C’est d’un lointain Mai 68 révolutionnaire dont il est question dans les pages de cette bande dessinée alliant un récit d’aventures de belle facture à une évocation historique et archéologique de qualité. Antérieur de mille neuf cent ans au tumulte qui exalta la jeunesse bourgeoise rebelle du Quartier Latin, ce Mai 68-là inaugure la séquence des guerres civiles de « l’année des quatre empereurs » qui vit la fin de la dynastie augustéenne. Après la chute de Néron, ultime représentant dégénéré et universellement haï des Julio-Claudiens, une succession d’empereurs militaires s’affronta pour revêtir la pourpre impériale. Les avènements de Galba, Othon et Vitellius sont éphémères. Finalement, leur vainqueur Vespasien restaure la Pax Romana et est le fondateur de la dynastie des Flaviens.

Ces grands événements ont eu pour prologue une rébellion inaugurale en Gaule sous l’impulsion du sénateur Gaius Julius Vindex, gouverneur de la province de Gaule lyonnaise, usurpateur rapidement trahi et vaincu par un général jouant double jeu. C’est dans ce contexte préparatoire méconnu que se déploie l’intrigue de l’album, qui met en scène les pérégrinations à travers la Gaule romanisée de l’intrépide Quintus Aper, ancien légionnaire au passé complexe et aux multiples casquettes, tout à la fois aventurier, agent de renseignement et bon samaritain. À travers les aventures tumultueuses de ce hardi protagoniste en ces temps troublés, le scénario tresse avec habileté les fils mêlés de la Grande Histoire et ses vrais acteurs (Vindex, Vespasien…) à ceux de la petite histoire et ses héros de fiction.

Le tout se prête parfaitement à une immersion visuelle tout aussi agréable qu’instructive dans la société, l’art de vivre et l’urbanisme romains. Le charme d’une illustration soignée et attentive aux détails (comme les cavaliers sans étriers) conforte les qualités du scénario. Bien que l’intrigue de ce Mai 68 soit bouclée, le plaisir que l’on a eu à suivre Quintus Aper dans son périple et le fait que les successeurs de Néron ne soient pas entrés en scène donnent à espérer que cet album en augure d’autres au contenu tout aussi plaisant. Car après tout, « l’année des quatre empereurs » est encore loin de son terme… Placée sous le patronage d’un préfacier reconnu, le grand spécialiste des armées romaines Yann Le Bohec, et accompagnée par un dossier documentaire de qualité, cette bande dessinée produite par une petite maison s’avère tout à la fois un bon divertissement et une belle proposition pédagogique qui mérite de rejoindre les bonnes bédéthèques. Souhaitons-lui en tout cas un bon vent et une belle réussite.

Guillaume Lévêque

 

Présentation de l’éditeur. « Nous sommes en Gaule sous le règne de l’empereur Néron. Bientôt, le 11 juin, déclaré la veille ennemi public par le Sénat, le prince se suicidera. Sa succession n’est pas prévue. Avec lui disparaît le dernier représentant de la maison d’Auguste. Qui pourra remplacer cet empereur dont le règne avait commencé sous les meilleurs auspices et s’est achevé dans la pire des incuries ?

Ce sont désormais les armées provinciales qui vont faire et défaire les princes. Soutenus par les légions, plusieurs prétendants vont tenter leur chance. Pour arriver à leur fin, tous les moyens sont bons : malversations, corruptions, pots de vins, détournements, meurtres. Les provinces gauloises vont être le théâtre des premiers affrontements.

Mandaté en Gaule Lyonnaise par un des prétendants au titre, un ancien militaire arrive à Lugdunum. Sa mission est de surveiller, d’écouter, d’espionner et de rendre compte. Mais les événements vont l’entraîner à commettre certains actes risquant de la compromettre.

Avec cet album Gallia Vetvs vous invite à une grande aventure en Gaule romaine. Cette fiction au cœur de l’Histoire vous fera découvrir comment la « romanisation » s’est installée progressivement dans cette partie des provinces de l’Empire romain ».