A travers la figure historique Pasquale Paoli, cette œuvre nous propose de plonger dans une synthèse extrêmement compliquée et sensible, celle du nationalisme corse.

Cette BD est le résultat d’un travail formidable de recherches entrepris par Hélène Constanty. Pour illustrer ce propos d’introduction, il faut prendre son avant-propos où elle énumère ses sources, explique ce projet et précise l’angle d’attaque du scénario. Car cette BD est à la fois une fiction et une véritable histoire, au sens historiographique du terme. Et là est le point fort de cette somme incroyable. Sur plus de 200 pages, il nous est livré un travail d’une précision exemplaire qui relate 40 ans de combats, à la fois culturels, armés, politiques, entre une partie du peuple corse et la France.

Ces 40 années sont divisées en 6 chapitres de taille inégale, classés chronologiquement par grandes période du mouvement nationaliste. Le travail méticuleux d’Hélène Constanty, accompagnée par le dessin de Benjamin Adès, nous permet une immersion totale dans la lutte. Il ne faut pas s’arrêter sur la couverture qui lie peut-être de trop nationalisme et action clandestine, voire terrorisme. Le nationalisme corse a une portée bien plus large que cela et cette BD le relate parfaitement.

Bien évidemment, cette BD n’est en rien un justification des actions criminelles du nationalisme corse. Ni une prise de position idéologique sur ce que devrait être la Corse, sur les pensées de chacun des nationalistes évoqués. C’est une véritable introspection à laquelle se libre Hélène Constanty. L’un des points forts de cette BD est de s’intéresser à la fois aux grands leaders de ce mouvement multiforme et aux membres de base, comprendre leurs pensées, leurs justifications, leurs rivalités.

 

Cette histoire du nationalisme pourrait être aussi appelée histoire des nationalistes. Chacun a ses positions, ses désirs personnels, ses ambitions. Car le nationalisme corse est loin d’être uni, tant dans ses moyens d’action que dans ce que nationalisme veut dire. Un autre point fort de cette BD est la présentation de cette diversité.

Dernier point fort, mais cette liste est non exhaustive en réalité tant la BD a de qualités, l’analyse de la position de l’Etat français. Nous démarrons avec VGE qui doit faire face aux premières vagues d’attentats. Nous finissons sous François Hollande. 40 ans et 5 présidents, de multiples gouvernements, de multiples chefs de la police, de multiples préfets. Beaucoup sont présents dans cette somme. Et ils représentent tous la difficulté de comprendre ce mouvement, de comprendre la Corse de manière générale et la grande complexité, au final, de réaction face à ce mouvement dont les auteurs nous montrent aussi la portée et le soutien populaires.