Cet Atlas de l’empire romain, rédigés par Christophe Badel, dont nous avons déjà chroniqué les ouvrages sur les pages de la Cliothèque, et Claire Levasseur n’a pas pour but de présenter l’intégralité de la civilisation romaine, mais son objectif est bien celui de s’attarder sur des moments clés de l’histoire de l’Empire romain, c’est-à-dire les moments décisifs de sa construction et son expansion. Et par conséquent, d’expliquer ce que certains nomment le processus de romanisation. Cette romanisation s’est traduite à travers les différentes conquêtes de Rome, mais aussi grâces aux politiques romaines d’organisation des territoires (colonies et les municipes), d’organisation de la société (religions, droit des personnes, …). Par conséquent, d’une certaines souplesse de l’Empire romain à l’égard des provinces annexées. Toutefois, la culture romaine n’a pas été adoptée de la même manière et de la même intensité par les territoires de l’Empire. 

I – Vers l’Empire universel IIIe-Ier Siècle avant notre ère

Cette première partie met en exergue les façons dont Rome a pu étendre son Empire de l’Orient à la Manche en seulement trois siècles. Le démembrement de l’empire d’Alexandre le Grand en trois royaumes a eu pour conséquence de créer un certain équilibre entre les différentes puissances autour de la mer Méditerranée. Ce qui a certainement permit à Rome d’envisager un agrandissement de son territoire dès cette période. 

Durant cette période, vers 280 avant notre ère, Rome s’étend dans toute l’Italie, et met en place sa politique d’annexion des territoires italiens vaincu qui deviennent des municipes romains, et fonde à des lieux stratégiques des colonies dont les habitants possèdent les mêmes droits civils que les citoyens romains. Rome achève sa conquête de la péninsule Italienne par la prise de Tarente en 272 avant notre ère. A ce moment elle domine une région entière mais reste sur le sol italien. 

Ce sont les guerres puniques (264-201 avant notre ère) qui ont permis à Rome d’accéder au statut de puissance mondiale. Durant la première guerre punique (264-241 avant notre ère), les batailles se sont concentrées autour de la Sicile. Si Rome au début de cette guerre ne semblait pas pouvoir faire face à Carthage qui possédait une flotte importante, elle en sorti vainqueur et acquiert la Sicile, la Sardaigne et la Corse. Un incident abscond déclencha la deuxième guerre punique (218-201 avant notre ère).

Hannibal Barca grand stratège possédant une certaine rancœur envers Rome décida de combattre cette dernière non pas sur la mer mais sur terre. Après avoir traversé les Pyrénées et les Alpes, il remporta trois grandes victoires (Le Tessin, La Trébie et Trasimène). Son plus grand triomphe se déroula à Cannes car non seulement il réussit à vaincre 45 000 soldats et un consul, mais en plus, la partie méridionale de l’Italie se rallia à lui suite à ses victoires. Toutefois, Rome déploya une tactique visant à asphyxier l’adversaire en multipliant les harcèlements et en délaissant le principe des batailles rangées. Carthage doit capituler face aux nouvelles tactiques de l’armée romaine et perd l’Espagne et l’Ouest de son domaine africain. A partir de moment là, Rome ne compte plus de puissance rivale en Méditerranée occidentale. 

A partir de 200 avant notre ère, l’expansion de Rome se dirige aussi bien en Occident qu’en Orient. En Occident, Rome s’étend dans tout le sud de l’Espagne (Siège de Numance) mais aussi en Gaule transalpine (125-118 avant notre ère) et Cisalpine (100-191 avant notre ère). Carthage en Afrique sera détruite en raison de la peur des romains d’un possible regain de l’ennemi. En Orient, Rome va vaincre Philippe V de Macédoine qui s’était allié avec Carthage et établir son hégémonie sur la Grèce. La Macédoine sera transformée par Rome en province. En outre, Persée, fils de Philippe va subir une défaite face à l’armée romaine lors de la bataille de Pydna en 168 avant notre ère. Toutes ces défaites ont pour conséquence la disparition du royaume antigonide qui sera démembré en 4 républiques.

Le dernier siècle de la République constitue celui de l’accélération de l’expansion de l’empire romain. En Orient d’une part (sur la Mer Noire et l’Euphrate) grâce aux guerres menées par Pompée contre le roi du Pont Mithridate, en Occident aussi grâce à la conquête de la Gaule par César qui a profité de l’appui de nombreux aristocrates locaux qui, dans leur rivalité ont pensé qu’une alliance avec César serait bénéfique. Mais aussi la victoire d’Octave face à Cléopâtre et Marc-Antoine qui aboutit à l’occupation de la vallée du Nil jusqu’à la frontière de la première cataracte en 30 avant notre ère.

