Céline Chadenas est professeur des universités à Nantes et Vincent Andreu-Boussut est maître de conférences en géographie à Le Mans Université. Ils coordonnent cet ouvrage rédigé par 17 géographes, dont l’objectif est de saisir l’évolution des recherches sur l’environnement dans un contexte en pleine transition.

Le mot « environnement » est concomitant de la naissance de la géographie à la fin du XIXème siècle. Il est même popularisé par Paul Vidal de la Blache avec le même sens que le mot « milieu ». Les monographies, nombreuses jusqu’aux années 1950, sont l’héritage de cette école vidalienne avec pour dessein de révéler les relations tissées entre les sociétés humaines et leur environnement. De nouvelles approches apparaissent dans les années 1960. L’intérêt pour l’environnement se maintient en géographie physique mais ne constitue plus un objet prioritaire en géographie humaine, au profit de l’écologie. Il faudra attendre la fin des années 1970 pour voir le renouveau de l’intérêt de la géographie pour l’environnement par des approches géo-systémiques. L’amplification des défis environnementaux, auxquels sont confrontés nos sociétés participe à renouveler les fondements et les méthodes de la géographie de l’environnement. La géographie contemporaine est donc l’héritière d’une relation mouvementée avec l’environnement, ce qui explique la diversité des approches actuelles et, peut-être, le « s » à « environnements » de la question au concours externe du CAPES d’histoire-géographie. Ce sont les emboîtements d’échelles, les temporalités variées, leurs diversités, les sociétés, les milieux qui créent la géographie actuelle. Les 3 chapitres illustrent cette évolution de la géographie de l’environnement.

Partie 1 – La diversité des espaces de l’environnement à l’heure de l’Anthropocène

La géographie continue d’évoluer et, à l’heure de l’Anthropocène, les approches se modifient. Les géographes participent aux débats pour fixer la datation de l’origine de cette nouvelle période géologique, qui « n’est pas juste une crise mais une rupture géologique à l’échelle des âges de la terre » (Bonneuil et Fressoz). Pour Lussault, c’est l’urbanisation qui nous précipite dans l’Anthropocène et il propose le terme d' »Urbanocène« . Mais ce sont surtout les effets de ce nouveau régime dominé par les activités humaines sur les écosystèmes qui sont à l’origine de travaux scientifiques variés en géographie, à la fois sur le système-terre et son habitabilité. 4 types d’espaces géographiques, bouleversés par les changements climatiques et en transition écologique, sont explorés dans cette 1ère partie. La gestion de la forêt et la valorisation forestière doivent par exemple évoluer face à ces nouveaux enjeux. La nouvelle méthode sylvicole de la « forêt mosaïque », plus résiliente face au changement climatique, est présentée. C’est bien une meilleure connaissance des relations forêt-société qui permettra en effet d’imaginer des stratégies d’adaptation et de nouveaux modèles écologiques et économiques vertueux. Les espaces urbains sont ensuite examinés dans leurs potentialités d’intégration de l’agriculture. L’agriculture urbaine est pratiquée aussi bien pour ses bienfaits environnementaux et sociaux que dans une perspective vivrière et alimentaire. Mais elle est aussi exposée à divers risques et formes de vulnérabilités, que ce soit dans les villes du Nord que du Sud. Les espaces océaniques offrent un autre témoignage des impacts des changements globaux (montée des eaux, acidification des océans,…) et des activités humaines (surpêche, marées noires et vertes,…). De nombreux essais, à plusieurs échelles, tentent d’organiser une gouvernance des océans, avec plus ou moins de succès. Enfin, un focus sur les espaces naturels protégés permet de remarquer la diversité des régimes de protection et des modes de gestion.

Partie 2 – Les temps de l’environnement : héritages et ruptures

Cette 2ème partie propose d’éclairer l’importance de la prise en compte des temporalités dans la géographie de l’environnement. La première dimension temporelle correspond au temps long, fondamental pour saisir les dynamiques et les grands cycles. Sont présentés de nouveaux outils de datation et le développement d’une nouvelle discipline : la paléogéographie. La deuxième dimension temporelle est celle du temps historique, travaillée cette fois par la géohistoire. Par l’étude de plusieurs exemples, les évolutions des rapports entre les sociétés et leurs environnements sont révélées. Cette prise en compte de temporalités variées est ainsi mobilisée pour comprendre les évolutions globales et locales du climat, la contribution des activités humaines et les responsabilités différenciées des pays selon leur niveau de développement. Émerge alors une géopolitique de la lutte contre les changements climatiques contemporains dans le cadre d’une difficile quête d’une justice climatique.

Partie 3 – Repenser les rapports société et environnement

Cette dernière partie propose d’explorer le renouvellement de la discipline et ses contributions à travers 3 dimensions notionnelles et thématiques. La première notion est celle des risques. L’intérêt de la géographie résulte de la combinaison d’une connaissance des aléas naturels et d’une analyse des vulnérabilités différenciées des territoires et des sociétés. Dans un contexte d’augmentation généralisée de la vulnérabilité, les capacités d’aménagements, de gestion des risques et de résilience dépendent du niveau de développement et de culture du risque des populations, engendrant des inégalités environnementales. Leurs prise en compte doit aboutir à une meilleure justice climatique et environnementale. Enfin, l’évolution de l’urbanisme apparaît comme un symbole d’une transition écologique possible, à la recherche de sobriété et d’un nouveau rôle pour les citoyens, signe d’un renouvellement des liens entre villes et environnements.

 

Cet ouvrage, compilation d’articles aux sujets variés regroupés en 3 thèmes, est intéressant pour les candidats aux concours de l’enseignement en géographie. Le point commun qui transparaît est l’évolution de la géographie de l’environnement, et au-delà de la géographie elle-même maintenant « à la croisée des sciences sociales et naturelles et [qui] peut donc explorer et aider à résoudre les « mauvais problèmes » qui caractérisent la relation de plus en plus difficile entre l’homme et l’environnement » (Meadows). Les étudiants et les enseignants pourront piocher parmi les nombreux exemples pour préparer des études de cas. La bibliographie, fournie, permet également d’aller plus loin et de réfléchir aux nouveaux apports, méthodes et outils de cette géographie de l’environnement.