Tous ceux qui me connaissent peuvent témoigner de ma passion certaine pour l’athlétisme (sic) ! Carl Lewis, Jesse Owens ou encore Alain Mimoun sont les rares noms que je suis capable d’évoquer afin de cacher mon indigence lors de mes (très) rares dîners mondains. Cette bande dessinée est donc avant tout l’objet d’une curiosité : celle de découvrir l’un des plus grands, si ce n’est le plus grand coureur de fond du siècle dernier. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le pari est pleinement réussi pour les deux auteurs : Jan Novak au scénario et Jaromir 99 au dessin.

Sur près de 200 planches nous aurons le plaisir de revenir sur la vie d’Emil Zatopek, de son enfance difficile en Tchécoslovaquie jusqu’au triomphe des Jeux olympiques d’Helsinki en 1952.
Issu d’une famille pauvre, Emil Zatopek entre au service du fabricant de chaussures Bata où il se fera remarquer lors des foulées de Zlin 1941. Repéré très vite pour ses dispositions hors du commun, il intègre l’armée tchèque.

Esprit frondeur Emil Zatopek innove en instaurant les entraînements fractionnés et en hypoventilation. Qualifié pour les JO de Londres de 1948, Zatopek en reviendra couronné de gloire en emportant la médaille d’or aux 10 000 mètres et la médaille d’argent aux 5 000 mètres.

L’ouverture d’esprit dont peut faire preuve le grand champion gène néanmoins les autorités communistes du pays : proche dans sa jeunesse du docteur Haluza, condamné à 6 années de travaux forcés pour subversion, celui-ci prend sous son aile Stanislav Jungwirth. Zatopek en est convaincu : Stanislav a un grand avenir athlétique. Son destin sportif est néanmoins bloqué par l’engagement national-socialiste de son père. Remuant ciel et terre pour faire reconnaître le talent indéniable du jeune coureur, Zatopek est prêt à tout, jusqu’à se lancer dans un chantage particulièrement dangereux et risqué sur sa propre présence aux JO d’Helsinki. Le pari se révèle être une réussite totale : les autorités communistes cèdent, et Zatopek entre dans l’Histoire avec un extraordinaire triplé olympique aux 5 000 mètres, aux 10 000 mètres et au marathon.

Si l’essentiel de la bande dessinée se concentre sur les exploits sportifs de Zatopek les auteurs prennent soin de nous le faire connaître dans son intimité, auprès de ses parents craignant pour sa santé et ne souhaitant pas le voir courir, ou encore auprès de l’autre grand amour de sa vie : Dana Ingrova, championne du lancer de javelot, couronnée de l’or olympique une heure après son époux en 5 000 mètres, et dont il fut le plus fervent soutien.

Vous l’aurez compris, cette bande dessinée biographique est un plaisir à la lecture et donc une réussite. La conjugaison du scénario de Jan Novak et le dessin de Jaromir 99, très nettement dominé par les teintes bleutées et rougeâtres offre à l’œuvre une « patte » particulière qui nous a fortement plu, bien que l’on puisse comprendre qu’elle en rebute certaines et certains.

En un mot, de circonstance : sprintez afin de vous la procurer !

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Geoffrey Maréchal, pour Les Clionautes