L’insatiable collection d’atlas de chez Autrement propose ici une réédition du volume d’Olivier Dabène (professeur à Sciences Po Paris et président de l’Observatoire de l’Amérique Latine et des Caraïbes) sous-titré cette fois comme « le continent de toutes les révolutions » et qui demeure toujours, comme le rappelle l’introduction, celui de tous les contrastes.

Les trois premières parties présentent, assez classiquement, la donne historique, démographique et économique.
On rappelle que l’Amérique Latine voit ses états actuels dessinés par les vice-royautés du XVIIIème siècle, tracés appuyés par les guerres d’indépendance qui permettront, difficilement, une insertion dans l’économie mondiale.

L’analyse du peuplement montre très bien les phénomènes de migration, parfois même à l’intérieur d’un même pays (Colombie), les convoitises suscitées par l’ampleur des richesses naturelles et des surfaces exploitables. La ville, ayant crû rapidement, apparaît extrêmement clivante.

Le volet économique expose les spécialisations en tout genre et, là encore, des inégalités à toutes échelles malgré une pauvreté en recul progressif. D’inquiétants pourcentages sur l’économie informelle sont présentés, les statistiques colombiennes considérant même les entreprises de moins de 10 salariés comme en faisant partie !

Les trois parties suivantes mettent très bien en lumière les apports de cette réédition. Sous un angle culturel, la quatrième partie traite du phénomène révolutionnaire. La page 53 met en regard un tableau très complet sur les guérillas depuis les années 1960 avec dates de création, pays concernés et situations actuelles et une carte sur le taux d’homicide en Amérique Centrale (60 fois plus élevé au Honduras qu’en France à titre de comparaison !). Sont présentées également une étude sur la baisse du catholicisme (et le succès corollaire des autres religions) et une sur l’art « engagé » (pochoirs notamment) qui représente une véritable tradition.

La cinquième partie traite des systèmes politiques. (Re)devenus à la mode dans nos contextes électoraux actuels, le populisme, vu à droite comme à gauche, et le néopopulisme sont illustrés par un tableau très parlant sur l’hyperprésence des présidents sur les télévisions nationales. Les transitions démocratiques se sont récemment accompagnées d’un tournant à gauche (notamment au Pérou). Le continent a même vu se mettre en place un indice lui étant spécifique, l’indice de développement démocratique.

La sixième partie propose enfin un coup d’œil sur l’Amérique Latine et le Monde. Il est plus exact de parler d’abord de l’intégration régionale qui n’est pas sans rencontrer quelques obstacles notamment sur la question des frontières (perte de l’accès au littoral par la Bolivie lors de son indépendance, focus sur la dissymétrie Etats-Unis/Mexique…). Les filières du commerce illicite passent en priorité par la drogue (carte très « colorée » des cartels mexicains page 78). Le rapport particulier avec les Etats-Unis évolue rapidement à l’image de la répartition de la population hispanique ayant gagné du terrain dans les Etats de l’Est et non plus uniquement le long de la frontière mexicaine. A échelle mondiale, sont exposés les rapports avec l’Europe mais surtout d’une Chine partant véritablement à la conquête de l’Amérique Latine (visites diplomatiques, investissements et échanges commerciaux).

Peut-être légèrement plus classique dans ses documents (de très bonne qualité, signés Aurélie Boissière) que d’autres volumes lus récemment mais, comme d’habitude, une solide référence en la matière.