Le premier janvier 1920, le jeune instituteur Célestin Freinet, lourdement blessé au poumon durant la Grande Guerre, s’apprête à rejoindre sa nouvelle affection à Bar-sur-Loup avec une conviction profonde : la civilisation qui a permis les horreurs du conflit doit impérativement et rapidement changer.

Influencé par Adolphe Ferrière et son « école active », Célestin Freinet décide, à la suite d’un congrès de la Ligue internationale pour l’éducation nouvelle, de mettre en place des méthodes pédagogiques d’avant-garde pour les élèves de sa petite classe des Alpes-Maritimes : découverte du territoire par la promenade, achat d’une petite presse pour permettre l’impression des écrits des enfants et travaux de groupes.

Son amitié avec Henri Barbusse lui permet d’écrire dans le journal Clarté, dont l’écrivain est le directeur. Ses propos sont alors remarqués par une jeune artiste et institutrice, Elise Lagier-Bruno, qui deviendra sa femme.

En 1928, Freinet est nommé à Saint-Paul-de-Vence. Il continue à y développer une approche de l’enseignement alternative mais s’attire les foudres de la notabilité locale, notamment du maire de la commune, proche de l’action française. Victime d’une vaste campagne de calomnie lui reprochant notamment ses convictions politiques, Célestin Freinet se voit contraint de quitter son école.

Il décide alors de fonder avec sa femme une école privée à Vence qui aura pour ambition de devenir « une petite république des enfants ». Le projet ne se fait pas sans heurts et finit par être reconnu comme légal par Jean Zay sous le Front Populaire.

Ce roman graphique consacré aux époux Freinet est bien dessiné et d’une lecture agréable. L’immense mérite de cet album est, outre une présentation sérieuse des premières années de vie et de combat des pédagogues (le récit s’arrête en 1936), de souligner le rôle joué par Élise, soutien indéfectible et inspiratrice de certaines innovations, notamment dans le domaine artistique.

Dans la partie liminaire comme en conclusion, les auteurs reviennent sur l’aspect toujours moderne de la démarche initiée par l’instituteur, applicable dans nombre de circonstances et toujours porteuse d’un projet émancipateur.

Une très belle occasion de découvrir l’une des grandes figures de la pédagogie française.

Grégoire Masson

 

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