Il est nécessaire de souligner que cette ardeur conquérante a pour origine les ambitions des généraux depuis le IIème siècle avant notre ère qui recherchent la gloire et la puissance et souhaitent suivre les pas d’Alexandre le Grand. Le Sénat a de moins en moins le contrôle sur cette volonté expansionniste et se voit contraint de valider les décisions des imperatores. Si Rome s’est avérée glorieuse dans son expansion militaire et géographique, ses victoires sont à tempérer dans la mesure où des guerres sociales (91-89 avant notre ère) et la révolte du gladiateur Spartacus (73-71 avant notre ère) ont éclatées obligeant Rome à accorder à tous les italiens la citoyenneté romaine. 

II – La République Impériale, IIIe-Ier Siècle avant notre ère

Dans cette partie, il s’agit de comprendre l’organisation de la République de Rome. Que ce soit sont organisation politique et sociétale interne à la citée mais aussi externe c’est-à-dire la manière dont ont été gérés les provinces et royaumes vassaux. 

Tout d’abord, il convient de rappeler que Rome est régit par un principe censitaire. En d’autres termes, les droits des citoyens varient en fonction de leur fortune. Ce principe est un principe fondateur de la société romaine dans la mesure où il range les citoyens dans une des cinq classes, la première appartenant aux personnes les plus fortunées. 

A Rome trois institutions régissent la République romaine : les trois assemblées (comices curiates, comices centuriates qui assurent la prépondérance des plus riches, et les comices tributes) ; le Sénat institution très importante car une de ses fonctions est celle de gérer la guerre et la diplomatie mais il assume également le rôle de direction générale des affaires et enfin les collèges de magistrats. Ces derniers, organisés en hiérarchie possèdent des liens étroits avec le Sénat car les sénateurs sont d’anciens magistrats inférieurs et fournissent ensuite les candidats aux magistratures supérieures. 

Outre ces 3 institutions, l’armée romaine constitue également une institution majeure de l’Empire Romain. Cette armée était aussi soumise à un principe hiérarchique, de classe sociale, jusqu’au Ier siècle avant notre ère. En effet, jusque cette période, seuls les citoyens romains les plus aisés étaient recrutés. La structure de l’armée romaine a évolué dans le mesure où au IIème siècle avant notre ère, les fantassins légers étaient encore représentés, mais au Ier siècle avant notre ère, la légion ne comportait que des fantassins lourds (les cavaliers peu nombreux ne possédaient pas un rôle important). L’expansion géographique de Rome nécessitait par conséquent une augmentation des effectifs légionnaires. Pour ce faire, Rome s’appuya sur ses alliés italiens mais aussi par les royaumes clients de l’Orient qui ont fournit des hommes à l’armée romaine. 

Les territoires extra-italiens, une fois conquis par les imperatores, deviennent des provinces de la cité romaine, confiées à des prêteurs. Ces provinces sont également soumises au principe censitaire qui détermine leur situation par rapport à l’impôt. La provincialisation ne s’est toutefois pas propagée sur tout le territoire de l’Empire Romain dans le mesure où les romains préféraient le système des royaumes clients dits « libres » et donc plus économiques (Grèce, Royaume d’Arménie, Cappadoce, Egypte, …).

Les prêteurs ou gouverneurs de chaque province ont un rôle central et délicat car ils doivent lever les impôts des espaces conquis (dont le quantum diffère en fonction du statut juridique découlant de la conquête de la province), ce qui peut être considéré comme un acte de soumission par les peuples conquis. Mais ils doivent également respecter les privilèges statutaires des diverses communautés répertoriées dans un registre (la formula). 

Rome a, dans le but de renforcer sa stratégie politico-militaire sur l’Italie d’abord et dans des provinces ensuite, mis en place des colonies. Il s’agit d’une part d’une stratégie politique et notamment sociale. Pour faire face à de nombreuses guerres civiles et pour remercier les soldats ayant fait la guerre, Rome a créé des cités ex nihilo en Italie ou dans les provinces conquises. Cette stratégie a permis d’apaiser les tensions sociales en donnant des terres aux plus pauvres mais aussi de fidéliser les vétérans des guerres. Il s’agit ensuite d’une stratégie militaire car les colonies étaient placés sur des territoires de peuples vaincus. Les colonies pouvaient être de deux sortes : des colonies romaines où les colons restaient des citoyens romains et où la cité imitait les institutions romaines, et les colonies latines  dans lesquelles les colons perdaient la citoyenneté romaine et ne gardait que leurs droits civiques. 

