Quentin Gassiat, diplômé de Science Po en droit de l’innovation, mène depuis 2015 de multiples projets autour du Street Art et de ceux qui lui donnent chair. Son Dico de l’art urbain s’inscrit dans cette démarche en proposant la somme des connaissances actuelles autour de cet art urbain qu’il définit lui-même comme étant une » Notion protéiforme, ce qui le rend presque indéfinissable « . Ne se réduisant donc pas uniquement aux tags et aux peintures murales, les collages et les sculptures comme celles que Lor-K conçues à partir des encombrants trouvent leur place dans ce dictionnaire unique.
C’est à la lecture de l’index que se mesurent à la fois la richesse du contenu et l’intelligence tant de la démarche que de la structure même du Dico.
Divisé en 8 rubriques – autres pratiques urbaines / concepts urbains / géographie / histoire & culture / outils / pratiques & techniques / univers graffiti / writing styles -, les renvois sont nombreux et démultiplient à la fois les entrées et les références. Ainsi, l’article Border Art figure dans la rubrique » Pratiques & techniques « , sa définition est accompagnée de trois exemples richement développés permettant à la fois contextualisation et appropriation des termes : » Barrière de séparation israélo-palestinienne » où le travail de Bansky est explicité, » Frontière États-Unis – Mexique » et la définition proposée fait du » Mur de Berlin » le premier espace de création du Border Art.
Le Dico de l’art urbain, au-delà d’ouvrir à ce qui est attendu – un terme, une définition – est à lui seul un véritable circuit de découvertes telles des marches exploratoires non pas à la recherche des murs, mais des mots et des histoires qui leur sont associés. De » adbusting » (peindre sur une affiche publicitaire) à » tape art » (œuvre d’art éphémère réalisée à l’aide de ruban adhésif) en passant par » clipped » (débordement d’une image sur une autre) ou » Nogga » (atelier fondé en 1974 pour apprendre aux jeunes comment peindre), ce dictionnaire permet de comprendre toute l’immensité des pratiques et des techniques.
Ce parcours retrace aussi l’historique et les difficultés que rencontrent encore aujourd’hui les artistes, les talents et les richesses d’un milieu souvent réduit à la clandestinité.
Deux cahiers de cinquante photographies en couleur donnent corps au vocabulaire de cet art des rues, d’une œuvre de Temgo photographiée à Paris sur la Butte-aux-cailles en 2023 à un cholo wrinting – » inscription propre aux gangs de Los Angeles (…) qui sont le témoignage graphique d’une guerre de territoire » – de Chaz Bojorquez repéré en 1975 aux États-Unis et devant lequel pose le graffeur.
Des propos d’artistes que Quentin Gassiat a rencontré apportent un éclairage indispensable à cette somme. Un ouvrage dense et protéiforme à l’image de cet art.