Benoit Falaize a été formateur pendant plus de quinze ans à l’IUFM de Versailles puis à l’Espé, ainsi que chercheur à l’INRP. Il s’intéresse plus particulièrement aux questions sensibles dans l’enseignement de l’histoire et est aujourd’hui chargé d’étude « Laïcité et Valeurs républicaines » à la DGESCO.

Dans ce petit opuscule, il propose une analyse de l’état de l’histoire-géographie à l’école primaire et dessine quelques pistes pour faire évoluer les pratiques. Le livre propose quelques petits encarts pour faire le point par exemple sur « le roman national » ou sur « les marronniers de l’enseignement de l’histoire ». Benoit Falaize souligne en gras quelques idées fortes. Une rapide bibliographie conclut l’ouvrage.

L’histoire, une matière pas comme les autres

On peut certes considérer que chaque discipline tend à s’imaginer comme unique dans le paysage scolaire français. Pourtant, il faut reconnaitre que l’histoire-géographie semble bien correspondre à cela comme en attestent plusieurs éléments. Par un petit rappel historique, l’auteur rappelle d’abord combien par exemple chaque programme d’histoire est objet de débat en France. En resituant la question dans un temps long, Benoit Falaize permet d’éviter des effets de myopie. On peut néanmoins relever l’accélération du phénomène avec pas moins de sept modifications de programmes officiels en trente ans, soit autant de sujets de disputes et de controverses ! Les débats sont aussi souvent plus politiques qu’historiques.

Les missions de l’histoire

Benoit Falaize rappelle toute la charge symbolique dont est investie l’histoire. Elle a une finalité morale, elle sert à promouvoir un modèle de socialisation et joue un rôle dans la formation du citoyen. Il n’oublie pas les savoirs et souligne aussi l’importance de donner aux élèves le goût de l’histoire. Cela peut permettre de faire sentir comme le dit le titre du chapitre suivant « les urgences du passé ». L’auteur dresse un rapide panorama des questions dites sensibles et par quelques rappels utiles il démonte là aussi l’idée que cela serait le privilège de notre époque. Disant cela, il ne gomme pas la réalité actuelle et insiste sur la victimisation et la multiplication des revendications identitaires. Il développe aussi la question de l’enseignement des faits religieux et des questions qu’elle soulève.

Quelques propositions concrètes

Benoit Falaize ne propose pas qu’une analyse en surplomb et avance quelque idées pour faire vivre l’histoire à l’école primaire. « Incarner l’histoire, à hauteur d’enfants, c’est aussi pouvoir expliquer que des anonymes, …ont fait l’histoire, en cachant par exemple des enfants pendant la Seconde Guerre mondiale ». Il évoque également des personnages qui « portent des valeurs de solidarité, de fraternité, d’égalité, de liberté aussi » : Victor Schoelcher, Lucie Aubrac pour n’en citer que quelques-uns. Cette galerie de portraits permettrait de représenter des valeurs. Plus loin dans l’ouvrage, il livre quelques conseils pratiques notamment sur le maniement des documents et conseille les situations problèmes. Il plaide aussi pour une certaine histoire-récit et développe d’ailleurs cela ensuite en insistant notamment sur les compétences que cela peut aider à développer ou à consolider chez les élèves. Il évoque aussi la nécessaire construction d’une partie au moins de la trace écrite en liaison avec les élèves.

Pratiques actuelles et difficultés

Un chapitre est consacré à ce point qui est en partie une synthèse de travaux de recherche. Il s’en dégage un sacré paradoxe puisque plus le niveau des diplômes des nouveaux professeurs est élevé, plus ils témoignent de difficulté à enseigner l’histoire. Du côté des élèves, un point essentiel à avoir toujours en tête est la question de la représentation du temps. Il faut aussi s’interroger toujours et encore sur les documents soumis aux élèves. Dans un dernier chapitre Benoit Falaize plaide donc pour « un enseignement vivant de l’histoire ».

Cet ouvrage s’avère très utile à celles et ceux qui s’engagent dans le professorat des écoles, qu’ils soient ou non de formation historien. En replaçant dès que nécessaire l’enseignement de l’histoire dans une temporalité large, il permet de mieux cerner les enjeux de cette discipline investie d’une charge symbolique qu’il ne faut jamais oublier.

© Jean-Pierre Costille pour les Clionautes.