Après un voyage en Égypte, puis dans l’ancienne Athènes, les Éditions Payot ajoutent un volume, d’une série particulière : 24 chapitres dans la Chine ancienne sur des thèmes sociétaux incarnés par un personnage mis en scène pour chacune des 24 heures d’une journée. Ici est mise à l’honneur, la Chine des Han, sous le règne de l’usurpateur Wang Mang, confucianiste et réformateur, en 17 après J.-C.
Yijie Zhang, un jeune archéologue chinois responsable de fouilles en Asie et enseignant à l’University College London se prête à l’exercice avec subtilité.
Les Han dominent la Chine pendant près de quatre siècles. Les Han occidentaux ou Han antérieurs détrônent la dynastie des Qin en 202 av.J.-C et règnent jusqu’à l’avènement de Wang Mang, au pouvoir de 9 à 23 ap.J.-C. L’empire prospère sous le règne de l’empereur Wudi (-141 à -83). Après des victoires militaires, cet empereur profite de la confiance acquise pour imposer le confucianisme au sein de l’administration et de la société tout en inaugurant de grands projets d’infrastructures comme les routes de la soie. Cet ouvrage parle d’un temps, en -17 av.J.-C., où les bienfaits des réformes de Wudi ont permis un rayonnement économique et culturel.
Ainsi le lecteur suit la vie quotidienne des hommes et des femmes ordinaires de l’époque. Par exemple, le médecin Guang allie les traitements à base de plantes médicinales et le recours aux points d’acupuncture ce qui apporte une réelle amélioration de la santé de ses patients. L’archéologie a livré des ouvrages de médecine de l’école fondée par Bian Que (mort en -310) sur des lamelles de bambou, ou une figurine en laque représentant les vaisseaux et les points d’acupuncture, des découvertes essentielles pour comprendre l’origine de la théorie des méridiens et son application dans le traitement des maladies. On a exhumé le Taichenshu, le livre de la gestation et de la naissance, un des plus vieux traités d’obstétrique de la Chine ancienne.
Les pilleurs de tombes sont surpris par la beauté du décor de la chambre funéraire qui abrite la momie de jade. Sous les Han, l’idée d’une vie éternelle après la mort s’ancre dans les esprits, de l’Empereur au plus modeste sujet. Des fortunes colossales sont investies pour construire les dernières demeures. Comme Dong, les sculpteurs de tombes les plus doués espèrent œuvrer pour les plus puissants.
Les déboires du palefrenier Lu montrent l’importance du cheval dans la cavalerie depuis l’introduction des pur-sang acquis auprès des nomades du nord comme les Xiongnu. Ces chevaux sont si précieux, que des lois sous l’empereur Zhao, interdisent la sortie des chevaux du Ferghana des frontières chinoises.
Suivre le bronzier Huang spécialisé dans les miroirs permet d’appréhender les savoir-faire artisanaux des ateliers royaux, notamment les vases en bronze hérités des Zhou. La jeune tisserande Lei représente la traditionnelle culture des vers à soie et les progrès des techniques de tissage, qui répondent à une demande accrue venant des pays lointains. La période des Han occidentaux atteste d’une production artisanale sans précédent (laques, céramiques, objets en métal).
Dans les campagnes, il s’agit d’entretenir les canaux, susceptibles d’étendre les terres irriguées, après les tempêtes en hiver et les orages en été. L’approvisionnement de l’Empire repose sur les voies d’eau où circulent les marchandises, les matériaux et les hommes. L’agriculteur Xu suit les préconisations de l’État qui prône de nouvelles techniques. Il gagne des terres près du fleuve jaune, dans sa plaine alluviale. Il suit la rotation des cultures et la mise en jachère. Il a recours à la traction animale pour un labour plus profond et utilise le soc d’araire en fer. Le blé devient la principale culture sous les Han, à côté du millet, de l’orge et du petit mil. Responsable d’une « ville-grenier », Hong surveille des entrepôts qui peuvent contenir jusqu’à 30 000 tonnes de céréales de réserve, destinées à l’armée et aux « gens au service de l’empereur ». Ce responsable des greniers se prépare à subir une inspection d’un contrôleur, adjoint du grand ministre de l’agriculture.
Au fil des heures, le lecteur suit, un prêtre confucéen, un maître de classe, un courrier à cheval, un scribe ou une danseuse, une femme de chambre ou une concubine. Selon les sources présentées, Y. Zhuang se plait à raconter avec détails la vie quotidienne de ses protagonistes : des recettes de soupe ou des salles de bain funéraires pour les besoins du défunt dans l’au-delà…
Cet ouvrage peut être très utile quand on aborde le dernier chapitre d’histoire de 6ème « Les relations de l’Empire romain avec le monde des lointains ». Utiliser des extraits des récits fictionnels permettront d’évoquer la richesse, la croissance économique et la stabilité politique de la Chine sous les Han, en tout comparable à celles de l’Empire romain, mais aussi les liens commerciaux établis entre ces deux espaces par l’intermédiaire des routes de la soie. L’idée de suivre des personnages précis de toute condition afin d’appréhender leur vie fonctionne parfaitement.
Ce docufiction conviendra à un public scolaire comme à des passionnés d’Histoire. L’iconographie et les encarts documentaires s’avèrent bienvenus dans la narration.