Ce bel ouvrage bilingue, présente la richesse et la diversité du territoire de l’île-de-France, à travers un parcours photographique, composé de paysages (parcs naturels régionaux, jardins remarquables…), d’infrastructures, de monuments historiques, musées, « maisons d’illustres », châteaux, et autres ensembles architecturaux notables. La couverture résume bien l’esprit du livre : une prise de vue depuis la terrasse de Saint-Germain-en-Laye conçue par Le Nôtre en 1670, offrant un panorama en direction de La Défense. Ainsi, passé et présent se mêlent. Fermes, cathédrales gothiques et architectures contemporaines (industrielles ou résidentielles), se côtoient pour témoigner de l’identité et de l’héritage patrimonial de la région. On ne peut inévitablement penser au poids politique de cet espace au fil des siècles, au cœur de l’Histoire de France. Les résidences royales constituent des marqueurs spatiaux incontournables.

Certes la région dispose de quatre sites inscrits sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Mais il s’agit au gré de thématiques variées de mettre en valeur tous les aspects culturels au sens large. L’objectif est de partager un regard sur ce territoire façonné au cours des siècles, où les innovations et la modernité demeurent une constante.

Trois parties composent l’ouvrage, qui se subdivise en seize chapitres, introduits chacun par une brève présentation. S’ensuivent de belles photographies pleine page, une douzaine la plupart du temps, dont les légendes sont rassemblées à la fin de chaque section. De petites vignettes les accompagnent, ce qui permet de se repérer plus aisément.

Partir au vert

Cette première partie met l’accent sur la ruralité du territoire, qui fait quelque peu oublier la dominante urbaine. Les vestiges d’établissements monastiques rappellent le dynamisme de l’agriculture céréalière, grâce à des sols fertiles, en Beauce et en Brie. D’imposantes fermes à cour fermée subsistent. Des enjeux de préservation sont engagés pour limiter le mitage des terres agricoles, et la périurbanisation. L’activité maraîchère et horticole est encore présente.

Le patrimoine gastronomique de l’île-de-France a connu une certaine renommée : la cerise de Montmorency, le haricot d’Arpajon, l’asperge d’Argenteuil, le brie de Meaux, la poule de Houdan… Désormais le MIN de Rungis s’impose. Toutefois le regain pour le local, ne peut effacer un constat : depuis plusieurs décennies une urbanisation effrénée a fait peu à peu disparaître ses espaces productifs agricoles.

Une section est consacrée aux villégiatures ostentatoires qui témoignent de la puissance de la bourgeoisie fortunée du XIXe siècle, jusqu’au tournant du XXe. L’architecture classique revisitée, éclectique ou pittoresque sont à l’honneur. Les exemples proposés sont éclairants : le château de Voisins, le château de Dino à Montmorency, le château de Monte-Cristo à Port-Marly, le château Gévelot à Conflans-Sainte-Honorine…

L’Ile-de-France constitue aussi une terre de jardins, où l’eau est omniprésente (Fontainebleau, Courances…). A côté des parcs royaux, de belles propriétés proposent de belles réalisations : le parc de Méréville, le désert de Retz à Chambourcy.

Là où souffle l’esprit

Le domaine royal capétien fût le territoire de l’épanouissement de l’art gothique. Dans ce chapitre, la collégiale de Poissy, la cathédrale de Meaux, la collégiale Saint-Martin de Champeaux sont à l’honneur.

Les lieux de pouvoir des périodes médiévale et moderne sont évoqués : Paris, Versailles, Vincennes, Fontainebleau, Saint-Germain-en-Laye, Saint-Cloud, Ecouen.

Le chapitre suivant « Terre d’inspiration » fait pénétrer dans des espaces bien moins imposants, les ateliers d’artiste, où s’opère un processus créatif, à l’abri des regards. Des exemples parisiens, dans les XVIIIe et XIVe arrondissements illustrent ce thème. On y voit aussi l’atelier de Charles Daubigny à Auvers-sur-Oise décoré par Corot. La commune de Saint-Rémy-lès-Chevreuse révèle d’autres exemples plus contemporains.

