« Grâce à plus de 100 cartes et documents, cet atlas explore les enjeux du projet du Grand Paris en rendant compte des mutations dans leur diversité et leur complexité. » Il est dirigé par Daniel BÉHAR, professeur à l’École d’urbanisme de Paris et Aurélien DELPIROU, maître de conférences à l’École d’urbanisme de Paris, qui ont réuni une équipe d’une quinzaine d’enseignants de l’université pour aborder toutes les thématiques. La cartographie est assurée par Paul GALLET et Hugues PIOLET.
Par leur ampleur et leur diversité, les projets du Grand Paris concentrent et exacerbent à la fois les principaux enjeux contemporains de l’aménagement des grandes villes. S’y déploient tout autant les questions relatives à la conception architecturale et urbaine, aux exigences de sobriété et de solidarité, que celles qui ont trait aux pratiques de l’urbanisme, aux évolutions des modes de faire et des métiers. Depuis 2007 et le lancement du projet par le président de la République de l’époque, Nicolas SARKOZY, le « Grand Paris » s’est imposé dans le débat public, au point de faire l’objet de tous les superlatifs (le « plus grand projet urbain d’Europe »). Mais le Grand Paris suscite des critiques à la hauteur de ces objectifs : polarisation urbaine autour des gares aboutissant à une transformation du tissu urbain, accroissement des inégalités sociales et territoriales, problèmes de gouvernance,… Cet atlas, à la fois outil de compréhension des dynamiques du Grand Paris et révélateur des principaux défis à relever par les différents acteurs, est divisé en 5 parties :
Une métropolisation singulière
Le Grand Paris est un projet emblématique de la métropolisation généralisée des sociétés contemporaines. Mais il est original par son modèle de gouvernance associant une place prépondérante de l’État (p.12-13) et une persistance du poids des communes. Ainsi la création de la nouvelle institution de la métropole du Grand Paris se heurte à la résistance de la plupart des acteurs locaux (p.14-15). Se pose également le problème de l’organisation et de la gestion des services publics dans une ville globale, organisée en réseaux (p.16-17) .
Une histoire longue de la mutation urbaine
Le Grand Paris s’inscrit dans une histoire territoriale, politique et sociale de longue durée et paradoxale (p.30-31). L’extension radioconcentrique de l’agglomération parisienne n’a pas empêché une structuration progressive par plusieurs centres secondaires, de manière spontanée ou planifiée (p.32-33). Les infrastructures de transport, notamment, ont contribué à construire et à structurer l’agglomération parisienne (p.34-35) .
Une transformation urbaine généralisée
L’État est régulièrement intervenu en Ile-de-France dans le cadre d’opérations d’aménagement d’ampleur aux enjeux stratégiques à l’échelle nationale (p.42-43). Mais il n’est plus en mesure de porter seul des opérations d’envergure. Les dispositifs de contractualisation accompagnant les projets du Grand Paris depuis 10 ans ont permis aux collectivités de défendre un urbanisme plus négocié et plus conforme à leurs attentes, notamment en lien avec le métro en rocade censé faciliter les mobilités de banlieue à banlieue mais aussi porteur de risques d’éviction des populations (p.48-49). Les Appels à Projets Urbains sont un exemple de redistribution des rôles des acteurs de la production urbaine parisienne (p.52-53). Toutefois la société civile, émergente, semble peu mobilisée par les différents acteurs pour participer au projet métropolitain. Le Grand Paris semble s’écrire sans ses habitants (p.58-59).
Aménager la métropole ou développer la ville-monde
Une dialectique s’affirme entre la volonté d’accroître l’attractivité de la ville-monde et le désir de répondre aux besoins des 12 millions de Grand Parisiens. Commerces (de luxe) (p.66-67), bureaux (centre des affaires) (p.68-69), centres de formation et de recherche (p.70-71), totems touristiques (p.74-75), infrastructures culturelles (p.78-79) et sportives (p.76-77) sont des marqueurs, symboles de la compétition entre villes-monde. Mais en même temps, l’offre de logements sociaux, notamment à Paris, pose toujours problème (p.64-65). Les inégalités d’accès aux soins sont loin d’être résorbées (p.72-73). Le programme de modernisation et d’extension des transports collectifs existants ne semble pas non plus en mesure de réponde à la demande de mobilité des Franciliens (p.62-63).
Une métropole face aux transitions
Les défis écologique, énergétique, alimentaire ou numérique de l’adaptation du Grand Paris au XXIème siècle sont énormes. En 2050, dans une génération, le premier enjeu sera la capacité de résilience. Il s’agira d’imaginer une nouvelle culture de l’environnement, mais aussi de s’intégrer dans un monde définitivement réticulaire et technologique (p.88-89).
Au final, cet atlas analyse toutes les échelles et replace la réussite des projets du Grand Paris dans leur croisement. « La question des interdépendances et des réciprocités territoriales, quelles soient économiques, sociales ou environnementales », parait alors essentielle. Mais dans la variété des interventions des acteurs, il apparait que les premiers concernés, les habitants du Grand Paris, sont peu sollicités et participent peu aux projets d’aménagements qui vont les concerner directement. Cet atlas, essentiel pour qui veut comprendre tous les enjeux du Grand Paris, arrive facilement, avec un propos dense et des documents variés et pertinents, à nous faire saisir ces différents enjeux qui traversent le Grand Paris dans une vision prospective, consciente des problèmes mais fondamentalement positive.