Les actes du colloque « Communautés, Métropoles et Santé » d’Orléans (9-10 novembre 2022)

Début septembre 2023, dans leur collection « Droit public », les éditions « mare & martin » ont publié le présent ouvrage issu du colloque « Communautés, Métropoles et Santé. Vers un renouvellement des acteurs et politiques publiques locales en santé ? », qui s’est tenu à l’Hôtel Dupanloup à Orléans, les 9 et 10 novembre 2022. Sous la co-direction de Fouad Eddazi (Maître de conférences en droit public et membre du Centre de recherche juridique -CRJ- Pothier à l’université d’Orléans), Sylvain Dournel (Docteur en géographie et aménagement, et chercheur contractuel au Centre d’études pour le développement des territoires et l’environnement à l’université d’Orléans), Pierre Allorant (Professeur d’Histoire du droit, doyen de la faculté de droit, économie et gestion de l’université d’Orléans) et Franck Guérit (Maître de conférences en géographie et aménagement et membre du Centre d’études pour le développement des territoires et l’environnement à l’université d’Orléans), cet ouvrage est la publication de 26 communications émanant de 34 auteurs.

L’intercommunalité peut-elle devenir un acteur déterminant du système de santé ? La crise des acteurs traditionnels est désormais bien connue : pénurie de praticiens en médecine libérale dans certains secteurs ; manque d’attractivité pour l’hôpital public ; difficultés des ARS (Agences Régionales de Santé) à organiser une offre de soins équilibrée, etc. Les groupements de communes, dotés de moyens et de compétences non négligeables recoupant le champ large de la santé, et couvrant la quasi-totalité du territoire national, peuvent potentiellement jouer un rôle bénéfique en la matière. Cumulant proximité, ingénierie et ressources, à la différence des communes prises individuellement, leurs apports réels en matière de santé méritent d’être identifiés et mesurés, pour en penser la valeur ajoutée et les lacunes. Outre le sommaire (p. 7-10), la liste des auteurs (p. 11-12), les remerciements (p. 13), les préfaces (p. 15-36), l’ouvrage comporte 3 parties, 5 chapitres, 26 articles, une conclusion générale (p. 429-436) et, enfin, une table des matières (p. 437-449).

PRÉFACES

            L’ouvrage commence avec deux préfaces. La première (p. 17-22), rédigée par Hélène Peskine (Architecte urbaniste générale de l’Etat & Secrétaire permanente du Plan urbanisme construction architecture) et intitulée Un ouvrage dans l’esprit du programme national « POPSU Métropoles », explique ce qu’est le programme national « POPSU Métropoles » de recherche-action d’une durée de 4 ans (2018-2022) entre l’État et 15 métropoles s’étant adressé à ces dernières ainsi qu’à 36 petites villes françaises ; ce programme a permis de créer des liens et de produire des connaissances sur les relations entre grandes villes (métropoles) et ruralités.

            La seconde préface est un préambule (p. 23-30) à l’ouvrage, écrit par Marie-Christine Jaillet (Directrice de recherche au CNRS & Responsable scientifique du programme POPSU Métropoles), qui présente le colloque dont est issu le présent ouvrage. Ce programme de recherche-action POPSU Métropoles  associe 15 plateformes de recherche et autant de métropoles françaises qui sont toutes des intercommunalités, à l’exception notable de Lyon qui est devenue une collectivité à part entière. Chaque plateforme de recherche est constituée, dans chacune des 15 métropoles, d’une équipe de recherche pluridisciplinaire (enseignants-chercheurs, représentants des services de la métropole, élus métropolitains, parfois élus péri-métropolitains représentant par exemple des agences d’urbanisme). Seule, la plateforme orléanaise (organisatrice du colloque) a choisi la question de la santé afin de répondre au sous-équipement notoire du  territoire orléanais en matière de santé caractérisé par un déficit de médecins, généralistes et spécialistes, qui questionne la qualité de l’offre de soins à disposition des habitants du Loiret (absence de CHU à Orléans, par exemple !).

INTRODUCTION

            Dans son introduction (p. 31-36), Franck Guérit définit l’objet de cet ouvrage qui aborde la place de l’action publique locale dans les politiques de santé, sous l’angle de l’intercommunalité française, en tant qu’acteur, tend à jouer un rôle important, non seulement par rapport aux acteurs institutionnels tels que l’État, mais aussi par rapport à la commune, l’acteur initial des collectivités locales.