« Quand l’art renouvelle la ville », montre des fresques murales monumentales et des sculptures en lien avec les lieux, intégrées pleinement à l’espace public, en interaction avec ses usagers, et dialoguant avec leur environnement. Les villes nouvelles concentrent ses réalisations, formant des repères pour les habitants.

Les édifices art déco sont aussi une autre facette du patrimoine de la région, comme le palais de la Porte Dorée, les théâtres de la Michodière, de Chaillot, de la Porte Saint-Martin, de Suresnes ; les hôtels de ville de Puteaux, de Vincennes, le cinéma le Grand Rex.

La diversité du patrimoine religieux du XXe siècle souligne le dynamisme des communautés. On notera la chapelle orthodoxe de Champagne-sur-Seine (1937-1938), l’église apostolique arménienne d’Alfortville (1929), la synagogue de La Ferté-sous-Jouarre dans un style hispano-mauresque (1891) et celle de la rue Pavée à Paris de l’architecte Hector Guimard (1914), le temple du Raincy (1897), la Grande mosquée de Paris inaugurée en 1926, la cathédrale d’Evry de Mario Botta ouverte au culte en 1995, Notre-Dame-des-Missions à Epinay-sur-Seine conçue pour l’Exposition coloniale de Paris (1931) et reconstruite deux ans plus tard dans cette commune, l’église Stella matutina à Saint-Cloud (1965).

Un chapitre est consacré aux établissements secondaires et supérieurs qui montrent un intérêt architectural.

Au cœur de la modernité

A partir des années 80, l’archéologie industrielle a mis en valeur le patrimoine francilien dans un contexte de désindustrialisation. Les implantations en banlieue marquent les paysages, tels les Grands moulins de Corbeil ou de Pantin. L’heure est plutôt à la requalification (galeries d’art et lieux de spectacles) de ces vestiges industriels. Au bord de la Marne, à Noisiel, l’ancienne chocolaterie Menier est célèbre.

Le chapitre « La banlieue, laboratoire d’architecture » donne à voir la variété des ensembles résidentiels : du modèle philanthropique des cités-jardins, en passant aux grands ensembles, jusqu’aux villes nouvelles. Ces programmes ont œuvré pour un urbanisme renouvelé au gré des conjonctures.

A recommander, chez le même éditeur, une remarquable synthèse sur les cités-jardins, parue en 2018. Avec la même qualité éditoriale, et dans un même souci de promotion et de valorisation, elle propose un itinéraire plutôt exhaustif à travers un patrimoine urbanistique de l’Ile-de-France qui a marqué l’entre-deux-guerres.

Les derniers chapitres sont consacrés au patrimoine lié aux réseaux de transport et aux équipements sportifs. Les évolutions techniques répondent aux enjeux démographiques et socio-économiques de l’agglomération parisienne au fil des décennies, des infrastructures de l’ère industrielle (batellerie, chemin de fer) aux projets du Grand Paris (développement du tramway). Ponts, canaux, barrages, autoroutes ponctuent le paysage.
L’Ile-de-France représente un des berceaux de la conquête de l’air. Elle est au cœur du secteur aéronautique français naissant, depuis le « premier vol habité » (coq, mouton et canard) en montgolfière, le 17 septembre 1783 à Versailles, sous les yeux de Louis XVI. En 1927, Le Bourget accueille triomphalement Charles Lindbergh qui a réalisé le premier vol transatlantique en solitaire.

Invitation au voyage ou à la découverte pour les uns, souvenirs d’une expérience francilienne pour les autres, ce bel album de photographies donnera l’envie d’explorer à nouveau toutes les richesses patrimoniales de l’Ile-de-France, partagées quotidiennement par des millions de personnes.