Le sous – titre (Faut-il craindre la croissance mondiale et le vieillissement ?) de ce nouvel atlas Autrement pourrait laisser à penser que les grandes problématiques démographiques alarmistes des années 1970 font un retour en force. Pourtant, l’objectif de cet opus est tout autre. Il vise à bousculer les idées reçues pour mieux comprendre le monde de demain : la population, vue par le prisme de la santé, de l’éducation, des migrations ou bien encore de l’urbanisation, témoigne de l’inégal développement et des déséquilibres mondiaux. C’est la manière de vivre des hommes, plus que leur nombre, qui aura un impact sur la planète.

Gilles Pinson, normalien, professeur au Muséum National d’Histoire Naturelle, est démographe à l’INED. Rédacteur en chef de la revue Population et Sociétés, il a élaboré en 1999 un CDROM intitulé « Six milliards d’Hommes et moi… » dont le titre a inspiré celui de l’exposition présentée en 2005 à la Cité des Sciences et de l’Industrie (La population mondiale… et moi ?). En 2006, il a dirigé un numéro de TDC (Textes et Documents pour la classe, N°924) sur le même thème.

L’ouvrage qui paraît en 2009 intéressera les enseignants du secondaire qui ont à enseigner cette question de géographie (Seconde, Sixième). Ils pourront lire avec profit ce livre pour remettre à jour leurs cours pour la prochaine rentrée scolaire. A l’image de l’exposition conçue pour la Villette en 2005, cet atlas témoigne du savoir-faire pédagogique de son auteur. Les bulles qui ponctuent les pages de l’ouvrage mettent en avant des chiffres clés. On apprend ainsi que la croissance par jour de la population mondiale équivaut à 210 000 personnes, soit la population d’une ville comme Saint Etienne. Le texte de l’ouvrage est simple, à la portée d’élèves de lycée. Les commentaires des documents sont exhaustifs. Ils constituent une véritable plus-value par rapport aux autres atlas Autrement ou, très souvent, un important corpus est proposé sans que chaque document ne soit toujours commenté dans le détail.

Cette qualité peut être considérée comme un défaut pour qui maîtrise l’analyse de documents démographiques et aimerait aller au-delà. Malgré tout, ce lecteur trouvera des pages problématisées (par exemple : la sélection du sexe : mode passagère ou phénomène durable ?). L’évolution de la discipline est abordée aussi. Ainsi, Gilles Pinson montre que la malnutrition, contrairement à ce qui a prévalu pendant longtemps, n’est plus considérée comme la cause de la mortalité infantile mais désormais comme une conséquence d’infections occasionnant des retards de croissance et des pertes de poids.

La confiance dont témoigne Gilles Pinson, à propos des chiffres de l’ONU, comme des projections démographiques sur 50 ans, peut toutefois surprendre quand on connaît les erreurs d’interprétation que l’on a pu faire dans le passé (cf. Alfred Sauvy). Son analyse est toutefois plus nuancée à propos de projections plus lointaines dans le temps. D’après lui, le modèle de la transition démographique n’est plus valable au-delà. Les incertitudes sur la fécondité sont trop importantes. On ne peut pas affirmer qu’elle va continuer à baisser à l’échelle mondiale. Il estime qu’elle peut très bien reprendre et dépasser deux enfants par femme. Dans ce cas, on peut craindre la surpopulation alors que dans le cas d’une baisse continue de la fécondité, c’est le vieillissement qui se profile. Dans tous les cas, l’avenir de l’humanité doit nous alerter sur la question du nombre d’hommes que la terre peut supporter si nous continuons de vivre de la sorte. La question démographique est très proche de celle du développement durable.

Les pages consacrées au vieillissement permettent au lecteur de bien prendre la mesure de celui-ci en comparant différentes pyramides des âges. A l’échéance de 2050, les bases des pyramides se rétrécissent, y compris celle du Nigéria. Les documents portant sur l’âge médian permettent de rendre compte de ce vieillissement aussi. La France apparaît comme un pays connaissant un vieillissement particulièrement lent puisque sa population de 65 ans et plus a mis 114 ans pour passer de 7% à 14% dans la population totale alors que la Chine a subi la même évolution en 25 ans, seulement (la politique de l’enfant unique aidant).

On trouvera aussi dans cet atlas des documents que l’on ne trouve pas dans les autres manuels telle la carte rendant compte de la répartition des personnes ayant dépassé l’âge de 115 ans ou bien encore la pyramide des âges des immigrés (en forme de losange, en raison du faible nombre d’enfants et de personnes âgées) par pays de naissance. De même, la comparaison de la situation démographique de l’Union Européenne avec celle des Etats-Unis s’avère bien utile. Ces deux espaces régionaux ne présentent pas le même profil de pyramides des âges puisque les Etats-Unis affichent une forte fécondité.

Au final, ce dernier né des Atlas Autrement doit avoir toute sa place dans les bibliothèques des CDI des établissements scolaires et celle des professeurs pour toutes les raisons exposées plus haut.

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