Les premières divisions, consacrées à l’unité de l’Asie, remettent en cause cette idée qui n’a jamais été portée en tant que projet. La mosaïque des minorités et les grandes divisions ethniques jouant un rôle centripète à cet égard. De la même façon, les grands blocs religieux endogènes, l’hindouisme, le shintoïsme, le Taoïsme et les différentes versions du bouddhisme se sont vue confrontées à des religions exogènes, le christianisme et surtout l’Islam dominant le monde indonésien et la Malaisie.
On est un peu étonné par l’absence suffisante d’évocation des constructions régionales notamment l’ASEAN ou les projets de forum asiatique qui peuvent constituer une alternative à cet Asie qui repose sur des accords essentiellement bilatéraux. De ce point de vue, la tenue en janvier 2007 du sommet de Cebu peut constituer l’amorce d’une politique régionale asiatique, réunissant avec le Japon, les quatre dragons et les bébés tigres une alternative à cette Asie dans laquelle les Etats-Unis entendent toujours jouer un rôle.
Parmi les autres questions posées, le rôle du Japon ou le projet chinois sont largement présentées ; On appréciera l’évocation du rôle de la mégalopole japonaise dans le schéma de développement du Japon, ainsi que le rappel salutaire sur l’enjeu que Taïwan représente aux yeux du peuple chinois, et pas seulement de ses dirigeants.
D’après Pierre Gentelle, et d’autres auteurs, la Chine entend bien laver plus d’un siècle humiliation, depuis la guerre de l’opium en 1842, jusqu’à la fin de l’occupation japonaise en 1945. Taïwan serait alors le dernier vestige, après Honk Kong et Macao de ces souillures laissées par les diables étrangers. On pourrait en effet considérer que Formose, ancienne colonie japonaise en fait partie, mais c’est peut-être oublier que la République de Chine, qui a représenté la Chine à l’ONU jusqu’en 1972, s’est d’abord constituée autour du refus du communisme et autour des débris de l’armée en déroute du Guomindang. Du coup l’auteur parle d’une intégration progressive de l’île, avec l’évocation d’une menace de guerre que l’on ne fait pas, autour d’une proclamation d’indépendance que l’on ne prononce pas non plus.
On notera également pour la huitième question l’importance des marges maritimes, une belle séquence, évoquant ces conflits périphériques complexes, posant le problème des délimitations des eaux territoriales, des rapports de forces maritimes, et des ambitions énergétiques. L’imbroglio des Spratly en mer de Chine méridionale ou celui de l’archipel des Sendaku/Diaoyu, est effectivement traité, d’autant plus que ce dernier conflit pose le problème de la renaissance politique du Japon sur la scène internationale.
La réalisation multimédia pourrait être améliorée. Il s’agit concrètement de neuf séquences d’un cours magistral donné par Pierre Gentelle dans un décor très sobre. L’attention ne sera pas détournée, assurément. Les cartes sont pourtant remarquablement réalisées avec un très bon « visuel ». Et on regrette d’autant plus de ne pas pouvoir les utiliser comme un support d’explication. Cela est d’autant plus dommage qu’elles sont proposées au format PDF, donc destiné à l’impression. On pourra alors contourner cette limite en les imprimant sur un transparent destiné à la rétro projection.
Le niveau auquel est destiné ce DVD, encore une fois très agréable à regarder et surtout à entendre est celui du premier cycle du supérieur, tout comme l’ouvrage papier dont il est issu. Certaines séquences comme « pourquoi l’Asie telle qu’elle est aujourd’hui » pourraient, sous réserve d’un support explicatif dense, servir une démarche d’apprentissage. Mais en raison des limites techniques du support, il est indispensable d’utiliser un PC ou un Mac, pour en tirer le meilleur parti.
Au final, ce DVD permet à des enseignants pressés ou à des étudiants, de faire rapidement le tour des questions liées à la géopolitique de l’Asie. Il pourra donc trouver sa place dans un cabinet d’histoire-géographie ou un centre de documentation. L’approfondissement des connaissances pourra se faire avec un grand profit à partir de l’ouvrage papier dont les références sont rappelées ci-dessous.
Bruno Modica