Voici un ouvrage qui attaque, sous un angle novateur, la question des bombardements aériens alliés sur l’Allemagne nazie. Le présent ouvrage raconte donc l’histoire de ces bombardements avant et pendant la campagne de Normandie et surtout, d’une façon plus générale, celle des bombardements alliés tout au long du conflit. L’historien s’est posé, au fil de ses recherches, plusieurs questions dont l’historiographie nous rappelle qu’elles ne sont pas novatrices mais suscitent toujours de violentes controverses. Les bombardements ont-ils réellement joué un rôle décisif dans le déroulement des hostilités ? De quelle manière furent opérées ces bombardements par les Britanniques et les Américains ? Ces deux belligérants, certes alliés, ont-ils eu des stratégies divergentes afin de faire capituler l’Allemagne nazie ? Ces destructions délibérées de villes allemandes par bombardements étaient-elles morales ? Ces bombardements ont-ils drastiquement entamé l’économie de guerre du IIIe Reich ? Le moral de la population civile a-t-il été brisé ? Pour répondre à ces questions, l’auteur a puisé à différentes sources pour rédiger cette étude : les archives bien entendu ; des entrevues et les mémoires des principaux acteurs de l’époque. Ces différents matériaux comportent immanquablement leur lot de questionnements et aussi de difficultés. Mais tous ont joué leur rôle dans la reconstitution des offensives aériennes telles qu’elles furent vécues tant par ceux qui les ont subies que par leurs décideurs.
Sur l’ensemble des sources, deux catégories doivent néanmoins appeler l’attention du lecteur. Tout d’abord, les entrevues menées par l’auteur avec des civils allemands témoins des bombardements. On pourrait alors soupçonner ces civils, par le prisme de leur témoignage, de vouloir filtrer leur mémoire, de faire acte d’autojustification. Il faut alors rappeler qu’à cette époque, ces témoins étaient de tous jeunes enfants. Ils n’avaient pas encore été politiquement embrigadés pour servir le régime nazi. Autre argument, le temps reste un rempart, certes parfois poreux, mais un rempart qui, par la distanciation qu’il impose, permet une objectivité historique. En dépit des réserves et de l’usage de l’histoire orale, il n’en reste pas moins que ces témoins furent aux « première loges » de l’événement. Leur expérience n’en reste pas moins un élément incontournable et digne d’intérêt pour compléter l’historiographie de cette époque. Une deuxième source potentiellement sujette à controverses sont les mémoires d’Albert Speer. Tous les autres dignitaires nazis se s’étant donné la mort, s’étant réfugiés dans la clandestinité ou ayant été pendus à Nuremberg, il a ainsi pu donner sa version des faits sans être contredit par les autres acteurs de l’époque. Aussi, comme tous les ouvrages de ce genre, ces mémoires constituent une entreprise d’autojustification et doivent, par conséquent, être manipulées avec précaution. Ils procurent néanmoins des données fiables. La controverse entourant Albert Speer et ses souvenirs reste très spécifique. Elle porte essentiellement sur la connaissance qu’il avait de l’Holocauste, son recours à la main d’œuvre forcée dans les usines d’armements ou autres, et les sympathies qu’il aurait prétendument eues pour la résistance allemande. L’ouvrage de Randall Hansen n’aborde pas ces thématiques. Il montre cependant l’analyse qu’a fait Albert Speer de l’incidence des bombardements sur la production de guerre de l’Allemagne nazie. On peut évidemment se questionner sur l’importance donnée par l’auteur aux écrits de Speer. A la fin des années 1960, date également de la parution de ses mémoires, Speer n’aurait eu aucun intérêt à mentir à ce propos. D’autre part, il a paru nécessaire à l’auteur de présenter de manière plus complète qu’à l’habitude le point de vue de Speer concernant les bombardements sur zone et de précision.
La question des bombardements alliés sur l’Allemagne nazie ressurgit, parfois, au gré des vicissitudes de l’histoire mémorielle et du renouvellement historiographique.
