Longtemps, l’écrit domina dans le système scolaire. C’est encore le cas mais l’oral connait depuis quelques années un retour en grâce avec par exemple les programmes de collège de 2015 ou l’introduction du Grand oral, un retour en grâce. L’opposition entre écrit et oral doit laisser place à l’idée d’un continuum qui opère des transferts de l’un à l’autre. Ce livre de Gwenaëlle Chambonnière, professeure de lettres modernes et formatrice, entend apporter des éclairages à la fois théoriques et pratiques. A chaque fin de chapitre, on trouve un «  en résumé » pour rassembler les idées développées.

L’oral : histoire, tensions et enjeux d’un enseignement

L’autrice retrace brièvement l’histoire de l’oral dans l’enseignement et on constate que dès 1945 il est considéré comme un outil pour travailler la communication et l’observation de la langue. Ce n’est qu’en 1972 qu’il apparait dans les programmes. Depuis 2019, une épreuve de Grand oral a été inscrite au baccalauréat. Le paradoxe de l’oral c’est qu’il est partout dans la classe mais comment en faire un objet d’apprentissage. Gwenaëlle Chambonnière souligne que l’oral est vécu par l’élève comme une prise de risque et est un facteur d’inégalités scolaires.

Penser l’oral dans la classe

Il faut connaître les obstacles, les conditions et les leviers possibles et en enseigner les usages. Le chapitre propose notamment un tableau qui recense pour chaque type de discours quelques actes langagiers associés. Ainsi le discours peut être narratif et implique donc de rapporter des paroles, préciser des circonstances. On mesure aussi la polysémie des verbes de consignes, comme « décrire » selon les matières. On peut instituer un oral réflexif comme un rituel, une sorte de bilan de savoir. On apprécie les conseils pratiques donnés pour favoriser la prise de parole chez les élèves comme le pense-paire-partage.

Connaitre et enseigner les usages de l’oral pour développer l’expression des élèves

L’oral est encore trop souvent considéré comme un usage incorrect de la langue. Il faut reconnaître que les recommandations officielles donnent peu d’outils pour éclairer les enseignants. Il convient de montrer aux élèves les spécificités de l’écrit.

Corps, gestes, voix, regard : des dimensions essentielles de l’oral

Pour l’autrice, on peut passer par des exercices pour développer les aptitudes des élèves. Elle propose notamment une approche sur la voix qui n’est pas uniquement un outil mais est aussi productrice de sens quand on en maitrise les techniques. On peut apprendre à lire un texte à voix haute avec expressivité. La question des supports à l’appui d’un oral se pose et on peut progressivement réduire la taille de celui-ci.

Enseigner l’écoute

Parmi les procédures proposées, il y a celle du jeton de parole en sixième. Gwenaëlle Chambonnière aborde également la question de la prise de notes qui traduit la compétence « écouter pour apprendre ». C’est un exercice lourd du point de vue cognitif. Il est utile de réaliser une séance d’entrainement à la prise de notes avec par exemple la comparaison des prises de notes par groupes.

Accueillir et faire vivre la parole des élèves

Les études montrent qu’en classe les garçons participent aux deux tiers des échanges et qu’on leur laisse plus de temps de réflexion qu’aux filles tout en les relançant également davantage. L’heure de vie de classe peut être un moment où se travaille l’oral et de façon générale il faut reconnaitre la parole des élèves dans les instances des établissements.

Enseigner les genres de l’oral

Selon le genre, les réalisations et les attendus diffèrent : il est donc essentiel de préciser les genres de l’oral. Ce classement est difficile car chaque genre pratiqué en dehors de l’univers scolaire est modifié par son intégration dans les pratiques scolaires. Certains distinguent trois genres au sein de l’école : les genres à dominante scolaire comme les échanges, les genres à dominante pédagogique comme le quoi de neuf ? et les genres à dominante disciplinaire comme la dissertation. L’autrice revient ensuite sur le débat et insiste fort à propos sur le fait qu’il faut bien en dessiner les contours. Des exemples par matière sont fournis.

Evaluation et progression des compétences orales

Les enseignants manquent souvent de repères et d’outils pour évaluer l’oral. Pour le Grand oral on peut s’appuyer sur cinq domaines à examiner. Gwenaëlle Chambonnière détaille un exemple de complexification de la sixième à la terminale autour de la compétence qui consiste à participer à des échanges. Le livre fournit aussi des exemples concrets de grille pour évaluer l’oral. Pour l’évaluation entre pairs, il est préférable de répartir les points d’observation entre les évaluateurs.

Le numérique, un outil essentiel de l’enseignement de l’oral.

Le rapport du Cnesco sur « Numérique et apprentissages scolaires » confirme que l’écoute de documents sonores représente un des apports majeurs du numérique. Il est intéressant s’il est pensé au sein d’un scénario pédagogique. Le point essentiel est que le professeur peut mettre à disposition des élèves des fichiers différents que chacun va pouvoir gérer à son rythme. Il faut cependant se méfier du risque de surcharge cognitive lors d’un tel exercice. Le chapitre présente ensuite un certain nombre d’outils ou procédures comme le fait d’extraire la bande son d’une vidéo. Pour les plus ambitieux, on peut aller jusqu’à la pratique de la radio dans le cadre scolaire.

Cet ouvrage de Gwenaëlle Chambonnière propose donc à la fois une réflexion sur l’oral mais aussi des pistes concrètes et progressives. Nul doute qu’il trouvera sa place pour tout enseignant qui souhaite renouveler ses pratiques en lien avec l’oral.

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