Si l’expansion géographique de l’Empire Romain donnait l’impression d’une cité unifiée, il s’avère que les compétitions entre les différents aristocrates romains, dont l’objectif était de suivre les pas d’Alexandre Le Grand, ont joué un rôle non négligeable dans la chute de la République. Les guerres civiles ont été nombreuses entre 49 et 30 avant notre ère mettant en rivalité César et Pompée dont le camp de ce dernier finira par être vaincu. Puis les tensions se sont poursuivies entre les assassins de César (Brutus et Cassius) et ses héritiers (Octave, Lépide et Antoine).

Les héritiers de César ont pu vaincre les républicains Brutus et Cassius qui ont attendu comme Pompée le soutien des royaumes d’Orient. Après une certaine stabilisation, les héritiers de César qui s’étaient partagé l’Empire Romain se sont combattus. Octave a évincé Lépide en 36 avant notre ère, puis Antoine allié et époux de Cléopâtre en dispersant la flotte Egyptienne à Actium en 31 et en entrant à Alexandrie en triomphant en 30 avant notre ère. 

III – Le Principat et la paix romaine, Ier et IIe Siècle après notre ère

Octave-Auguste, fils adoptif de César rejette toute idée de royauté durant son règne et se veut un restaurateur de la République. Il se présente seulement comme le princeps, c’est-à-dire comme le premier des citoyens. Les bases constitutionnelles de son pouvoir s’enracinent dans la tradition républicaine car il détient la puissance des tribuns de la plèbe, ce qui légitime son pouvoir. En outre, l’imperium tiré des proconsuls lui permet de gouverner les provinces.

Le partage de la gestion de l’empire avec le Sénat que souhaite Auguste semble constituer une mise en scène dans la mesure où le Sénat se voit attribuer la gestion des provinces publiques qui sont des provinces anciennes les plus tranquilles (Asie, Afrique et Achaïe) tandis qu’Auguste va administrer les provinces impériales qui sont les plis exposées (Gaules, Syrie) et dont la grande majorité des légions s’y trouvent. Toutefois, cette pratique de partage des pouvoirs avec le Sénat devient un modèle pour les empereurs suivant. Les « bons empereurs » sont ceux qui partagent leur pouvoir avec le Sénat tandis que les « mauvais empereurs » sont ceux qui cherchent à garder leur pouvoir et à imiter les royautés sacralisées d’Orient. 

La pax romana, chère au peuple romain, peut être envisagée sous deux angles. La pax romana vue sous l’angle extérieure et la pax romana vue sous l’angle intérieure à la cité. Dans le premier cas, elle se définit non pas comme la fin des conquêtes romaines mais bien comme la paix apportée par la domination romaine. Ainsi, les conquêtes romaines ne se sont jamais arrêtées alors que l’Empire Romain s’étendait davantage. Si l’expansion romaine fut un désastre lors de la conquête de la Germanie notamment lors de l’épisode de Teutoburg en 9 de notre ère, d’autres conquêtes ont porté leurs fruits.

Ainsi, la conquête de la Bretagne en est un exemple. Même si les romains ont été déçus par la réalité des richesses de cette région, l’annexion de la Bretagne s’étend jusqu’au mur d’Hadrien et de manière épisodique jusqu’au mur d’Antonin. Si l’armée romaine a renoncé à pénétrer au cœur de la Calédonie (Ecosse actuelle) c’est en raison de la force de frappe des Calédoniens d’une part, mais aussi des faibles ressources que constituent ces terres d’autre part. 

La pax romana intérieure est une stratégie politique permettant aux empereurs d’assurer leur pouvoir et donc de prévenir toute révolte ou guerre civile. A cet effet, les empereurs offrent régulièrement aux citoyens romains du blé ainsi que des jeux et des combats de gladiateurs. Environ 40% de romains étaient nourris par l’Etat grâce au blé distribué tous les mois au portique Minucia situé entre le champ de Mars et le Forum. S’agissant des jeux et des combats les ludi, spectacles de pièces de théâtre et de courses de chars donnés en l’honneur des dieux sont organisés par l’empereur et les magistrats, tandis que les munera deviennent à Rome un monopole impérial.

La pax romana intérieure a toutefois été ébranlée dans les provinces romaines, les révoltes ayant été menée par les armées provinciales. En 68-69 de notre ère, l’insurrection contre Néron et sa politique tyrannique a débouché d’une part sur une guerre civile de grande ampleur opposant les armées du Rhin et de l’Orient et d’autre part sur la succession de quatre Empereurs en une année (Galba, Othon, Vitellius et Vespasien). 

