Naples, sa vue sur le Vésuve, son palais royal et…sa gestion particulière des biens de la commune. Alors qu’est repensé notre rapport à la propriété, que nos biens se « partagent », l’idée de la commune italienne paraît innovante : un « laboratoire (…) pour une Constituante des biens communs » voit le jour en 2012. Il s’agit d’une collectivité qui a pour mission d’administrer au mieux les biens communs de la commune en impliquant directement les habitants de la cité. Après avoir listé le patrimoine (public et/ou privé) napolitain inutilisé, le laboratoire décide de son avenir. Dans l’article est développé le cas du couvent San Gregorio Armeno qui, classé, est « affecté à des fonctions multiples, d’expérimentation d’une démocratie participative dans le domaine de la culture… » Article : Naples (expérience de bien commun). En bref, une étude de cas décrivant la particularité de l’expérience napolitaine sur le traitement des biens publics et privés !
Les coordinatrices, Marie Cornu, directrice de recherche au CNRS, Judith Rochfeld, enseignante de Droit à la Sorbonne et Fabienne Orsi (qui a déjà écrit sur le sujet dans Le retour des communs, la crise de l’idéologie propriétaire) font appel à de multiples chercheurs en Sciences Humaines et sociales. Ce sont des sociologues, économistes, historiens, géographes, spécialistes en Droit, etc. qui nous offrent cette photographie des relations entre les sociétés contemporaines et leurs possessions. A l’instar de ces scientifiques, les « communs » sont plurielsIntroduction.
Le choix de l’illustration de la couverture avec une photographie des salines de Guérande, est un clin d’œil très probable aux paludiers, qui forts d’une victoire dans les années 1970 face à un vaste projet autoroutier menaçant l’équilibre des salines, décidèrent de gérer, de façon commune, les récoltes.
L’introduction de l’ouvrage, propose une définition de la notion de « communs », des différentes approches possibles ainsi que des notions corollaires. Les temps forts épistémologiques sont présentés, le côté « synoptique » de la notion est à plusieurs reprises souligné. Les enjeux de l’ouvrage sont donc multiples, les questionnements nombreux ; Que sont les « communs » ? Quelles sont leurs relations avec les sphères politiques et citoyennes ? Comment partage-t-on dans les différentes communautés ? Comment se pratique la propriété aujourd’hui ?
Apportant des éléments de définition à de nouveaux objets et notions des SHS comme Wikipédia, Linux, FabLab… ce dictionnaire propose un regard renouvelé sur des thématiques telles que le patrimoine, le bien et ses déclinaisons actuelles, les différentes approches du brevet ou encore les notions de développement soutenable ou d’écocide.
Ce dernier terme, écocide, est structuré ainsi en plusieurs parties :
– Définition et histoire du concept d’écocide : comprenant l’étymologie du terme, un définition, à savoir « il désigne les crimes les plus graves commis contre l’environnement qui (…) porte atteinte à la sûreté de la planète ». Pour l’auteur l’émergence de ce concept s’explique par la recrudescence de « criminalité environnementale » illustrée par les chiffres des différents trafics, du braconnage, voire du pillage de certaines ressources non-renouvelables.
– Approche rétrospective du crime d’écocide. L’écocide : de la science au droit : Cette approche commence en impliquant directement l’agent orange dans l’histoire du terme. La notion d’écocide sera rapproché de celle de crime, et introduite au Droit International (Falk). L’article traite ensuite de l’évolution du terme écocide dans des domaines différents du Droit. L’un des plus de cet ouvrage est les liens que proposent les auteurs, dans cette partie vous pourrez accéder directement sur un document-source extrait du site du tribunal international de la Haye.
– Approche prospective du crime d’écocide. Elever l’écocide au rang des crimes internationaux les plus graves : L’auteur évoque dans cette partie l’écocide en tant que crime, ainsi que la discussion ayant pour objectif de viser sa reconnaissance à l’échelle supranationale. Enfin il propose d’instituer des institutions officielles dévolues à ce sujet en mettant par exemple en place « un Procureur international » dans le cadre d’une cour Pénale Internationale ou encore un « Groupe de recherche et d’enquête pour l’environnement (GREEN) compétent pour constater les crimes environnementaux ». Bref, une synthèse qui propose une critique suggérée et de nombreuses pistes de réflexion.
A titre personnel, j’apprécie beaucoup les dictionnaires de la collection QUADRIGE, et celui-là est intéressant à consulter de façon régulière, particulièrement pour ceux qui souhaitent pratiquer la géographie contemporaine ou renouveler leur vision de la propriété. Le choix de la présentation particulière de l’article écocide repose sur le fait qu’il représente un échantillon intéressant de cet ouvrage. Un seul regret, cependant, j’aurais aimé trouver une entrée Nature qui me semble être un bien commun d’importance.
Les différentes entrées sont donc de remarquables synthèses qui seront utiles autant aux professeurs du secondaire que du supérieur en passant par les étudiants de sciences politiques ou de SHS en général. Très bien structurées et documentées, elle sont toutes conclues par une bibliographie complémentaire sur l’objet en question.