Sarah Dubeaux est docteure en aménagement et urbanisme. Elle a réalisé sa thèse dans une démarche de recherche-action au sein de l’Agence d’urbanisme de la région du Havre et de l’estuaire de la Seine. Yoan Miot est maître de conférences en aménagement et urbanisme à l’École d’Urbanisme de Paris. Tous les deux ont travaillé sur un cas d’aménagement dans le PNR Livradois-Forez et plus particulièrement de l’intercommunalité d’Ambert-Livradois-Forez. Leur étude est publiée dans une collection portée par les éditions Autrement et le POPSU (Plateforme d’Observation des Projets et Stratégies Urbaines), Les Carnets de Territoires.

Les Carnets de Territoires forment une collection qui vise à révéler la diversité des petites villes et des ruralités, des dynamiques qu’elles connaissent et des enjeux de l’action publique locale, sous la forme de résultats de recherche ou d’études de terrain. La maquette des ouvrages de cette collection est extrêmement bien conçue. Images en couleurs, cartes, graphiques à l’appui, les ouvrages débutent par un point théorique en matière d’aménagement ou d’une problématique d’aménagement, font un diagnostique territorial et exposent de manière claire la manière dont les différents acteurs territoriaux tentent d’apporter une ou plusieurs solutions à la problématique posée. Ainsi, le présent ouvrage est-il le sixième ouvrage de cette collection. Les précédents portaient sur les problématiques suivantes : Habiter et vieillir (Xertigny, mai 2022), Gérer la petite ville touristique (Marseillan, juillet 2022), Le patrimoine vacant dans les petites villes (Briançon, juillet 2022), Urbanité montagnarde (Saint-Loubès, novembre 2022) et Régénérer une petite ville sous double influence métropolitaine (Rives-de-Gier, novembre 2022).

Le Carnet de Territoire dirigé par Sarah Dubeaux et Yoan Miot étudie comment l’intercommunalité d’Ambert-Livradois-Forez tente de faire face à une situation de décroissance urbaine des petites villes dont l’une des conséquences visibles est l’augmentation des lieux vacants. Pour intervenir sur les espaces vacants le projet est basé sur la revitalisation, c’est-à-dire une action multidimensionnelle et multipartenariale qui demande une importante ingénierie territoriale. Parce qu’elle nécessite des moyens techniques et financiers importants, la revitalisation est souvent menée dans des contextes urbains.

Le contexte est celui d’une communauté de communes du Puy-de-Dôme de 58 communes touchées par une forte décroissance démographique et la multiplication des immeubles vacants. Le phénomène de vacance est lui-même un phénomène assez peu connu et assez mal évalué. Il ne s’agit pas uniquement de biens en vente ou dégradés possédés par une lointaine SCI. Il faut également y inclure une maison dégradée ouverte quelques jours par an. Les marqueurs de la vacance, tels que des volets fermés, de la végétation anarchique, etc., affectent le cadre de vie.

La démarche de revitalisation qui est présentée dans cette étude de cas est fondée sur un postulat : « C’est l’inadéquation de l’offre à la demande qui cause la vacance immobilière ». En ce qui concerne les centre-bourgs, les élus territoriaux pensent que construire permet d’attirer de la population mais cela se traduit souvent en réalité par une forte dédensification et une dégradation des centres. De ce fait, le projet décrit montre comment les acteurs rencontrés ont travaillé dans trois directions : qualifier l’offre de biens vacants, remobiliser les propriétaires et organiser la rencontre avec la demande.

Les deux opérations publiques qui sont ici prises en exemple dépassent l’opération immobilière pour arriver à la requalification globale d’un îlot. Ils articulent une programmation mixte (commerces + logements), promeuvent la déconstruction ponctuelle ou lourde et offrent des possibilités de restructuration de l’espace public. Pour les deux projets, un atelier d’urbanisme a été mis en place localement, l’Atelier d’urbanisme en Livradois-Forez (AULF) qui a joué le rôle d’une maîtrise d’ouvrage urbaine. L’activité de l’AULF ne s’arrête pas au pilotage et à la coordination du projet d’aménagement. Il met également en place les conditions de faisabilité, construit les partenariats financiers. Il est totalement impliqué dans la concrétisation du projet. Si le projet de revitalisation est riche d’enseignement pour bon nombre de collectivités locales rurales, la création de cet outil de gestion qu’est l’AULF est une autre particularité du projet digne d’un très grand intérêt.