Les révoltes provinciales ont été considérées comme un échec affectant la pax romana. Toutefois, les fondements de ces contestations pouvaient avoir plusieurs origines et la pax romana n’étaient donc pas en jeu. C’est pourquoi il faut se montrer prudent quant à cette théorie. Si les révoltes juives pouvaient être comprises comme une haine à l’égard de l’ordre romain, les épisodes qui se sont déroulées en Maurétanie ne semblent pas être du même ordre que ceux qui se sont produits en Judée. La Judée devenue une province sous le règle d’Auguste en 6 de notre ère a semble t-il vécu cet acte comme une ingérence de sa souveraineté, exacerbé par la cohabitation de deux cultes différents et opposés (l’un monothéiste et l’autre polythéiste). 

Pour assurer sa domination et sa puissance, Rome a toujours eu besoin de son armée. Celle-ci a, depuis la République Impériale, évolué dans la mesure où l’armée est devenue une armée professionnelle de 30 légions. Les effectifs de l’armée étaient bien trop nombreuses c’est pourquoi Auguste décida  de libérer la moitié de son armée et de ne garder qu’une 30ène de légions. En outre Auguste mis en place le processus de professionnalisation des légionnaires. Ces derniers restent des citoyens, s’engagent pour vint ou vint-cinq ans et l’Etat leur verse une somme pour leur retraite à la fin du service effectué.

La vaste étendue des terres annexées par Rome nécessitait une nouvelle organisation dans la mise en place des camps des légionnaires. Les camps deviennent permanents et sont bâtis en dur présentant une complexité plus grande qu’auparavant. En outre, les Romains ont mis en place sur les terres annexées des limes désignant un chemin et plus précisément une voie de pénétration dans le domaine militaire. Ces limes prendront à la fin du Ier siècle de notre ère le sens de frontière. Si les limes avaient au début une vocation défensive, il servait aussi à contrôler les flux de populations. 

IV- La gestion de l’Empire romain

Si le mot Empire est synonyme d’autoritarisme, il convient de souligner que l’Empire romain était au contraire décentralisé laissant une autonomie aux cités. Sous le règne d’Auguste, les Romains ont éprouvé le besoin de connaître le monde pour mieux le gouverner et le conquérir. Ainsi, Agrippa, général et corégent d’Auguste semble avoir joué un rôle non négligeable afin de faire un inventaire du monde. La représentation du monde que le peuple romain s’imaginait était biaisée dans la mesure où la taille de la zone méditerranéenne était surestimée par rapport aux autres continents. En tout état de cause, les provinces conquises par l’Empire romain constituait une certaine réussite et notamment s’agissant de la création du réseau des lettres et des voies postales. Le réseau des voies romaines en Italie était très sophistiqué, la voie Appia entre Rome et Capoue est un des exemples les plus célèbres.

C’est Auguste qui mit en place le réseau routier quadrillant systématiquement les provinces de l’Empire. Le but de ce réseau était aussi politique puisqu’il s’agissait de mieux intégrer les territoires provinciaux et mieux maîtriser ces nouveaux espaces. En outre, ce réseau routier va permettre l’organisation de la poste impériale appelée cursus publicus. Inventée par Auguste, elle est réservée aux messagers impériaux et fonctionnaires et permet une correspondance très rapide. Un courrier impérial pouvait parcourir 75 km en une journée grâce au système des relais auberges ou des simples haltes. La conquête des provinces implique logiquement une diffusion du modèle de la cité. Les réseaux cités se composent de colonies romaines au sommet de la hiérarchie des colonies et de colonies pérégrines qui sont les moins favorisées.

Entre les deux les cités libre ou fédérées possèdent certains privilèges garantis par des traités. Avec le temps ces dernières peuvent espérer une promotion au statut latin inspiré des anciennes colonies latines d’Italie. Si les provinces étaient au départ de simples terres conquises par l’Empire romain, on peut constater qu’au fur et à mesure du temps, ces dernières ont plus ou moins intégré la culture romaine au sein de leur culture (cf ci-après partie V), mais elles ont aussi été le foyer de l’intégration des élites romaines.

En effet, à la fin du II ème Siècle de notre ère, on peut constater que les provinciaux représentent la moitié des sénateurs. Toutefois, leur origine n’est pas très diversifiée. Les provinces Narbonnaises, la Bétique et l’Afrique proconsulaire sont les territoires d’où proviennent le plus les sénateurs provinciaux. Ces disparités s’expliquent par le fait que ces territoires sont ceux qui ont le plus adopté la culture latine et possèdent la citoyenneté romaine.