En mai 1945, près de deux millions de tonnes de bombes furent larguées sur le IIIe Reich. Plus de 60 villes ont été rayées de la carte et rare sont les agglomérations et villages ayant échappé à la destruction. Près de 600.000 personnes en Allemagne ont trouvé la mort lors des bombardements. 80.000 aviateurs alliés ont également été tués. Pourtant, dès la fin du conflit, une violente controverse éclata, reposant sur deux questions bien distinctes : les bombardements était-ils justifiés ? Se sont-ils révélés efficaces ? Or, pour répondre à la première question, il faut d’abord émettre une troisième interrogation. Justifiés sur quels critères ? Cela dépend évidemment de la stratégie employée tout autant de la théorie de la guerre que l’on retient. Chaque extrême expose ainsi son propre point de vue. Certains estiment qu’elles furent intentionnelles ou accidentelles. Les offensives de bombardement aériennes tuant des civils n’étant en aucun cas justifiées, ni les bombardements britanniques puis américains n’auraient dû avoir lieu. A l’opposé, certains estiment que l’objectif des bombardements consiste précisément à terrifier les civils, à les faire fuir des villes, à les jeter à la rue. Roosevelt estimait pour sa part en 1942 que la population allemande comprenait clairement que le pays tout entier s’était engagé dans une association de malfaiteurs sans foi ni loi contre les usages de la civilisation moderne. Les gens qui avaient bombardé Varsovie, Rotterdam, Londres et Coventry allaient comprendre leur douleur. Il était clair pour lui que les bombardements alliés sauraient atteindre ce but.
La plupart des observateurs se situent entre ces deux extrêmes. Rares sont celles et ceux pour lesquels les offensives de bombardement ne sauraient valoir une seule mort civile allemande. Plus rares encore sont ceux et celles qui considèrent que les Allemands n’avaient pas à payer le prix de leurs décisions et de leurs actions. La plupart des observateurs jugent que la mort d’un certain nombre de civils se justifie, mais seulement si elle favorise de manière substantielle l’issue du conflit. En fait, personne ne saurait évidemment avancer le nombre exact de morts « acceptables ».
Raids de precision contre raids sur zone
Dès la fin de l’année 1940, les Britanniques tentent de répondre coup pour coup aux Allemands en bombardant leur industrie, leurs infrastructures pétrolières et les ports. On appelle cela les bombardements sur zone. La Royal Air Force espère ainsi, par des frappes précises, réduire sensiblement l’industrie d’armement allemande. Mais les bombardements britanniques sont complètement inopérants. Atteindre ces objectifs s’avèrent bien au-delà des potentialités techniques de l’époque. Ils servent surtout à regonfler le moral de la population. Il faut attendre le milieu de l’année 1942 et surtout le milieu de 1943 pour atteindre des sommets de destruction sur les villes allemandes. Devant l’échec de ces coups d’épingles, la RAF change radicalement de stratégie. Désormais, les bombardements se feront, sur « zone », c’est-à-dire sur le cœur des villes. Leurs buts : mettre à bas l’économie allemande, frapper tous azimuts les maillons de l’industrie, amputer la force de travail des ouvriers allemands et, surtout, briser le moral de la population. Dans cette optique, les villes de Rostöck, Lübeck et Cologne furent les premières cibles. Accessibles, proches des côtes de la mer du Nord, elles furent le laboratoire de la politique de bombardement britannique. Leur destruction à près de 90 % pouvaient, jusqu’à la fin de l’année 1943, être considérées comme acceptables. Ce revirement de situation reposait sur la théorie que les bombardements sur zone permettraient d’obtenir les résultats escomptés. Confortés par le succès de ces bombardements, la RAF décide alors de frapper un grand coup sur Hambourg. Le raid, qui se déroula du 24 au 25 juillet 1943, causa des dévastations d’une ampleur sans précédent jusque-là inégalées jusqu’au début de l’année 1944. Pourtant, si ce bombardement avait pu contraindre les Allemands la capitulation, ce raid l’aurait fait. Pourtant, comme l’on prouvé les rapports officiels britanniques après guerre, le bombardement sur zone de Hambourg n’a que légèrement perturbé la production allemande. Les raids plus modestes des années précédentes, notamment sur la Ruhr et les infrastructures reliant les villes industrielles allemandes eurent des répercussions beaucoup plus graves.
