Cette histoire, c’est à la fois celle de Joseph Weismann et celle de Joseph Kogan. Deux enfants juifs nés de parents étrangers et résidant en France au début de la Seconde guerre mondiale. Deux enfants dont la famille va disparaître dans la rafle du Vélodrome d’Hiver de juillet 1942. Deux enfants qui refusent et s’opposent à un destin morbide annoncé.
Cette bd est une réédition du titre paru en janvier 2022La Bd a été chroniquée par Camille Glauda. A l’occasion des 80 ans de la « libération » du centre de mise à mort de Birkenau, cette édition est agrémentée d’un cahier d’une dizaine de pages pour contextualiser l’histoire évoquée.
La BD suit principalement le parcours de Joseph Weisman, multipliant les aller-retours entre les souvenirs de cette période maudite et la reconstruction, s’il est possible de se reconstruire, post-guerre. Pour cela, la BD part tout simplement des retrouvailles des deux Joseph après la guerre, alors que l’un est resté en France et l’autre est aux EU, chacun ignorant si l’un et l’autre ont survécu.
A travers la vie de Joseph Weismann, nous pénétrons d’abord dans le quotidien d’une famille juive polonaise immigrée en France, intégrée, et qui, tant bien que mal, vit dans les premières heures du pétainisme. La montée de l’antisémitisme, le basculement antisémite de l’Etat français, les persécutions deviennent alors de plus en plus marqués, jusqu’à la rafle qui bouleverse le destin de cette famille, et d’autres avec.
Cette BD, c’est aussi cette quête de survie de Joseph: le refus de la déportation, la fuite à travers la France, les voyages entre familles d’accueil, tout en esquivant les collaborateurs, l’apprentissage d’un métier et de l’amour. Cette BD apporte ce lot de nuances nécessaires, évitant le blanc et le noir, pour apporter de la nuance chez de nombreux personnages.
Une de ses grandes forces est aussi la manière dont Joseph ne comprend que très progressivement le destin tragique de sa famille (et le sien) et l’importance de sa voix dans le devoir de mémoire. Les retrouvailles avec son ami Joseph, la rencontre avec Simone Weil, le discours historique de Jacques Chirac de 1995 sont autant de pavés dans ce chemin sinueux.
Au final, une BD émouvante et poignante qui a aussi le mérite de rappeler les grandes étapes historiques de la Shoah et de sa mémoire. Joseph Weismann se retrouve plongé dans des événements qui le dépassent et qu’il ne saisit pas pleinement (mais comment le pourrait-il?), habité par l’espoir, l’humilité et la combativité.
Cette BD est accessible à tous et semble indispensable dans tous les CDI d’établissements scolaires. De nombreuses planches peuvent être utilisées en classe avec les élèves. A lire par le plus grand nombre.