L’ouvrage est le fruit d’un travail collectif de la Sofphied, la Société francophone de Philosophie de l’éducation. Ce ne sont pas moins de 53 contributeurs qui ont réalisé ce livre de synthèse qui compte une centaine de notions. Chacun des auteurs est présenté à la fin avec la référence des articles écrits. A la fin de chaque article se trouve une rapide bibliographie pour aller plus loin.

Une approche en trois temps qui se complètent

Ce livre est pensé comme un réseau de notions-boussoles. Il est structuré en trois entrées : les notions socles, les grands problèmes et les questions vives. Les notions socles servent d’appui à la pensée éducative. Il peut s’agir de notions spécifiques du lexique de la philosophie de l’éducation comme « former » ou bien de notions philosophiques essentielles vues selon l’angle des problématiques éducatives comme « violence ». L’entrée grands problèmes aborde les problématiques récurrentes en éducation. Ces deux premières parties s’inscrivent dans un temps long. Les questions vives sont elles davantage liées à une certaine forme d’actualité. Cette approche fait qu’on peut lire l’ouvrage dans l’ordre que l’on veut. 

Concepts clés et notions socles

Parmi les notions abordées, on peut signaler l’autorité. C’est une notion très discutée qui ne se confond pas avec le pouvoir. C’est une relation de médiation proposée par un individu à un autre qui en reconnaît la légitimité. Le désir est devenu essentiel à partir du moment où on a une éducation justement moins basée sur l’autorité de l’éducateur que sur le désir d’apprendre. En abordant le mot « droits » c’est l’occasion de rappeler que depuis la loi de 1989 est affirmé le principe de l’élève au centre du système éducatif. Les auteurs proposent une entrée « école » en précisant qu’elle ne peut être réduite à un simple outil de formation. Parmi les autres points de référence à connaître, les réflexions de Condorcet autour de l’idée d’instruction. Chacun naviguera selon ses centres d’intérêt qui le porteront peut-être sur l’entrée « jeu », «  savoir » ou encore « transmission ». A ce sujet, une des dernières entrées s’arrête sur le mot « valeurs »  : la valeur se s’impose pas, elle se propose. Il n’y a pas de transmission de valeurs sans une forme d’exemplarité. 

Grands problèmes

Une entrée est consacrée à la formation de l’attention qui est devenue un problème central. Il y a aussi la question de l’autonomie et «  on ne devient pas tout seul une personne autonome. L’autonomie a besoin d’action pédagogique pour devenir une réalité personnelle ». Les auteurs s’interrogent également sur la co-éducation et ses difficultés dans un pays où l’école républicaine s’est construite, en partie, contre l’éducation familiale. Ils se penchent également sur la coopération, sur l’éducabilité, qui est un terme plutôt récent. L’ouvrage envisage aussi le dyptique égalité-équité, l’enseignement du fait religieux ou la forme scolaire. Les auteurs soulignent l’importance de la problématisation ou encore s’interrogent sur la sanction. 

Questions vives 

La partie commence par une approche de l’accompagnement puis de la bienveillance ou encore du care. Sur la bienveillance, il faut bien comprendre que celle-ci « n’est ni complaisance, ni laisser-faire, ni passionnelle, ni pulsionnelle… ». Les auteurs se penchent sur la notion de capabilité : je peux, je peux dire, je peux faire, je peux raconter et me raconter. Parmi les tendances récentes on relèvera la tendance à « éduquer à »  avec de multiples déclinaisons derrière ce « à ». S’agit-il d’une formation libérale de la Raison ou d’une adaptation fonctionnelle à une société ? L’esprit critique fait également l’objet d’une notice avec le risque d’un enseignement trop formel pour être véritablement utile. Les préoccupations récentes sont bien abordées avec l’entrée « inclusion » par exemple ou encore la « neuro-éducation ». Ce qui est clairement affirmé c’est que «  l’éducation ne peut être affaire de science   seulement ! ». On citera également comme notions abordées l’idée de philosophie pour et avec les enfants, la reconnaissance ou encore la vie scolaire.

C’est donc un ouvrage très complet qui propose une réflexion sur des notions essentielles. Cela permet, sur des thèmes maniés parfois quotidiennement, de reprendre un peu de hauteur de vue. Les auteurs soulignent le côté ouvert de l’ouvrage qui ne demande qu’à s’enrichir d’autres entrées. 

Jean-Pierre Costille