La conséquence de cette l’ouverture des postes de sénateurs aux provinciaux est que certaines familles des ces provinces ont eu accès au sommet de l’Empire. Tel est le cas en 98 de la dynastie des Antonins issue de familles hispano-gauloises. 

V – Les visages de la romanisation, Ier et IIème Siècles de notre ère

La romanisation est un concept usité pour évoquer l’expansion de l’Empire Romain en Occident et en Orient. Toutefois, ce concept ne fait pas consensus chez les historiens car il n’est pas certain que les Romains ont cherché à Romaniser les territoires conquis et annexés et il n’est pas non plus certains que les peuples des territoires conquis aient été conscients de l’être. En outre, la diversité des situations ne permet pas une généralisation de ce concept. 

Il semble difficile de parler de romanisation dans la mesure où les conquêtes romaines n’ont pas eu pour conséquence une diffusion massive du mode de vie romain, de sa culture ou bien même de sa religion. En effet, d’un point de vue économique d’une part, on peut s’apercevoir que même si dans un premier temps, Rome exportait du vin et des objets en céramiques dans les pays conquis, dès le début de l’Empire, ce flux économique s’inversa et Rome devînt une grande importatrice de produits provinciaux. En outre, on constate une diffusion des cultes de certaines provinces car la religion romaine n’était pas hermétique aux autres. C’est ce qu’on peut constater dans la diffusion de la déesse Isis qui s’implanta sur les côtes de la mer Egée avant de gagner l’Italie, l’Afrique et la vallée du Rhône. 

La romanisation doit être définie comme une présence du modèle civique et plus précisément des cités de droit romain ou latin. La diffusion de la citoyenneté romaine en est un corollaire. En outre, la construction de bâtiments romains constitue également un indice pertinent de la romanisation. Ainsi, la construction d’amphithéâtres ou de monuments réservés aux combats de gladiateurs est un indice fort car il met en exergue le rôle identitaire de cette pratique de la culture romaine.

La Gaule et l’Espagne sont les premières à franchir l’étape de la romanisation. Notamment en raison de l’obtention du droit latin à l’ensemble de la province Narbonnaise dès le triumvirat. Si on peut évoquer le terme de romanisation de la Gaule, il faut néanmoins préciser que la romanisation ne s’est pas diffusée de la même manière au Nord et au Sud. Ainsi, l’espace Narbonais au Sud était dirigé par un proconsul nommé par le Sénat et géographiquement proche de l’Italie. Tandis que le Nord était dirigé par un légat désigné par l’empereur. 

Toutefois, si la romanisation a pu s’exprimer en Occident, sa mise en œuvre fut plus difficile en Orient puisqu’elle a été rejetée. En effet, les Grecs considéraient que leur culture était supérieure à celle des romains en raison du prestige de leur passé historique. Face à ce rejet, le droit latin n’est pas implanté en Orient, et les cités de droit romain se limitent à la série de colonies fondées par Auguste situé au nord de la Grèce. Malgré ces réticences, la culture grecque n’a pas été imperméable à la culture romaine car des combats de gladiateurs se déroulaient (dans des théâtres et non dans des amphithéâtres comme à Rome). 

L’Egypte constitue un espace où les communautés ont eu du mal à trouver une certaine entente en raison de la diversité des cultures et ce malgré la conquête de cet espace par l’Empire Romain. Ainsi, les Grecs constituaient une certaine élite et méprisaient les Egyptiens ainsi que les Juifs assimilés aux Egyptiens malgré leur hellénisme. De nombreuses tensions et révoltes ont éclaté entre ces communautés, notamment entre les Grecs et les Juifs à Alexandrie. 

Le modèle urbain du monde romain constitue un idéal de civilisation. Si l’Orient grec était déjà largement urbanisé, l’Occident qui était à des stades de proto-urbanisation s’est inspiré du modèle gréco-romain. Ainsi l’urbanisme romain s’inspire plus ou moins d’un modèle géométrique mais s’attache toutefois au développement de bâtiments à destination des spectacles dont leur signe dans les provinces symbolise la prééminence de la culture romaine. En outre, la domus romaine structurée autour de l’atrium et du péristyle est également un moyen d’exprimer une certaine puissance de la culture romaine.

Car dans la structure même de cet habitat, il s’agit de mettre en avant son pouvoir dans le monde romain. Dans la société romaine, le patronat représente le lien social essentiel permettant aux notables d’asseoir leur pouvoir et leur influence sur la plèbe. Les clients viennent ainsi saluer leur patron dans sa maison tous les matins en procédant à la salutatio.