La biographie de Maurice Assier de Pompignan plonge le lecteur dans la colonisation et la France libre, à travers des sources administratives, mais aussi des sources privées. Emmanuel Rougier retrace la carrière et les engagements d’un administrateur colonial. Un ouvrage à contre-courant de l’histoire « décoloniale » en forme de dette familiale, le père de l’auteur était le gendre de Maurice Assier de Pompignan.
Enfance et jeunesse
L’auteur rappelle une enfance marquée par l’éruption de la Montagne Pelée qui ruina sa famille, autrefois anoblie par Louis XV pour sa contribution à la défense de la Martinique face aux Anglais. Le récit de cet événement, qui marqua l’île en 1902, ne nous apprend rien de nouveau.
Orphelin, arrivé en France métropolitaine dès 1903, il intègre, après le lycée, l’École coloniale. Maurice de Pompignan rejoint, en 1922, son premier poste auprès du gouverneur de l’AEF. On le suit dans ses différentes affectations : au Gabon, au Moyen-Congo où il est confronté à la grave surmortalité des ouvriers du chantier du chemin de fer Pointe Noire-Brazzaville, puis au Tchad.
D’une guerre mondiale à l’autre en AEF
L’auteur décrit la carrière d’un administrateur colonial plutôt bien noté. C’est l’occasion d’évoquer la personnalité de Marcel de Coppet et ses relations avec André Gide qui dénonça les abus de la puissance coloniale dans Voyage au Congo. Après un bref séjour en Martinique en 1932, il est de retour au Gabon où il poursuit sa carrière comme administrateur-Maire de Libreville.
La France libre africaine
Convoqué à Paris en avril 1940 par Georges Mandel alors ministre des colonies, il est renvoyé en poste en AEF en juin. On connaît cette incertaine année 1940 grâce à la correspondance avec son épouse toujours à Libreville.
L’auteur rappelle le ralliement de Brazzaville à De Gaulle alors que le Gabon demeure fidèle à Pétain. Quand Maurice de Pompignan rejoint son poste, après maintes péripéties, Libreville est en état de siège. L’auteur rapporte ce qu’il est convenu d’appeler la « guerre du Gabon ».
On suit Maurice de Pompignan dans son ralliement de la France libre, notamment sous les ordres du gouverneur de l’AEF Félix ÉbouéFélix Éboué – De Cayenne au Panthéon (1884-1944 par Arlette Capdepuy, Karthala, 2015 – Félix Éboué, Le lion qui a dit non par Denis Lefebvre, Le Passeur Éditeur, collection « Hors collection », 2022.
Après un séjour de repos en Afrique du Sud, on retrouve l’administrateur promu inspecteur général de l’AEF. Destitué par Vichy et déchu avec sa famille de la nationalité françaiseIl est durant quelques mois anglais, grâce à une négociation De Gaulle/Churchill pour accorder la nationalité anglaise aux personnes rendues apatrides par le gouvernement de Vichy. Il est gouverneur du Gabon de mai 1942 à août 1943 où il contribue à l’effort de guerre et à l’appui aux troupes du Général Leclerc. Il est ensuite nommé, par De Gaulle gouverneur du Dahomey, en AOF jusqu’en septembre 1945. Il y organise l’effort de guerre de la France libre et reçoit, à Cotonou, le général de Gaulle en route pour Brazzaville.
L’auteur consacre quelques pages à la Conférence de Brazzaville.
La famille rentre à Paris en octobre 1945, un retour difficile dans le contexte du moment. Maurice de Pompignan est mis en retraite en janvier 1948 avant de mourir brutalement en août 1952.
Une biographie très classique d’un serviteur de l’administration coloniale au XXe siècle.
Une longue présentation : https://www.dailymotion.com/video/x9fyw3w