Dans ce nouveau hors-série, les Dossiers d’archéologie s’intéressent au mégalithisme breton.

Jean Guilaine (« Mégalithismes entre Atlantique et Méditerranée ») débute ce numéro par un large propos liminaire faisant une mise au point sur le phénomène mégalithique « entre Atlantique et Méditerranée ». L’historien écrit (p.5) que « l’usage de la roche imputrescible est un moyen d’intégrer l’individu dans un système de pensée, une culture. Les mégalithismes, quelles qu’en soient les expressions, sont des procédés liés au fonctionnement social ». C’est au Ve millénaire avant notre ère qu’à l’ouest du continent européen vont être érigées de premières pierres. C’est également très tôt, en Europe occidentale, que va se manifester une tendance à l’anthropomorphisation des pierres levées (l’auteur écrit, page huit, que « le stade le plus élaboré de ces pierres dressées est représenté par d’authentiques statues-menhirs dont on connaît diverses « écoles » réparties en plusieurs points du continent européen : Crimée, Bas-Danube, Trentin, secteur Sion-Aoste, Lunigiana, Sardaigne, Extrémadure, Sud de la France »). Enfin, Jean Guilaine précise que c’est aux derniers siècles du Ve millénaire avant notre ère que les premières tombes mégalithiques sont réalisées dans la sphère atlantique et qu’il existe des monuments mégalithiques à vocation exclusivement cultuelle, à l’instar des « temples de l’archipel maltais au cœur de la Méditerranée (p.11) ».

Christine Boujot (« Les mégalithes bretons ») rappelle que les monuments mégalithiques sont conçus « pour être vus » et qu’ils participent « de véritables architectures (p.13) ». L’autrice évoque ensuite les avancées de la recherche, notamment en matière de construction, d’organisation et d’évolution des sites mégalithiques de Bretagne.

Un portfolio suit (p.18-25) qui présente quelques-uns des mégalithes de la région bretonne comme l’extraordinaire cairn de Barnenez, l’allée couverte de Mougau-Bihan ou le menhir christianisé de Pleumeur-Bodou.

Une série de contributions est ensuite consacrée à Carnac. Un article de Emmanuelle Vigier (« Deux siècles de recherches dans la région de Carnac ») évoque les premières fouilles sur le site (elles ne débutent véritablement qu’en 1877-1878 sous la responsabilité de l’écossais James Miln) et le personnage de Zacharie le Rouzic, « l’homme aux 130 mégalithes ». Christine Boujot et Serge Cassen (« Le phénomène carnacois ») mentionnent que le site de Carnac est classé Monument historique en 1889 et que, tout au long de son histoire, il a connu différentes phases de remaniements. Les deux auteurs présentent ensuite les différents éléments qui composent le site (stèle, barre de stèles, enceinte de stèles, tombe à couloir, tertre…). Emmanuelle Vigier (« Objets de pouvoir, objets sacrés dans la région de Carnac ») se penche sur les artefacts mis au jour dans la région de Carnac. Elle écrit que les découvertes effectuées à Carnac « ont un retentissement tel qu’elles inspirent à John Lubbock en 1865 le terme de Néolithique, en référence au poli éclatant de ces objets hors du commun (p.39) ». Sont présentés, entre autres, les superbes haches en jade alpin du tumulus Saint-Michel et des anneaux-disques comme l’anneau à couronne du Musée de la Préhistoire de Carnac (p.41).

Jean-Yves Tinévez (« Croaz Dom Herry. Un cairn inédit au centre de la Bretagne ») recense la mise au jour, en 2005, d’un cairn inédit, datant du Néolithique moyen. Localisé en Centre-Bretagne, le cairn comportait quatre chambres funéraires et il a livré quelques éléments de mobiliers, comme des micro-perles en chloritoschiste et un vase à fond rond.

Michel Le Goffic (« La pointe du Souc’h. Une nécropole mégalithique ») évoque les fouilles du cairn de la pointe du Souc’h réalisées à Plouhinec dans le Finistère et Stéphan Hinguant et Christine Boujot (« Les menhirs de Kerdruellan à Belz ») mentionnent la mise au jour en 2006, au lieu-dit Kerdruellan à Belz dans le Morbihan, d’une soixantaine de blocs de monolithes, « ultimes vestiges d’un ensemble de pierres autrefois dressées (p.52) ».

Serge Cassen (« Grand Menhir, Er Grah et table des Marchands. L’ensemble de Locmariaquer ») présente les trois monuments mégalithiques « emblématiques de la Bretagne », situés à Locmariaquer, que sont le Grand Menhir brisé (le monument avait une longueur de 20,2 m et un poids pouvant être estimé à 300 tonnes !), le tumulus d’Er Grah (monument long de 140 mètres) et la Table des Marchands (érigé entre 4900 et 4700 avant notre ère, le monument comporte des gravures, dont une hache emmanchée, des parties d’un quadrupède et des « crosses », c’est à dire des signes droits aux extrémités recourbées).

Serge Cassen et Valentin Grimaud (« Les représentations symboliques néolithiques à travers la gravure sur pierre ») s’intéressent ensuite aux symboles gravés sur les mégalithes de l’Ouest de la France. Ils évoquent le renouvellement de la méthodologie liée à cette problématique. Les deux auteurs indiquent que l’on envisage de saisir les différents éléments gravés dans la pierre (objets, animaux, dessins) « avant tout comme des figures symboliques, images, métaphores, portant une représentation du monde d’autrefois. Tout en veillant à souligner, dans le même temps, la variété des contextes dans lesquels ils s’affichent, que la scène soit exposée en public, ou confinée dans une tombe (p.61) ».

Enfin, un dernier article des mêmes auteurs (« Signes et nuages dans le cairn de Gavrinis ») s’intéresse aux éléments gravés du cairn de Gavrinis, l’étendue des gravures occupant près de 50 m² de parois, ensemble « unique dans le Néolithique européen (p.69) ».

Un numéro qui pourra être utilisé avec beaucoup de profit dans le cadre d’une séquence consacrée à la Préhistoire.

Grégoire Masson

Vue extérieure du cairn de Gavrinis