Anne Steiner est maître de conférences au département de sociologie de l’Université de Nanterre de 1990 à 2020. Elle est l’autrice d’une thèse sur la Fraction armée rouge. Depuis vingt ans, elle explore les luttes sociales à la Belle Époque. Ce livre est une version revue et augmentée de la version de 2015. Cette nouvelle version intègre deux épisodes importants du mouvement ouvrier de la Belle Époque. L’ouvrage propose donc la reproduction de nombreuses cartes postales.
Les luttes sociales en cartes postales
Les premières années du XXème siècle ont été des années de turbulences sociales avec une multiplication et une intensification des grèves et des mouvements de protestation sur l’ensemble du territoire. Cela se constate dans tous les secteurs d’activité et s’inscrit dans un moment où se dessinait un nouveau paysage politique et syndical. Il y a eu 830 grèves en 1905 et 1309 l’année suivante. La Belle Époque correspond à l’âge d’or de la grève, elle correspond aussi à l’âge d’or de la carte postale. Le grand avantage des éditeurs locaux est d’être présents sur les lieux avant même que la presse nationale ne se fasse l’écho des évènements. Ces cartes postales ont participé à l’entretien de leur mémoire.
L’organisation du livre
L’ouvrage évoque onze épisodes de lutte sociale de 1905 à 1911, sous forme de récits illustrés par des cartes postales. L’ouvrage présente aussi le contexte d’apparition de chacune de ces luttes, leur déroulement, leurs protagonistes et enfin leur dénouement et leurs éventuels prolongements. A la fin de chaque chapitre, un focus présente une brève synthèse d’un thème transversal aux différents récits. Une chronologie détaillée en fin d’ouvrage permet de mettre en regard ces évènements avec l’ensemble du contexte politique et social de l’époque.
Tour de France des grèves et mouvements sociaux
La première entrée est consacrée à Limoges en 1905 puis la révolte en pays noir de 1906 dans le Nord-Pas-de-Calais est abordée. La même année a lieu la jacquerie picarde dans la Somme. A défaut d’avoir été victorieuse, la grève avait mis fin à la magistrature patriarcale exercée par un industriel campagnard. Le lecteur navigue ensuite entre Nantes en 1907 ou la révolte des viticulteurs la même année. L’insurrection des boutonniers de l’Oise en 1909 est peut-être moins connue. L’année suivante ce sont les cheminots qui se mettent en grève. Ce mouvement, qui était le premier à concerner l’ensemble des réseaux et toutes les catégories de personnel, permit le rapprochement du syndicat national et de la Fédération des mécaniciens et chauffeurs.
Les focus
Les différents thèmes traités commencent par les femmes au travail. 37 % des travailleurs de l’industrie sont alors des femmes, prioritairement dans les secteurs de l’habillement et du textile. Il y a aussi un rapide portrait de Benoit Broutchoux, un syndicaliste, gouailleur, insolent et drôle. Gabrielle Petit incarne elle la figure d’une infatigable propagandiste. C’est ensuite la question de la violence qui est abordée puis celle de la solidarité mais aussi le sabotage. Il appartient au répertoire d’action du syndicalisme révolutionnaire. L’exercice concret de la solidarité ouvrière fait émerger une véritable conscience de classe. L’armée a joué un rôle important dans la guerre sociale et un autre focus est consacré à Clémenceau. On lira également une synthèse sur les grèves de femmes qui participaient peu aux syndicats. Le dernier point traite des luttes paysannes. Au début des année 1900, c’est toujours la petite propriété qui domine en France où 75 % des exploitations ne dépassent pas 5 hectares en moyenne.
Cet ouvrage peut donc servir dans le cadre du programme de première d’histoire en tronc commun, notamment dans le thème 3 sur les permanences et mutations de la société française.