Présentation de l’éditeur. « Découvrez dans cet avant-dernier épisode l’apport décisif des États-Unis dans la résolution du conflit et accompagnez Pierre et Maurice, seuls rescapés parmi nos héros ordinaires, pour leur dernier assaut…

Le conflit ne perd pas en intensité mais l’arrivée massive du contingent américain donne un nouvel espoir. La musique et le mode de vie des Sammies réchauffent l’atmosphère de l’arrière-front et le renfort de leurs pilotes renforce le contrôle du ciel avant la bataille décisive. Mason, l’un d’entre eux, ne trouve son courage que dans la cocaïne. Mais ses réserves sont désormais épuisées… ».

Comme la présentation l’indique, sur les huit hommes du même village embarqués dans cette guerre, il n’en reste donc plus que deux : Pierre et Maurice. Le reste de l’équipe (Louis, Jacques, Jules, Arsène, Armand et Denis) sont morts ou, au mieux, invalides et de retour chez eux.

Les auteurs nous placent à un moment décisif (un de plus…) de la guerre. Les offensives allemandes menées depuis mars 1918 ont fait reculer les troupes alliées ; en parvenant à Château-Thierry, Paris n’est plus qu’à une soixantaine de kilomètres du front. Mais aussi le moment où les Américains commencent à monter en ligne, même si certains d’entre eux combattent depuis longtemps. C’est le cas de l’escadrille La Fayette, par quoi s’ouvre l’album, en avril 1918.

Mais avec les Américains arrive également un mode de vie qui diffère sensiblement : la musique, le base ball, et même le chewing gum, dont la diffusion européenne commence effectivement à cette époque (même s’il faut attendre une nouvelle guerre et une trentaine d’années pour que le produit se popularise). Les auteurs mettent l’accent sur un autre aspect : les stupéfiants, dont un pilote semble être un amateur forcené (avec les conséquences qu’on devine).

Ce neuvième tome navigue entre Américains, Français combattant et Français de l’arrière, ce qui donne l’impression de deux univers qui ne rencontrent guère, d’autant que, contrairement aux huit personnages sur lesquels les auteurs s’étaient concentrés jusque là, on ne connaît que fort mal les sentiments des Américains à l’égard du conflit. À première vue, ce va-et-vient semble manquer de cohérence : on a des difficultés à percevoir le fil conducteur suivi, ce qui est peut-être plus gênant à première vue. Dans chacun des volumes précédents, l’un des villageois suivis faisait l’objet de l’attention des auteurs : c’est à travers lui qu’on voyait se dérouler tel ou tel épisode de la guerre, et ainsi les sentiments qu’il éprouvait. Dans ce tome 9, rien de tel : les deux héros survivants sont comme en retrait, un peu comme si la guerre leur échappait au moment où la victoire est à portée de main. De fait, il existe des témoignages qui vont dans le sens d’une dépossession, qui se sont manifestés faiblement pendant le conflit et beaucoup plus lors des négociations de Versailles : on s’est battus, et on se fait voler la vedette.

Le lecteur pourra éprouver une sorte de désorientation. Le dernier volume, conclusif, est attendu sur ce point, d’autant qu’il donnera l’impression finale à retenir de la série.


Frédéric Stévenot, pour Les Clionautes