Changement de stragégie
Les bombardements sur zone n’ont pas gagné la guerre. Pire, ils l’ont même sûrement prolongée. Interrogeant Speer le 15 mai 1945, les Américains furent impressionnés par ses propos. Invité à comparer l’efficacité des attaques des bombardiers lourds américains ou britanniques ou des raids diurnes et nocturnes, Speer répondit que les offensives américaines systématiques contre les cibles industrielles s’étaient avérées de loin, les plus dommageables. Ce sont en réalité ces attaques qui causèrent l’effondrement de l’industrie allemande de l’armement. Les Britanniques obtinrent une réponde identique de la part de Speer à leur questionnement. En fait, en trois occasions, quelques raids de précision ont presque mis l’Allemagne à genoux. Les offensives sur les usines à roulement à billes, les raids sur les barrages et les attaques sur les transports et infrastructures pétrolières. Speer redoutait par-dessus tout de nouvelles attaques sur ces mêmes cibles. Craintes qui ne se concrétisèrent pas, en grande partie du fait des Britanniques et de leur chef, Harris, obnubilés par leur stratégie de bombardement sur zone et de destruction systématique de toutes les villes allemandes. En mars 1943, le comité d’analyse des opérations (Committee of Operations Analysts) (COA) émit un compte rendu dont Speer, lui-même, aurait pu en rédiger les termes. Ce groupe d’experts recommandait alors la mise en place d’attaques de précision sur les secteurs industriels fragilisés par des goulets d’étranglement : roulements à billes, hélices, pneus et moteurs. En ce qui concerne les offensives pétrolières, il estima nécessaire de détenir de renseignements supplémentaires pour se prononcer. Ce fut chose fait avec, le 21 juin 1944, le déclenchement systématique d’offensives sur l’industrie aéronautique, les infrastructures pétrolières et les usines de roulement à billes. Quant aux raids sur le pétrole et sur les transports, ils contribuèrent à l’implosion de l’Allemagne au sortir de l’été 1944. Or, les Américains savaient que ces attaques étaient possibles à la condition sine qua non que d’autres attaques de précision portassent leurs fruits, à savoir la destruction de la Luftwaffe. Cet effort supplémentaire puis l’anéantissement furent le fait des seuls Américains. Les Britanniques, pour leur part, s’entêtant sur les villes allemandes. Pour autant, certains auteurs placent les offensives américaines sous l’angle de la morale et celles de la RAF du point de vue stratégique. Il est vrai que la plupart des bombardements de précision causèrent des pertes civiles et, quand le ciel était obstrué, les attaques dites de précision se résumaient à des bombardements à l’aveugle, les radars pouvant aider les pilotes à discerner les villes à travers les nuages mais pas leurs cibles spécifiques à l’intérieur de ces agglomérations. Les Américains ont ainsi largement recouru aux bombes incendiaires dans l’espoir que la destruction d’une plus large périmètre permettrait d’anéantir les cibles réelle, comme à Dresde en février 1945. Enfin, l’USAF a délibérément aussi bombardé sur zone, comme à Münster en octobre 1943 et encore à Dresde en février 1945. Il est par conséquent difficile de tracer clairement une limite entre les forces de bombardement américaine et britannique. Les raids de précision, tentés dès 1942 et avec succès dès 1943 par les Britanniques contre les barrages nécessitaient des conditions climatiques parfaites mais ces opérations entraînaient de très lourdes pertes dans les rangs des aviateurs alliés. Aussi, les alliés se retrouvèrent au prise avec un dilemme : vaut-il mieux perdre plus d’équipages en un même raid mais bombarder moins souvent ou l’inverse ? Les Américains optèrent pour la première formule, acceptant un taux de pertes par raid équivalant au double de celui des Britanniques, mais bombardant moins.
