Jean-Michel Zakhartchouk est enseignant et formateur, collaborateur régulier des « Cahiers pédagogiques », et il a aussi participé à l’élaboration des nouveaux programmes dans le cadre du socle commun. Auteur de nombreux ouvrages, il a notamment publié « Réussir ses premiers cours » et, plus récemment, « Apprendre à apprendre ». L’ouvrage qu’il propose aujourd’hui concerne toutes les disciplines et tous les niveaux et se focalise sur ce point redoutable, et pourtant parfois négligé, des consignes.

Des consignes, hier comme aujourd’hui

Donner des consignes est une activité récurrente de la part d’un professeur et il est donc nécessaire de s’y arrêter. Ce sujet d’étude n’est pas nouveau pour l’auteur car comme il le rappelle, il a écrit un premier livre sur ce sujet il y a presque trente ans ! Mais, depuis, il y a eu d’autres publications et lui-même a d’ailleurs contribué à alimenter la question, par exemple en 1999. Jean-Michel Zakhartchouk rappelle aussi l’importance des travaux de Vygotski sur un tel sujet. Il a également le souci de proposer des retours d’expériences très utiles et de s’appuyer sur son vécu.

Théorie et pratiques

Le livre est structuré en deux grandes parties, avec de la théorie pour un tiers et des activités pour les deux tiers restants. Dans la première partie théorique, la mise en forme est habile car des liens sont créés avec des exemples d’activités de la deuxième partie, ce qui fait que l’on peut aller rapidement de la théorie à la pratique sur un aspect précis. Dans la première partie, on trouve également d’utiles résumés sous forme de texte en rouge qui rappellent l’essentiel d’une partie de raisonnement. Pour chaque activité proposée dans la seconde partie, on trouve l’énoncé puis un commentaire sur la consigne. Il ne s’agit pourtant pas d’un simple listing car à chaque fois les exercices proposés sont resitués dans un cadre global comme « reconnaître les textes de consigne » ou «  utiliser des formes ludiques ».

Théorie de la consigne

Cette première partie propose une approche en dix sous-parties progressives, et tout d’abord la redoutable question de savoir « comment rédiger des consignes ? ». Parmi les écueils à éviter, il y a la question de l’implicite ou alors des fausses consignes qui mènent à de « fausses découvertes ». L’auteur prend bien le temps de souligner que la consigne parfaite n’existe pas et que la concision n’est pas forcément gage de réussite, ou d’échec ! Parmi les autres pierres d’achoppement relevées, se trouve la redoutable question de la polysémie des mots ou encore celle des verbes utilisés dans les consignes. De façon très pratique, on trouve un tableau avec plus d’une vingtaine de verbes de consignes usuels avec des propositions de clarification du sens de chacun.

Consigne et projet scolaire de formation

A plusieurs reprises dans l’ouvrage, on retrouve la patte de ce professeur formateur qu’est Jean-Michel Zakhartchouk. Il dit que « le but d’un travail scolaire n’est pas toujours la réussite immédiate, mais bien plutôt sa contribution à un apprentissage sur le long terme ». De même, au-delà de l’utilisation du bon verbe de consigne, le plus important est de savoir quelle est la démarche que l’on souhaite que l’élève mène. L’auteur propose dans le même esprit de travailler sur les consignes avec les élèves afin de former des « élèves stratèges ». Il souligne la nécessité de leur faire énoncer le chemin suivi pour réussir tel ou tel exercice.

Consignes et adaptation

Une dizaine de pages théoriques est consacrée à cet aspect qui regroupe plusieurs aspects. Tout d’abord, et sans en faire un absolu, l’auteur rappelle la nécessité de tenir compte des façons d’apprendre des élèves, ne serait-ce qu’à travers le prisme des visuels et des auditifs. Cela doit inciter le professeur à ne pas toujours faire pareil et, à cet égard, il propose une liste de styles personnels d’apprentissage des élèves. L’enseignant doit aussi être vigilant sur le moment où il passe ses consignes s’il veut être sûr de leur bonne réception.

Du côté des pratiques

Les bonnes pratiques théoriques ayant été énoncées, ainsi que les pièges possibles, les deux tiers de l’ouvrage proposent des exemples concrets d’activités pour tous les niveaux et toutes les matières. Chaque professeur ira sans doute plus naturellement vers sa matière, mais il y a vraiment de quoi apprendre et faire réfléchir dans chaque cas cité. Pour l’histoire-géographie, on peut mentionner cette activité très utile, constructive, et parfois déstabilisante, quand on demande aux élèves d’inventer des questions pour réviser une leçon et préparer un contrôle. Une autre piste féconde est celle proposée page 65 où il s’agit de partir d’un corrigé pour évaluer la pertinence de telle ou telle réponse fournie par les élèves.

Trouver des réponses originales

En une dizaine de pages, qui forment comme une sous partie de la deuxième, l’auteur choisit d’aller plus loin, maintenant que l’on a été familiarisé à la théorie et à des exemples pratiques. Une page est spécifiquement consacrée au récit d’un projet sur la bonne compréhension des consignes, travaillé lors d’un PPRE avec trois élèves. L’auteur aborde pour conclure la question du numérique et propose quelques situations pédagogiques qui relient numérique et consignes. Pour ne pas céder à une approche trop techniciste du savoir, Jean-Michel Zakhartchouk choisit de conclure son ouvrage par un tour d’horizon de réponses à des objections entendues tout au long des années à propos du travail mené sur les consignes. Dans ce florilège, on trouvera « on va mâcher le travail aux élèves » ou encore « avant de parler de lecture des consignes, il faudrait d’abord qu’ils apprennent à lire ». L’auteur propose pour chacune de ces phrases une réponse argumentée en regard.

Cet ouvrage se révèle donc très utile et très éclairant. Mêlant théorie et pratiques, il contribuera très utilement à la formation des jeunes professeurs ou à l’actualisation des connaissances des plus chevronnés. Un ouvrage à lire, à souligner et à expérimenter !

© Jean-Pierre Costille pour les Clionautes