Cette BD est la réédition d’un titre paru en 2008, déjà chez Delcourt. Autrice de BD aux thématiques fortes, Chloé Cruchaudet revient ici sur une expédition en Arctique, menée par Robert Peary, à la recherche du Pôle Nord.
De manière totalement imprévue, celui-ci décide de ramener de son expédition quelques membres d’une tribu d’esquimaux. Parmi ceux-ci, Minik et son père Qirzu. D’abord ébahis par la découverte des Etats-Unis et de New-York, les Esquimaux se rendent compte rapidement de leur statut de bêtes de foire qui fait la fortune de l’explorateur, en recherche de financement pour une nouvelle expédition en direction du Pôle Nord afin d’être le premier homme à l’atteindre.
Nous suivons donc les destins croisés de Minik et de Peary à travers une centaine de pages qui présentent un rythme soutenu tout en laissant la place à des moments de réflexion, à la fois sur la culture esquimaude, le phénomène des zoos humains, le mépris existant vis-à-vis des cultures non-occidentales, le rôle des médias..
En effet, ces derniers vont être au cœur d’une querelle majeure et qui traverse le livre : le destin des Esquimaux. Ces derniers succombent rapidement au climat new-yorkais et quel survit le jeune Minik. Celui-ci finit par se rendre compte d’une part du racisme ambiant de cette société mais, aussi et surtout, de l’utilisation des corps de ces compagnons d’infortune comme objet de science et trophée de musée.
S’ensuivent alors un long combat pour récupérer la dépouille de son père et le projet de revenir chez les siens après des années d’absence. Etranger aux Etats-Unis, Minik découvre aussi à son retour en Arctique son désormais trop fort décalage par rapport aux membres de sa tribu.
Avec Groenland Manhattan, Chloé Cruchaudet nous livre une BD touchante, émouvante et remplie d’humanisme. Elle y montre les relents racistes, pseudo-scientifiques et méprisants de cette période, notamment par rapport aux cultures orales. Une belle découverte.