SOURCE
On peut également concevoir la délimitation entre bombardements américains et britanniques du point de vue de l’intention. Jusqu’en 1945, les Américains s’efforcèrent, dans la mesure du possible, d’épargner les civils allemands, au contraire des Britanniques. Ce qui ne veut pas dire que les Américains ont toujours bombardé des cibles militaires. En septembre 1944, les Britanniques menèrent un raid sur zone sur la ville de Darmstadt la détruisant à près de 80 %…sans pour autant réduire de façon drastique la production de guerre. Ce furent les Américains qui, en décembre de la même année, stoppèrent net l’effort allemand. Les recherches historiques semblent conforter ce point. Les Allemands, après guerre, estimèrent à près de 400.000 morts les civils ayant péris du fait des bombardements, dont 75 % attribués aux Britanniques et 25 à l’USAF. Personne ne saurait, bien évidemment, déterminer avec exactitude ces chiffres. Néanmoins, ces estimations recoupent les statistiques officielles. Sur l’ensemble du conflit, la RAF a largué 48 % de bombes sur des villes, contre 6 à 13 % pour les Américains. A partir de janvier 1942, le Bomber command dirigea 56 % de ses sorties sur les quartiers centraux des villes allemandes. La moitié de la charge totale du Bomber command, soit 500.000 tonnes de bombes, a été larguée sur des centres urbains densément peuplés. Jusqu’à la fin de la guerre, la campagne américaine a été marquée par un souci constant des dimensions morales du bombardement. Ils ont pris par ailleurs des mesures très concrètes pour protéger le patrimoine culturel de l’Europe. Le ministère de la guerre américain intervint, à plusieurs reprises auprès de Roosevelt pour demander à épargner le mieux possible les bâtiments culturels allemands. En août 1943, Roosevelt consentit à la mise sur pied de la Commission américaine pour la protection et le sauvetage des monuments artistiques et historiques en Europe. Travaillant avec l’armée américaine, la commission a établi des relevés des villes et des monuments que les forces américaines d’invasion devaient épargner, notamment en Italie.
Il reste cependant à déterminer pourquoi une telle précaution et préoccupation morale n’ont pas autant profité aux Japonais dont les villes furent pilonnées par des bombes incendiaires, puis frappées au moyen de bombes nucléaires. Il reste aussi à déterminer pourquoi les camps nazis n’ont pas, eux aussi, bénéficié du même souci de moralité. Vers la fin de la guerre, les alliés auraient pu utiliser leurs forces aériennes pour contrer le génocide. Il n’est pas certain que cette tentative aurait stoppé cette tragédie. Mais le fait est que les alliés n’ont jamais essayé. Cette inaction de leur part discrédite la théorie selon laquelle l’Holocauste pourrait justifier la campagne de bombardements, ou atténuer en le caractère effroyable. Ce n’est certes pas le cas. Une autre idée largement répandue s’en trouve aussi décrédibilisée : celle que les bombardements sur zone auraient sauvé la vie à de nombreux déportés. Mais les bombes larguées tous azimuts ont tué bien plus de travailleurs forcés étrangers et de déportés qu’elles n’en ont sauvés. Ni les déportés, ni les travailleurs forcés n’étaient admis dans les abris antiaériens allemands. A la fin de la guerre, 32.000 prisonniers de guerre civils étrangers furent tués par les bombardements.
Quels résultats ?
Les bombardements sur zone n’ont pas permis de remporter la victoire. Ils eurent toutefois des impacts indirects majeurs. Pour se défendre contre les bombardements, le Reich a dû employer des ressources qui, sans les bombes, auraient été investies dans d’autres dimensions à son effort de guerre. En 1944, près de deux millions de civils et de soldats participaient aux défenses terrestres antiaériennes. Speer affirma qu’environ 30 % de l’artillerie et 20 % des munitions lourdes produites en 1944 étaient destinés aux défenses antiaériennes. Quelque 50 % de la production électrotechnique et 33 % du secteur optique étaient entièrement consacrés à la fabrication de radars et d’équipements de transmission pour les défenses antiaériennes, privant le front de ressources essentielles pour les communications. Ces effets n’étaient pas inconnu des alliés. Mais ce détournement de ressources a-t-il réellement fait pencher la balance en faveur des alliés ? De toute évidence, il n’a pas mis un terme à la production industrielle allemande puisqu’elle a même augmenté jusqu’en septembre 1944, date à partir de laquelle elle s’effondra. Mais cette baisse soudaine coïncide avec des territoires libérés et les ressources allant de pair. Au total, il s’avère difficile de quantifier avec exactitude la part des