé « artisanat et mobilité des savoir faire dans le monde romain à travers les cas de l’Afrique du Nord et du Proche Orient ». Si les céramiques, dont les amphores, nous apparaissent comme les exportations les plus nombreuses, c’est parce qu’elles étaient remplies de denrées qui circulaient beaucoup. C’est plutôt la transmission des techniques et savoir-faire qui permet de suivre la mobilité des artisans.
Cyrilla, une ancienne esclave grecque mariée à un soldat
Sur la stèle retrouvée qui la concerne, on lit « Avé ». C’est une salutation que le passant adresse à la défunte quand il passe devant la tombe. Un article détaille ce que l’on sait des relations entre maîtres et affranchies. Bien que ces unions semblent avoir été nombreuses, la plupart des sources juridiques ne présentent pas le mariage entre patron et affranchie de manière positive. Au total, l’affranchie n’était jamais totalement libre. Un focus est fait sur un collier d’esclave qui est un instrument coercitif. L’inscription qu’il porte répond à un formulaire standardisé qui décline, avec clarté, l’identité du propriétaire de l’esclave ainsi que sa profession.
Thaïm, un négociant arrivé de Syrie à Lyon
La stèle était rédigée en grec et en latin. Thaïm a voyagé loin de sa patrie mais ne l’a pas conçu comme un exil définitif. Le « zoom objet » est consacré au relief du prêtre Maliku et de son épouse Hadira. La pratique du banquet couché est empruntée au monde gréco-romain, mais l’image du défunt à moitié allongé renvoie également à l’iconographie parthe du souverain en majesté.
Les mobilités dans l’Empire romain
Un dernier article insiste sur l’importance et le développement des mobilités diverses. Travail, voyages, migrations volontaires ou forcées étaient autant de catégories qui existaient déjà à l’époque romaine. Côté infrastructure, on comptait 100 000 km de routes publiques à la fin du IIIe siècle et 200 000 km de voies locales et régionales. Les empereurs ont exalté leur domination sur le monde habité mais l’empire romain ne fut pas mondialisé. Retenons aussi que les Anciens n’avaient pas de notions générales pour nommer la mobilité ou la migration. Cela ne veut pas dire qu’il n’existait pas de régulations.
Ce catalogue d’exposition offre donc des exemples concrets de la diversité de l’Empire romain et cela de façon incarnée.