2013, année du CAPES !
Pas moins de deux concours pour la même année ! Entre le concours normal écrits en novembre 2012, oral en juin 2013 et le concours Bis écrits en juin 2013, oral en juin 2014, 1430 postes !!! Une manne pour les candidats dont les chances de décrocher le concours sont renforcées par le fait que les thèmatiques soient maintenues pour les trois sessions (les deux de 2013 et celle de 2014 écrits en mars 2014, oral en juin 2014).
Aussi les manuels pullulent Sedes, Ellipses, Dunod et Bréal qui a sorti trois manuels différents ! quelques-uns ont été chroniqués par nos soins. Celui rédigé par le président du jury du CAPES externe, Laurent Carroué et par Didier Collet, professeur en CPGE au lycée Henri IV manquait à notre collection. L’analyse variée du panel d’ouvrages disponibles peut permettre de guider les candidats dans leur choix d’un manuel de référence sur cette nouvelle question au concours. Le fait que cette thématique n’ait pas encore fait l’objet d’un sujet de dissertation lors de la session Capes 2013 normal renforce la pertinence pour les candidats de travailler cette question très sérieusement.
La formule « Manuel » de ce type d’ouvrage, qui vise à apporter aux candidats un maximum de connaissances en un minimum de pages, rend souvent la lecture fastidieuse pour quelqu’un qui n’est pas dans l’urgence du concours. Aussi, une approche problématisée de la question est particulièrement appréciée car elle offre des clés de lecture essentielles pour comprendre la question mise au concours. Cette problématisation est d’ailleurs essentielle pour qui veut ensuite pouvoir construire un devoir, lui même, problématisé et argumenté. Le titre de l’ouvrage de Laurent Carroué et de Didier Collet laisse présager une lecture dynamique de la question au programme grâce au sous-titre qui accompagne l’intitulé classique de la question : Un Ancien Nouveau Monde. L’introduction de l’ouvrage revient sur la genèse de la géographie continentale pratiquée par l’école française de géographie (géographie régionale monde). Elle légitime le choix de la question à un concours de l’enseignement par la volonté de « décentrer les champs d’études pour éviter tout européanocentrisme en ouvrant à la diversité du monde, valoriser les jeux et emboitements d’échelles à partir d’une logique continentale, doter les enseignants d’une vaste culture un peu approfondie sur un espace et une civilisation a priori peu ou mal connus… » On regrettera que les auteurs ne s’appesantissent pas plus en introduction sur l’intitulé du sous-titre qu’ils ont choisi à leur ouvrage. Un court paragraphe rappelle que ce Nouveau Monde n’en est plus un en raison des dynamiques en oeuvre (tant sur le plan migratoire Sud – Nord qu’en terme de durabilité de son modèle économique). Le plan de l’ouvrage reflète l’approche géohistorique retenue. Ce parti pris historique transparaît dans le plan, même si le texte a toujours le souci de spatialiser les phénomènes historiques. Cela donne toutefois une organisation assez déroutante à première vue. Le premier chapitre plante le décor et y fait évoluer les peuples qui viennent s’y installer. Cette approche historique se retrouve dans le chapitre 2 qui traite de l’histoire de l’Amérique du Nord du XVIIIème siècle au XXème siècle. Ce n’est finalement qu’à partir du troisième chapitre que l’approche géographique, proprement dite, de cet espace apparaît autour de la question des sociétés et de leurs mobilités avant que l’organisation économique de l’ensemble régional soit présentée. L’ouvrage se clôt sur trois chapitres, chacun consacrée à un des trois Etats de l’Amérique du Nord. Les bases de l’hegemon des Etats-Unis sont examinées afin d’en souligner les limites de leurs traductions spatiales à l’échelle intraétatique. L’organisation spatiale régionale du Canada et du Mexique est bien montrée cartes de synthèse à l’appui. De quoi donner des idées aux candidats pour la mise en oeuvre cartographique de leur copie. Les auteurs légitiment leur plan de rédaction de l’ouvrage par le fait que la conquête de ces territoires a été longue et a marqué pendant longtemps l’organisation régionale des Etats. Même si « ces dernières décennies, les dynamiques nationales endogènes et les progrès de l’intégration continentale ont débouché ou renforcé un processus de rééquilibrage démographique et économique des structures territoriales au profit globalement des Hinterlands et des périphéries. »
L’ensemble s’accompagne d’une bibliographie francophone rapidement commentée où sont présentées des ouvrages généraux et des revues plus spécialisées de géographie. La liste est courte afin de ne pas perdre le candidat dans des bibliographies fleuves comme en présente un ouvrage du panel testé. Le recours aux nouvelles technologies a toute sa place aussi. Cet ouvrage papier s’accompagne de bonus. La couverture de l’ouvrage annonce pas moins de 95 graphiques ou documents téléchargeables, en accès gratuit (!!!) sur le site de l’éditeur. De quoi réjouir les candidats comme les enseignants du secondaire soucieux de préparer leurs cours de 4ème ou de terminale L/ES ! Las, l’accès au site n’est pas simple. Il faut s’inscrire et une fois votre inscription faite, l’accès aux documents demeure compliqué. Sans l’ouvrage sous la main et parallèlement à une lecture attentive, vous pourrez télécharger des fichiers excel de données comportant des statistiques et des graphiques. Des fonds de carte de l’Amérique du Nord sont mis à disposition. Beaucoup de choses sont offertes mais ce foisonnement est contraignant. On s’y perd, d’autant plus que l’ouvrage papier est copieusement illustré : cartes, tableaux statistiques, extraits de textes tirés d’ouvrages qui ont fait date sur la question. La formule numérique apparait redondante quand on retrouve dans les fichiers téléchargés des documents reproduits dans l’ouvrage. Elle n’est finalement valable que pour les documents inédits.
Au banc d’essai des manuels du CAPES, à la manière de la revue de l’association de consommateurs « Que choisir ? », il semble que les éléments relevés plus haut font pencher la balance pour cet objet éditorial dont on complètera, avec profit, la lecture avec l’ouvrage d’entrée dans la question d’Alexandra Monot.
Catherine Didier-Fèvre ©Les Clionautes