bombardements dans le recul de l’industrie allemande. Comment la guerre aurait-elle évolué si les Allemands avaient mobilisé les ressources consacrées à leur défense ? Nul ne saurait répondre à cette question. Deux entraves pourraient être prises en compte sur de probables explications : l’absentéisme et la production d’artillerie. La production massive de celle-ci s’explique avec la production massive de bombes chez les alliés. En ce qui concerne l’absence, il peut certes poser problème mais il n’a en réalité guère eu d’effet sur la production. C’est chez les femmes qu’il était le plus élevé et, pour la plupart, elles ne prenaient pas directement part à la production industrielle. De plus, les travailleurs absents étaient souvent remplacés par des travailleurs forcés ; enfin, ils allaient généralement travailler dans d’autres villes allemandes. Néanmoins, ce bilan ne permet pas d’affirmer que le détournement des ressources au profit de la défense des villes allemandes a été significativement plus important, en termes absolus, que le détournement des ressources au profit de leur bombardement : dans une certaine mesure, les transferts de ressources allemands et alliés se sont contrebalancés l’un l’autre. Mais, surtout, la plupart des déplacements de ressources induits par les bombardements, sinon tous, auraient peut-être eu lieu même si les offensives s’étaient limitées à des attaques de précision, sans recours aux bombardements sur zone. C’est ce qu’explique Speer aux alliés en déclarant que les bombardements sur zone n’eurent qu’une incidence insignifiante alors que les bombardements américains avaient provoqué les détournements de ressources. La défense des cibles industrielles constituait une tâche titanesque. Déclenchée sur l’ensemble du pays, une campagne de bombardements de précision comparable à celle qui a été mise en œuvre sur les transports aurait obligé les Allemands à se doter de défenses massives et parfaitement coordonnées entre elles.
L’étude de Randal Hansen vient battre en brèche de nombreuses idées reçues. Celles de bombardements américains pratiqués à l’aveugle, adeptes du carpet bombing, réduisant tout sur leur passage. On en est très loin car les Américains ont fait beaucoup afin de préserver le patrimoine culturel européen. L’effort de l’USAF s’est porté sur l’industrie de guerre allemande afin de désorganiser la structure de production. Quelques raids de précision, sur le pétrole, les roulements à billes, les pneumatiques par exemple ont bien failli mettre l’Allemagne à genoux dès 1943. Bien entendu, cela ne veut pas dire que ces attaques ont épargné des civils allemands tués à proximité de cibles militaires se trouvant à l’intérieur des agglomérations. A l’opposé, on découvre un état-major britannique de la RAF prêt à rayer de la carte toutes les villes allemandes sous un déluge de bombes. Tout au long de la guerre, les Anglais pratiquèrent les bombardements sur zone, dont le but n’étaient ni plus ni moins que de détruire les villes avec leurs ouvriers, semer la panique dans la population et prouver au monde entier la puissance destructrice de la RAF. Cependant, les résultats promis à Churchill ne furent pas au rendez-vous. Il fallait, d’une part, détruire la Luftwaffe afin de pénétrer l’espace aérien du Reich et bombarder les usines de production. Les Britanniques s’en montrèrent incapables. Les Américains, par des frappes précises et puissantes y sont parvenus. La désorganisation de l’industrie de guerre allemande a été rendue possible par les bombardements américains, ciblant les maillons essentiels de production. Le seul mérite des britanniques se cantonne aux raids briseurs de barrages, raids de très grande précision mais dont les répercussions furent très faibles sur la réduction de la production d’électricité des entreprises allemandes. En définitive, les bombardements n’ont pas, à eux seuls, permis de gagner plus rapidement la guerre contre l’Allemagne. Certains spécialistes arguant même du fait qu’ils en auraient seulement prolongé le cours. Les alliés ne tentèrent pas de stopper l’Holocauste, alors que tous les renseignements issus des différentes officines diplomatiques alertaient sur cette situation. Sur le théâtre des opérations du Pacifique, les Américains n’ont pas épargné le Japon, en réduisant systématiquement en cendres les villes de l’empire du Soleil levant. Pourquoi une telle différence de traitement ? Autant de questions que les historiens et les spécialistes de cette période ne manqueront pas de traiter. Toujours est-il qu’au sortir de la guerre, la stratégie de bombardement aérien sera appliquée durant la guerre froide, notamment en Asie en Corée et, plus tard, au Vietnam.