Un objectif : cartographier le monde musulman au Moyen Age

En 2017, les éditions du CNRS publiaient un atlas historique consacré à l’Océan indien, de l’Antiquité à l’époque moderne. Cinq ans plus tard, un nouvel atlas historique, dans un format semblable au précédent, s’intéresse « aux mondes musulmans » à l’époque médiévale.

Ce bel atlas, en couleur et rassemblant des cartes en grand format, a été rédigé sous la houlette de deux directeurs d’ouvrage et de près d’une soixantaine d’auteurs (professeurs, maitres de conférence, doctorants, étudiants). L’historienne Sylvie Denoix, spécialiste d’histoire urbaine, notamment de la ville du Caire, est la directrice de la « Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée ».  A ses côtés, la céramologue Hélène Renel travaille comme ingénieure d’études au CNRS et est responsable de l’étude des céramiques du port médiéval omanais de Qalhat. Spécialiste de la Syrie et des pourtours de l’Océan indien, elle est l’auteur de l’ensemble des cartes.

Un atlas de référence

Cet atlas rassemble des cartes des cartes urbaines situant les activités édilitaires ou les lieux de dévotion dans différentes métropoles aussi bien que des cartes à petite échelle des réseaux d’échanges transsahariens ou des circulations dans l’Océan indien, toutes ces représentations visuelles de réalités complexes et multiples résultant d’une collaboration exigeante entre une cartographe et de nombreux chercheurs. Complétées par des textes de présentation, enrichies d’extraits de sources et d’illustrations, elles offrent un large panorama de l’histoire, politique et militaire, économique et sociale, religieuses et culturelle, des mondes musulmans médiévaux.

Atlas des mondes musulmans médiévaux, CNRS Editions, 2022, page 8.

Le pluriel mis en avant dans le titre de l’atlas peut surprendre le lecteur. Dès la préface, Hélène Renel, Françoise Micheau et Sylvie Denoix précisent que ce choix permet de souligner que les mondes musulmans « ne sont pas des contrées où toutes les personnes sont musulmanes » (page 8). On retrouve ce choix dans le titre de la revue dirigée par Sylvie Denoix (« Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée »). Très diverses, ces « sociétés à statuts » s’unissent progressivement autour de la langue arabe, sous l’impulsion de l’administration.

L’atlas est divisé en sept chapitres thématiques : les représentations cartographiques, les conquêtes, les villes, les lieux de transmission du savoir (religieux ou profane), les activités puis les réseaux d’échanges, avant de finir par les enjeux géopolitiques.

Parmi les très nombreuses thématiques abordées, plusieurs seront particulièrement utiles aux enseignants de collège et de lycée pour disposer de documents récents de qualité, agrémentés d’une synthèse. De courts extraits de documents textuels et iconographiques sont également lisibles à côté des cartes (un témoignage, une enluminure, une note prise lors d’un voyage, la description d’une ville etc.). Par exemple, la reproduction de l’atlas catalan datant de 1375 permet d’apprécier le regard porté sur l’Islam par Abraham Cresques, un cartographe juif de Palma sur l’île de Majorque, qui représente des territoires allant de l’Empire mongol jusqu’à al-Andalus, en passant par l’Empire du Mali et le royaume de Saba. La carte de l’expansion islamique de l’an 630 à 750 (pages 55-56) pourra être utile en classe de cinquième.

En classe de Seconde, l’article d’Annliese Nef et d’Emmanuel Tixier du Mesnil sur la « Reconquista » (page 78-79) peut permettre de construire une séance en mettant en perspective les conquêtes dans la péninsule ibériques avec celles en Sicile.

A partir du XIe siècle, on assista à une expansion démographique, économique et militaire de l’Occident latin en Méditerranée, au détriment des pays d’Islam et de Byzance qui la dominaient jusqu’alors. Ce phénomène toucha principalement la péninsule arabique, la Sicile et la Syrie-Palestine, théâtre des croisades.

Dans la péninsule ibérique, les royaumes de Castille-Leon et d’Aragon se lancèrent dans la conquête des riches terres islamiques d’al-Andalus à la faveur de l’effondrement du califat de Cordoue en 1031.

En 1085, Alphonse VI de Castille réussit à prendre Tolède et seule l’arrivée des Berbères almoravides en provenance du Maghreb permit d’endiguer provisoirement l’offensive chrétienne, avant qu’elle ne reprenne dans les années 1120. Les Berbères almohades restaurèrent un temps la puissance d’al-Andalus, mais leur défaite à Las Navas de Tolosa en 1212 entraina la chute des principales villes d’al-Andalus : Cordoue en 1236, Séville en 1248. Ne subsista plus des territoires de l’Islam que le royaume de Grenade/Malaga, entre les mains de la dynastie nasride qui le conserva jusqu’en 1492. Sa conquête par les Rois catholiques marque la fin d’al-Andalus.

Atlas des mondes musulmans médiévaux, CNRS Editions, 2022, page 78.

Source : Extrait tiré de « l’Atlas des mondes musulmans médiévaux » publié chez CNRS Editions, 2022, pages 26-27

Dès la préface, l’objectif de cet atlas était clair : « offrir un large panorama de l’histoire, politique et militaire, économique et sociale, religieuse et culturelle, des mondes musulmans médiévaux, de l’Antiquité tardive aux débuts de l’époque moderne » (page 8). Avec près de 200 cartes en couleur et de courts textes organisés de façon chrono-thématique, le pari est tenu haut la main. De l’Inde au Maghreb, en passant par le monde iranien, la Syrie, la Sicile, l’Asie centrale, la péninsule ibérique et l’Egypte, cet atlas est une source inégalable sur l’islam médiéval.

Cet ouvrage deviendra rapidement un usuel incontournable pour les étudiants et les professeurs qui doivent aborder et enseigner les premières conquêtes depuis la péninsule arabique, les croisades, l’organisation d’al-Andalus, les routes de la soie ou le commerce transsaharien.

Pour aller plus loin :

  • Présentation de l’éditeur -> Lien

Antoine BARONNET @ Clionautes