Parcourir le monde à moto

Parcourir le monde, c’est emprunter les routes. A pied, en voiture, en minibus, en camion, en bus, les possibilités sont innombrables. Après la parution de « Blanc » l’année dernière où l’auteur décrit sa traversée des Alpes à ski, l’écrivain-voyageur Sylvain Tesson publie la seconde édition d’un beau livre consacré à ses expéditions à moto. Que ce soit sur les routes de Syrie, d’Inde, de Sibérie, de Biélorussie, du Népal ou du Kirghizstan, « En avant, calme et fou » célèbre les belles machines, les paysages et l’exotisme.

Nous avons roulé sur la Terre. En Inde, en Russie, en Finlande, au Bhoutan, en Mongolie et en Sibérie, en Chine, en Serbie, au Chili, en Asie centrale et au Népal, à Madagascar et en Asie du sud-est.

Qui prenions-nous en croupe (c’est-à-dire sur la selle arrière ou dans la panière du side-car) ? Le chagrin ? Notre propre pitié ? Une amie ukrainienne ? C’était plus simple : nous embarquions avec nous le désir d’avancer. Car avancer c’est fuir. Et nous avions beaucoup de choses à laisser dans notre dos. Le fardeau de l’ennui d’abord. Et ce sentiment que les vêtements étaient trop serrés, les fenêtres trop verrouillées, que tout allait trop lentement dans les villes du siècle 21, que les temps étaient lourds et le présent notre prison.

Il y avait dans le voyage à moto une réminiscence des vieilles chevauchées que la modernité et ses lois cadastrales avaient interdites. Nous trouvions à peu de frais, assis sur la selle d’une bécane, un écho lointain de ces ruées sauvages où l’on cravachait sa monture, fichait une torgnole aux ragales et déclarait la guerre à tout le monde selon le bon vieux principes des Comanches.

Sylvain Tesson, En Avant, calme et fou, Albin Michel, page 9

Accompagné de son acolyte-photographe Thomas Goisque, Sylvain Tesson parcourt le monde au volant de vielles bécanes, bien souvent soviétiques : la Minsk 125, la Royal Enfield, la Bullet 500, la Yezdi Oilking, une Oural de 1966 ou encore une Suzuki malgache.

Il relie ainsi la Mer Baltique à l’Adriatique, Moscou au périphérique parisien, et l’Ouzbékistan au Kirghizstan. Les vallées bhoutanaises et la plaine cambodgienne n’ont plus de secret au bout de quelques pannes mécaniques. Les photographies, toujours très colorées, valorisent l’immensité des espaces, la luxuriance de la végétation et le sourire des habitants rencontrés.

Source : Extrait tiré du livre « En avant, calme et fou » publié chez Albin Michel, 2023, pages 38-39

La célébration d’une géographie au grand air dans la veine de Nicolas Bouvier en son temps.

Ce qui fait dire à Sylvain Tesson, en suivant les traces de l’armée napoléonienne revenant de Russie :

La différence entre un side-car et un cheval : si le side-car rend l’âme sur la route de la Retraite de Russie, on peut pas le manger.

Sylvain Tesson, En Avant, calme et fou, Albin Michel, page 52

Pour aller plus loin :

  • Présentation de l’éditeur -> Lien

Antoine BARONNET @ Clionautes