L’Europe est une terre de paradoxes. Dans l’introduction, les auteurs insistent sur plusieurs d’entre eux. Ainsi, l’évocation de l’Europe provoque répulsion ou fascination. Elle énerve certains tandis que, pour d’autres, elle représente un eldorado à atteindre. Par où qu’on l’aborde, on a du mal à la définir : faut-il remarquer une certaine homogénéité ou pointer ses différences ? L’Europe est d’abord une idée. Fragmentée en 45 pays, elle est en même temps synonyme d’union pour un certain nombre d’entre eux. Cet atlas a été écrit par Frank Tétart, longtemps co-auteur du « Dessous des cartes », et Pierre-Alexandre Mounier, enseignant, qui participe à la préparation des concours Sciences-Po. La cartographie a été réalisée par Aurélie Boissière.

Aux fondements de l’Europe

Si l’on met à part l’Océanie, l’Europe est le plus petit des continents. Elle ne représente qu’un tiers de l’Afrique ou un quart de l’Asie. L’Europe c’est donc peut-être avant tout une civilisation. A cet égard, on peut s’appuyer sur la citation de Paul Valéry qui mettait l’accent sur trois racines : « Rome, le christianisme et la Grèce ». Pour essayer d’en cerner les limites, les auteurs proposent six cartes différentes qui vont de l’Espace Schengen à l’Eurovision. On peut associer l’ Europe à la démocratie et une double page en retrace l’histoire, d’Athènes dans l’Antiquité au XXème siècle. A partir de 1919, la démocratie devient d’ailleurs une valeur fondamentale dans la reconstruction du continent européen et reste aujourd’hui un défi permanent. L’atlas évoque ensuite la Babel linguistique que représente l’Europe avec ses 70 langues et ses trois alphabets. Rappelons que, rien qu’au sein de l’Union européenne, tous les textes sont traduits en 24 langues. Le tour d’horizon historique se poursuit avec l’évocation de l’humanisme puis de la période entre le XVIème et le XIXème siècle, avant de se conclure sur l’Europe divisée au temps de la guerre froide.

L’Europe, une idée : l’Union européenne

Un utile tableau récapitule les premières organisations qui se mettent en place entre 1948 et 1952 puis une double-page revient sur la construction de 6 à 27. Avec l’intégration de la Grèce en 1981, on peut parler d’un autre tournant démocratique affirmé dans le projet européen. Les pays qui reçoivent le plus d’aides sont ceux de l’Est. L’Union européenne ce sont des échecs, comme celui de la CED, et si l’Europe de la Défense continue d’être un projet, c’est sans doute parce que seuls dix pays auraient un intérêt budgétaire réel à fusionner leurs budgets pour réaliser des économies. Du côté des réussites, il y a évidemment Erasmus et ses déclinaisons qui a bénéficié à neuf millions d’Européens. Les esprits chagrins noteront que dans 70 % des cas, c’est une mobilité vers l’Ouest. L’union n’en reste pas moins une puissance commerciale, normative, comme le montre l’exemple de la RGPD, mais qui doit aujourd’hui répondre à des défis migratoires majeurs. Tous ces aspects sont abordés sans oublier un point précis sur le Brexit. Parmi les autres épines dans le pied de l’Union, il y a les populismes pour lesquels Nonna Mayer note : «  L’Europe a beaucoup servi aux populistes, elle leur a offert une tribune ». L’identité doit être une ouverture, un moyen de lier les cultures et non un repli. La valorisation par l’Union européenne de l’échelon régional a aussi contribué au renouveau identitaire. On peut enfin souligner que l’Union est un ensemble vieillissant qui dépose moitié moins de brevets que la Chine.

Géopolitique des territoires

Cette troisième partie propose plusieurs éclairages dont un sur l’espace baltique «  entre coopération et tensions ». Quant à la Méditerranée, elle se transforme de plus en plus en « zone de confins face aux migrations internationales, et de tensions. » On ne peut que constater pour l’instant l’échec du projet Euro-Méditerranée. Les auteurs envisagent la situation ambigüe de la Russie qui demeure une puissance faible qui utilise la nuisance pour s’imposer. Les autres entrées sont consacrées à l’Ukraine, à la Biélorussie ou encore au Caucase. On peut s’arrêter sur le cas de la Turquie qui ne peut se passer de l’UE qui reste son premier partenaire commercial, malgré les tensions diplomatiques. On trouve ensuite d’autres approches sur Chypre, sur les micro-Etats en Europe ou encore sur les territoires ultra-marins qui interrogent, à leur façon, la définition de ce qu’est l’Europe.

Cet atlas de l’Europe pourra donc servir à l’enseignant, par exemple en HGGSP de 1 ère dans le cadre de la question sur les frontières, mais ce n’est là qu’une de ses utilisations possibles.

Jean-Pierre Costille