L’ouvrage est d’abord une mise en garde contres les pratiques des régimes totalitaires et sur les possibilités de les refuser et d’y résister.
Timothy Snyder dénonce plusieurs pratiques des régimes totalitaires : les élections truquées, l’emploi de milices privées comme les SA et les SS, la violation de L’Etat de Droit, l’abolition de toute règle au nom de l’état d’exception, l’utilisation de la police dans des buts exterminateurs, aussi bien par le KGB que par les Nazis, l’utilisation d’une propagande et d’une politique qui exclut et « bestialise » les futures victimes ( koulaks , juifs), l’absence de séparation entre vie publique et vie privée.
Timothy Snyder n’exonère pas ceux qui ont soutenu le régime par consentement à l’autorité (il se réfère à la célèbre expérience de Milgram) ou par fanatisme, mais il critique aussi les spectateurs passifs des humiliations infligées aux Juifs autrichiens après l’ Anschluss, ceux qui ont pensé que des accommodements partiels étaient possibles avec les régimes ou ceux qui se sont repliés sur leur vie privée.
L’auteur évoque les moyens de résister à l’emprise totalitaire : savoir s’opposer aux courants dominants comme l’ont fait Churchill ou ceux qui ont sauvé des Juifs, faire respecter l’Etat de Droit, développer la solidarité, acheter des journaux payants qui réalisent des enquêtes approfondies, voyager à l’étranger.
Timothy Snyder exalte ce que la démocratie américaine a de meilleur : la vigilance civique («la vigilance éternelle est le prix de la liberté » disait l’abolitionniste Wendell Philliips), le patriotisme et non le nationalisme. L’ouvrage est ainsi une attaque contre Trump et ses soutiens. Timothy Snyder dénonce la manière dont Trump a attaqué Hilary Clinton, la manipulation du langage, l’utilisation de contrevérités et de fausses nouvelles, le fait que la parole présidentielle prime sur la vérité.
Il se réfère à la manière dont le linguiste Viktor Klemperer analysait la manipulation du langage par les nazis. Il ne ménage pas non plus Poutine accusé d’entretenir un état d’exception permanent au nom de la lutte contre la menace terroriste, comme l’avaient fait les Nazis au moment de l’incendie du Reichstag. En fin de compte Timothy Snyder revient sur ce qu’il considère comme deux grandes erreurs de lecture de l’histoire : le principe de l’inévitabilité ( après la chute de l’URSS, la mondialisation et la démocratisation apparaissaient comme le seul avenir possible, ce qui provoqua un désintérêt pour la construction de l’avenir), et la politique de l’éternité qui évoque un passé fantasmé (« Make America great again ») auquel il est impossible de revenir. Il plaide en définitive pour une meilleure connaissance de l’histoire qui permet de construire lucidement l’avenir.