L’histoire de la célèbre chocolaterie suisse

Alors que le pays ne dispose ni de colonies ni d’accès privilégié aux matières premières qui constituent le chocolat, la fabrique Suchard – de concert avec ses homologues helvétiques – parvient à exploiter la valeur nutritionnelle et l’ancrage alpin du lait pu faire du chocolat un référent symbolique de la Suisse.

De la petite entreprise familiale à la multinationale, l’existence de la chocolaterie est ponctuée de hauts et de bas, de stratégies visionnaires et d’occasions manquées, mais elle constitut un pan d’histoire industrielle de première importance qui a fait la renommée de Neuchâtel à l’échelle planétaire, au même titre que l’horlogerie.

Alors que la conclusion de cette saga industrielle davantage des passes d’armes d’un film d’action que du roman à l’eau de rose, il reste aujourd’hui de Suchard un nom, une marque, des produits sans liens avec Neuchâtel, de riches archives, une friche industrielle en voie de reconversion, ainsi qu’un célèbre ruminant à la couleur lilas… de quoi écrire un bel épilogue.

Un parfum de chocolat – Sur les traces de Suchard à Neuchâtel, 2022, page 152

Lancée en 1896, la tablette Milka est une création de l’entreprise suisse Suchard. Que ce soit sous forme de poudre cacaotée ou de tablette de chocolat au lait, de pastilles ou de diablotins, les produits de la firme sont fabriqués dans le vallon de Serrières à Neuchâtel et témoignent de l’essor industriel du canton au XIXe siècle. La mécanisation et la motorisation sont au cœur du développement de l’usine afin de répondre à la demande des consommateurs pour ce produit exotique.

A l’origine considéré comme un produit de confiserie et de pharmacie, le chocolat devient plus accessible à partir de 1830 sous l’impulsion de Philippe Suchard. Né en 1797, Philippe Suchard ouvre une confiserie à Neuchâtel en 1825. Dans l’ouest de la commune, le vallon de Serrières abrite plusieurs usines, dont les bâtiments permettant la fabrication du chocolat Suchard. Bien relié par le chemin de fer et la route, l’usine s’agrandit en rachetant les bâtiments les plus proches.

A partir du matériel racheté à un confiseur local, Philippe Suchard massifie la production de chocolat. Le concassage, le raffinage, le conchage, le moulage et le conditionnement sont peu à peu mécanisés. L’une des caractéristiques mise en avant par la marque est l’authenticité des matières premières, c’est-à-dire sans ajout de matière complémentaire dans la recette pour réduire l’amertume originale du produit. Son fils François-Louis-Philippe prendra sa suite et sera à l’origine du « décollage industriel de la chocolaterie durant les années 1860-1880 » (page 45). L’entreprise est d’abord une histoire de famille.

Passant d’une production de 50 kilogrammes par jour en 1841 à 60 000 kilogrammes en 1924, Suchard entre dans un âge d’or entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle. Des logements adjacents accueillent les ouvriers, notamment des femmes et des immigrés. Des commerciaux sillonnent l’Europe à la recherche de nouveaux partenaires. Avant de faire face à une crise majeure dans les années 1920 et de perdre sa place de numéro 1 au sein de l’industrie chocolatière suisse. L’usine de Serrières s’arrêtent en 1989.

Désormais, l’usine de fabrication est désormais en Allemagne. Des projets de reconversion sont à l’étude dans le vallon neuchâtelois de Serrières. La dernière partie de l’ouvrage invite habilement le lecteur à visiter ce patrimoine industriel grâce à trois itinéraires touristiques.

Largement illustré par de nombreuses affiches en couleur et des photographies d’époque en noir et blanc, ce petit guide très réussi  plaira à la fois aux férus d’histoire locale, aux passionnés d’histoire industrielle mais aussi aux touristes de passage dans le canton de Neuchâtel.

Pour aller plus loin :

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Antoine BARONNET @ Clionautes