Thierno Kâ retrace l’histoire de la plus prestigieuse école arabo-islamique de Sénégambie, l’école Ndiaye-Ndiaye Wolof et son fondateur Elhadji Mukhrat Touré.

Ce livre, édité par l’Institut fondamental d’Afrique Noire (Ifan), traite de l’enseignement et de la culture arabo-islamique de la Sénégambie de 1890 à 1990. Il est organisé en cinq chapitres et il fait une très large place aux programmes enseignés. Son auteur, Thierno Kâ, est professeur et directeur de recherches des Universités. Il est chercheur à l’Institut Fondamental d’Afrique Noire (IFAN) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) et ancien commissaire général au pèlerinage, il est actuellement le Directeur général de l’Institut Islamique de Dakar (IID).

Grands principes de l’école Ndiaye-Ndiaye Wolof

L’auteur commence par décrire minutieusement la méthode d’enseignement fondée sur la mémorisation : le « hifz ». Il montre comment l’apprentissage lettre par lettre de la sourate « al Fatiya » constitue une méthode d’apprentissage de la lecture.

Il remarque que l’impossibilité pour l’élève de poser des questions peut faire obstacle à l’apprentissage même si les explications données par le maître visent à lui faire acquérir beaucoup de vocabulaire en wolof, la langue de l’enseignement dans cette école.

Le personnage de Cheikh Mukhrat Touré

Le troisième chapitre est consacré à la vie et à l’enseignement de Cheikh Mukhrat Touré quand, au début du XXe siècle il crée son école en pays sérère.

L’emploi du temps

La description est précise et montre deux temps dans l’année.

En saison sèche le matin est plutôt réservé à l’étude du Coran en langue locale, le wolof. Les sciences religieuses et l’arabe occupent les après-midi. Une séance de révisions est prévue chaque jour en soirée et à l’aube. Cet emploi du temps est décliné dans quelques exemples d’écoles à Saint-Louis, Kaolack et Dakar.

En saison des pluies les premières heures du matin sont consacrées au travail des champs et l’école est fermée un mois au plus fort de l’hivernage.

C’est un enseignement qui est lent. La mémorisation du Coran est rarement atteinte avant les 25 ans des élèves et la fin des études se situe vers 32 ans après quoi l’élève peut envisager de se marier eu de fonder, à son tour, une école.

L’auteur aborde brièvement le système économique qui permet l’existence de ces écoles gratuites. Il montre que les élèves étaient incités à choisir l’agriculture comme métier.

Un paragraphe est consacré au matériel du maître et des élèves : la tablette : « alouwâh », effacée quand elle est pleine et la leçon est sue par cœur, l’écritoire : « qalam », l’encre fabriquée par les élèves à partir du noir de fumée récolté sur les marmites ou de la sève rouge extraite de la racine du fuyaar.

Les cours ont lieu sous un arbre ou dans la maison du maître. Chaque semaine l’école vaque 2 jours, du mercredi après la prière de l’après-midi au vendredi après cette même prière. Les fêtes religieuses étaient observées un mois de vacances pour chaque grande fête : Korité1 et Tabaski2.

Les programmes

L’enseignement est d’abord en wolof, l’arabe est enseigné ensuite comme langue du savoir et de la culture.
L’auteur détaille les étapes de l’enseignement du Coran puis des sciences juridiques, le « Tawhid », de l’arable (grammaire et littérature). Pour les élèves les plus avancés il y a aussi la rhétorique, la théologie, le soufisme dans sa version sénégalaise puis les méthodes d’apprentissage et d’enseignement dont l’auteur cite les nombreux ouvrages étudiés.

Ce livre qui n’a ni introduction, ni conclusion, s’il renseigne le lecteur sur ce qu’ont été les écoles coraniques l’auteur n’évoque ni les châtiments corporels ni la mendicité imposée aux jeunes talibés si fréquents aujourd’hui.

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1   Nom donné en Afrique de l’Ouest à l’Aïd al-Fitr, fête de fin de ramadan

2   Nom donné en Afrique de l’Ouest à l’Aïd el-Kebir