Quel projet ?
Comme le veut la série, on dispose donc de doubles pages avec de nombreux encarts. Un sommaire très détaillé permet de se repérer facilement. En plus un petit jeu avec des pictogrammes de couleurs reliés aux piliers du développement durable permet de cerner l’angle privilégié sur chaque double page.
L’introduction donne clairement le ton : « Non aux discours alarmistes : les géographes se mobilisent ».
Le sous-titre est intéressant et permet de comprendre l‘angle de ce livre : un monde inégalitaire, des expériences novatrices, des outils pour l’avenir. Les auteurs ont donc choisi un raisonnement clairement multiscalaire puisque l’on va du quartier au monde selon les problématiques abordées. On sent bien qu’on est dans un deuxième temps du développement durable puisqu’on essaye clairement de distinguer les vraies et les fausses bonnes idées.
Faire la chasse aux idées reçues et aux fausses bonnes idées
C’est indéniablement un souci qui traverse toutes les pages de cet atlas au-delà de l’organisation en grandes parties. Signalons-en quelques-unes : c’est le continent asiatique qui rassemble le plus de populations sous-alimentées avec plus de 520 millions de personnes, même si en pourcentage c’est l’Afrique qui est la plus touchée.
Yvette Veyret traite de la question des risques naturels et montre des ordres de grandeur très parlants : entre 1990 et 2000 les catastrophes naturelles ont absorbé 5 % du PIB du Bangladesh mais 15 % pour le Nicaragua. A travers cet exemple, il faut comprendre qu’elle milite pour dire qu’il n’y a pas un développement durable, mais des situations différentes qui nécessitent des réponses différentes.
Le cas du pétrole est abordé pour le Tchad où l’on s’aperçoit qu’une potentialité pétrolière se transforme en naufrage pour la population.
Toujours dans l’idée de clarifier les actions, Paul Arnould montre que la certification des forêts a eu tendance finalement à profiter aux forêts tempérées alors que cette idée avait été initialement développée pour les forêts tropicales.
Enfin le quartier durable c’est bien, si cela ne conduit pas à rejeter plus loin dans la ville tout ce que le quartier ne veut pas ! Le développement durable serait alors la bonne excuse au phénomène Nimby (not in my back yard, pas dans mon propre jardin).
Les auteurs s’interrogent sur la durabilité
La question cruciale aujourd’hui est celle des biocarburants. Dans un pavé très synthétique, tout est dit : 200 kilos de maïs sont nécessaires pour faire le plein d’un 4X4 soit la consommation alimentaire annuelle d’un Mexicain ! L’auteur n’oublie pas de préciser le coût de production dérisoire de la transformation de la canne du Brésil ce qui explique le succès de cette culture.
Sur la durabilité, d’autres thèmes sont abordés comme les transports à travers l’exemple d’Amsterdam. Les entreprises sont aussi abordées pour examiner leur attitude face au développement durable. Quelques graphiques bien pensés permettent de synthétiser et peuvent permettre d’aborder cette question avec les élèves. On s’interroge aussi sur l’agriculture biologique : une agriculture qui présente des rendements nettement inférieurs à ceux des agricultures conventionnelles alors que depuis trente ans la progression de la production a reposé sur une progression des rendements à l’hectare.
Le livre fourmille d’exemples à utiliser en seconde : l’eau et les déchets comme révélateur des inégalités ou encore la gestion des littoraux.
Des interrogations subsistent au cours du livre : à la question de la biodiversité en danger, les auteurs ajoutent un point d’interrogation s’appuyant sur plusieurs faits : le nombre d’espèces existantes est incertain, variant entre 5 et 30 millions, contre moins de 2 millions répertoriées actuellement.
Du global au local : les échelles, toujours et encore
On trouve là encore de nombreux documents utilisables pour les cours comme cette double page consacrée à la convention alpine qui peut servir en première générale pour l’étude de cas sur les Alpes. Le Brésil est aussi abordé car, comme le soulignent les auteurs, c’est un véritable laboratoire qui allie une riche législation environnementale à des politiques volontaristes et une présence importante d’ONG. Afin de faire la chasse une dernière fois aux idées reçues, l’atlas se termine par un tour d’horizon d’un certain nombre de pays. Signalons particulièrement une étude sur les Etats-Unis bien loin des propos outranciers. Oui, les Etats-Unis consomment 22 % de l’énergie mondiale, mais en même temps des villes et des états prennent des initiatives.
Il s’agit d’un ouvrage indispensable à au moins deux titres : indispensable à la réflexion, indispensable pour une bonne partie de nos cours. Cet atlas aide à penser le développement durable. Dans un premier temps cette notion a servi à mobiliser autour d’une urgence, mais de plus en plus on s’aperçoit que ce message fédérateur clamé pour favoriser la prise de conscience impose une diversité de réactions, ce qui semble presque contredire le premier temps. Tout l’enjeu est d’arriver à conjuguer la multiplicité d’actions avec une conscience planétaire, bref laisser sa place aux différences après avoir souligné le fait qu’on n’avait qu’une planète à ménager. C’est en répondant à cette injonction qui n’est que faussement paradoxale que le développement durable deviendra une valeur efficiente ; sinon il restera un mot creux, un concept ballotté entre écologistes catastrophistes et concepteurs marketing sans scrupule.
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