Vanina Brière est une historienne qui a fait sa thèse sur les Français déportés au camp de concentration de Buchenwald. Elle est chargée de recherche à la Fondation pour la Mémoire de la Déportation. A partir de ses recherches, elle écrit des romans pour la jeunesse sur l’histoire de la Seconde Guerre mondiale. Oradour-sur-Glane, Un village si tranquille est le quatrième, tous publiés chez le même éditeur, dans la même collection.

Il s’agit d’un petit livre divisé en quinze courts chapitres et complété par un dossier documentaire d’une quinzaine de pages, « dossier ouvert sur le monde à cette époque là », qui élargit l’horizon des jeunes lecteurs à différents aspects de l’histoire et de la civilisation à l’époque de la Seconde Guerre mondiale : sciences et techniques, personnalités, événements de la guerre, arts et idées.

Historienne, Vanina Brière connaît parfaitement les faits. Ici, ses sources majeures sont deux témoignages, celui de Robert Hébras, l’un des six survivants du massacre, qui a réussi à s’échapper de la grange, après être resté immobile sous un tas de cadavres et laissé pour mort, et celui d’Albert Valade qui a passé la journée du 10 juin 1944 dans le village voisin où il habitait, et qui a préfacé le livre. Tout ce qui est relaté est parfaitement exact, et il s’agit d’une horreur absolue. Néanmoins l’auteur parvient, par une expression claire et vraie, recourant à la suggestion quand la décence impose le respect et presque le silence, à écrire un ouvrage sensible et précis, à tracer des portraits, à décrire la vie quotidienne de ce gros bourg tranquille (on n’y a pas vu d’Allemands depuis un an et demi) relié à Limoges par le tramway.

Le récit se déroule au fil de la journée et change de perspective au rythme d’un reportage. Les informations sont complètes mais rien n’est trop didactique, quelques courtes notes apparaissent quand il le faut (les SS, le STO). Les atrocités ne sont pas adoucies, le lecteur sent monter la tension, et l’émotion est vive au récit du massacre des 642 villageois dont 96 enfants. Il n’était pas facile de parvenir à le raconter, et à le raconter à des enfants. Vanina Brière y a parfaitement réussi, et rien n’empêche les adultes de lire ce livre pour s’en rendre compte.

Les trois derniers chapitres concernent l’histoire et la mémoire. Là aussi, beaucoup est dit, en peu de mots, et des mots simples. Les causes de cet horrible massacre de civils dans le contexte de juin 1944 dans le Sud-Ouest de la France (stratégie de la terreur et circonstances locales) sont présentées en quelques pages. Puis deux chapitres évoquent la reconstruction du village moderne près du village en ruines, le procès de Limoges et l’émotion en Alsace et Moselle à l’annonce de la condamnation des « Malgré-nous », le procès de Berlin-Est en 1983 où fut jugé Heinz Barth, sous-lieutenant SS dans la division Das Reich, l’un des exécutants du massacre d’Oradour (ce qu’il reconnut), condamné à la prison à perpétuité (et libéré en 1997). Le livre se termine par le récit de la visite à Oradour du président de la République française, François Hollande, et du président de la République allemande, Joachim Glauck, le 4 septembre 2013, et par l’évocation de l’image des deux hommes se recueillant dans les ruines de l’église ou furent abattues et brûlées avec les enfants toutes les femmes du village (sauf une), tenant par la main puis par le cou Robert Hébras, survivant du massacre qui leur avait servi de guide.

Un livre à recommander pour les bibliothèques et centres de documentation, à offrir à vos enfants et petits-enfants, à lire tout simplement.


Joël Drogland, pour les Clionautes