Le diamant, produit mondialisé, a donné naissance à la fin du XIXe siècle au district industriel de Saint-Claude

Inspiré, si on en croit la préface de Jean-Claude Daumas, par les recherches de Giacomo Becattini, ou des travaux comme ceux de Pierre Judet  Thomas Figarol s’est intéressé a une activité originale : le travail du diamant, dans un espace montagnard : le Haut-Jura et particulièrement la ville de Saint-Claude entre 1870 et 1914. Ce livre est issu de sa thèse soutenue à l’Université de Franche-Comté en 2015.

S’appuyant sur de nombreuses sources Thomas Figarol propose une étude des réalités techniques, économiques et sociales de l’industrie diamantaire et donne vie aux acteurs, aux entreprises, aux fournisseurs comme aux clients ainsi qu’aux conflits sociaux qui marquent l’époque.

Le monde du diamant et le district industriel de Saint-Claude

Le monde du diamant brut (1870-1914)

Thomas Figarol décrit l’univers mondialisé du diamant à partir de la découverte des gisements sud-africains et l’organisation économique du marché dominé par le Syndicat de Londres et la montée du monopole de la société De Beers dans les années qui précèdent la première guerre mondiale. Le cartel est remis en cause par les intérêts allemands de la colonie du Sud-Ouest Africain.

Le monde du diamant taillé

L’augmentation de la production de diamant brut entraîne le développement de la taille en Europe (Anvers, Amsterdam). L’auteur décrit les opérations techniques pratiquées à Saint-Claude.

Il montre que le contexte de développement de l’industrie diamantaire est très sensible à la conjoncture politique (guerre des Boers) et économique (crise financière de 1907).

L’étude du marché du diamant taillé pour l’industrie de la bijouterie met en évidence la diversité, la spécialisation et la complexité de cette activité.

Articles de Saint-Claude, pipes et pierres précieuses. De la proto-industrialisation au district industriel polyvalent

Partant du concept de district industriel défini par Alfred Marshall, l’auteur présente la situation proto-industrielle du Haut-Jura. Avant même l’arrivée du diamant à Saint-Claude on travaille les pierres fines, la bruyères pour les pipes. La tradition de l’élevage laitier associé, en hiver, à la tournerie du bois a forgé une économie et une société prête à accueillir le travail du diamant. L’organisation du travail s’appuie sur le  « verlagssystem ». Les ouvriers-paysans travaillent en famille pour le compte d’un négociant qui vit au village. A la fin du XIXe siècle les négociants se déplacent vers la ville de Saint-Claude. La description de cette réalité amène Thomas Figarol à discuter le concept de proto-industrie et de district industriel.

Développement industriel et mondialisation : la participation du Haut-Jura à l’expansion du monde du diamant

Naissance et développement de la branche diamantaire du district industriel de Saint-Claude

S’il est difficile d’évaluer quantitativement la production saint-claudienne, l’auteur montre l’ouverture dans les années 1870 des premiers ateliers, l’organisation de la production et le travail des ouvriers.

On assiste à une première phase de croissance (1899-1902) comme avec l’exemple d’Émile Dalloz-Bourguignon ou l’émergence des premières coopératives. La Belle Époque est aussi à Saint-Claude et dans le Haut-Jura une période faste durant laquelle les coopératives prospèrent.

C’est aussi une époque d’évolution technique ou du moins énergétique quand l’électricité remplace la force hydraulique. Les quelques photographies d’usines donnent à voir l’inscription d l’activité du diamant dans le paysage.

La place du district industriel de Saint-Claude dans le monde du diamant

Dans ce chapitre l’auteur prend de la distance pour replacer Saint-Claude à l’échelle européenne de l’industrie diamantaire.

Souplesse de l’organisation et spécialisation dans le façonnage insère le Haut-Jura dans la sous-traitance pour des négociants étrangers notamment de Londres ou d’Amsterdam. Les rapports de domination et d’interdépendance sont analysés grâce aux archives de la coopérative Le Diamant.

L’industrie de Saint-Claude n’est pas sans fragilités : manque de qualité de la taille, rendements médiocres, retard technique.

Les diamantaires du Haut-Jura face à la mondialisation. Entre internationalisme et patriotisme économique

Les acteurs jurassiens de la filière savent que cette activité est mondialisée. Les syndicats acquis à l’internationalisme sont favorables à une régulation à l’échelle internationale comme le montrent les archives de la Chambre syndicale des ouvriers diamantaires fondée en 1884. Son action est renforcée durant la période d’expansion, en 1905/1906 on la voit la défense patriotique de l’industrie de Saint-Claude dans la demande de régulation de l’apprentissage.

Les Haut-Jurassiens sur les marchés diamantaires

La nécessité d’être anglophone.

L’implantation des coopératives d’Avignon et Adamas sur le marché du diamant brut

L’(auteur détaille les pratiques et les acteurs du marché du diamant brut et les évolutions entre 1895 et 1914. Il dresse le portrait de deux hommes : Samuel Vuillet et Albert Waille qui ont joué un rôle essentiel pour leur coopérative en étant chargés de négocier les diamants bruts sur le marché Londonien où existent une communauté haut-jurassienne.

L’implantation sur le(s) marché(s) du diamant taillé

Le chapitre aborde l’écoulement de la production de Saint-Claude ? De véritables stratégies commerciales sont mises en place jusque sur le marché américain.

Comment s’organiser pour vendre, installer un bureau à Paris, à Londres à Amsterdam. Un chapitre où l’on retrouve Samuel Vuillet.

Conclusion

La chaîne de valeur du diamant fait de Saint-Claude, à la fois, un district industriel de montagne et un espace intégré à un marché mondialisé.
Thomas Figarol évoque l’évolution du travail du diamant au XXe siècle, industrie aujourd’hui concurrencée par les ateliers de taille d’Israël, de Palestine ou d’Inde.

A noter l’intérêt des cartes en couleur de l’encart central qui ne sont pas annoncées dans le texte, dommage.