            Fruit d’un colloque interdisciplinaire réunissant juristes, historiens du droit et de la santé, géographes, gestionnaires, médecins et aménageurs, cet ouvrage s’organise en trois grandes questions qui le structure en autant de parties.

 L’ÉMERGENCE D’UN NOUVEL ACTEUR EN MATIÈRE DE SANTÉ : L’INTERCOMMUNALITÉ

            Dotée de 33 pages, cette première partie (p. 37-70) est la plus courte du livre et elle s’attache à la croissance de la place de l’intercommunalité dans les politiques locales de santé : trois contributions structurent une mise en perspective sur plus d’un siècle, d’hier à demain, de cette montée en puissance avec les communications de Pierre Belda (Maître de conférences en histoire du droit, CRJ Pothier, Université d’Orléans) portant sur « La loi du 15 février 1902 relative à la santé publique : Une compétence communale discutée » (p. 39-52), de Benoît Apollis (Maître de conférences en droit public à l’université Paris-Panthéon-Assas) sur « L’intercommunalité et la santé : regards croisés entre code général des collectivités territoriales et code de la santé publique » (p. 53-62) et, enfin, celle des Intercommunalités de France (fédération nationale des élus de l’intercommunalité) sur « Pour une responsabilité territoriale des acteurs de la santé » (p. 63-70).

PANORAMA IMPRESSIONNISTE DES INTERVENTIONS INTERCOMMUNALES EN MATIÈRE DE SANTÉ

            Longue de 129 pages, la deuxième partie (p. 71-200) est composée de deux chapitres : « Une approche des actions intercommunales par les instruments » (p. 73-124) et « Une approche des actions intercommunales par les politiques » (p. 125-200) constituées respectivement de 4 et 5 articles, soit 9 au total. Elle nous révèle un paysage de l’intercommunalité de la santé, dans une perspective impressionniste soulignant à la fois la singularité, mais aussi le caractère parfois éphémère de l’expérience. Neuf articles y abordent les instruments (p. 73-124) et les politiques (p. 125-200) mises en œuvre, à la fois dans le champ de l’offre de soins (Nolwenn Duclos, Guillaume Chevillard et Guillaume Rousset), des politiques de prévention (Fouad Eddazi, Nadia Arab), de l’action sociale (François Priet) comme de l’urbanisme stratégique (Corinne Manson, Sylvain Dournel & Émilie Charpentier, Corinne Rochette & Milhan Chaze).

Une approche des actions intercommunales par les instruments

– Nolwenn Duclos (Docteur en droit public, enseignante-chercheuse contractuelle à l’Université d’Orléans – CRJ Pothier EA 1212) « Le contrat local de santé métropolitain : entre recherche d’efficience et risque de concurrence des démarches territoriales de santé » (p. 75-88) ;

– Corinne Manson (Professeure en droit public, Université de Tours, IRJI François Rabelais) « Le PLU métropolitain, outil de développement d’une offre de santé ? » (p. 89-102) ;

– Guillaume Chevillard (Docteur en géographie, Chargé de recherche à l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé) « L’intercommunalité, initiatrice et bénéficiaire d’instruments face à la désertification médicale » (p. 103-116) ;

– Guillaume Rousset (Maître de conférences en droit, HDR, Université de Lyon 3 – IFROSS/CRDMS) « Lutter contre les inégalités territoriales de santé, des outils échappant aux métropoles ? » (p. 117-124).

Une approche des actions intercommunales par les politiques

– Fouad Eddazi (Maître de conférences en histoire du droit, CRJ Pothier, Université d’Orléans) « Intercommunalité et médecine préventive » (p. 127-138) ;

– François Priet (Professeur émérite de l’Université d’Orléans, CRJ Pothier EA 1212) « L’action sociale et l’intercommunalité » (p. 139-152) ;

– Nadia Arab (Professeure des Universités, Université Paris-Est Créteil, LAB’URBA) « Agir par les métiers pour transformer l’écosystème de prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées et du maintien à domicile. Une expérimentation de Grand Lyon Métropole » (p. 153-166) ;

– Sylvain Dournel (Docteur en géographie et aménagement, ingénieur de recherche à l’université d’Orléans – CEDETE EA 1210), Émilie Charpentier (Docteur en droit public à l’Université d’Orléans, CRJ Pothier EA 1212) « Trajectoire des planifications urbaines d’Orléans Métropole en matière de qualité de vie » (p. 167-182) ;

– Corinne Rochette (Professeure des Universités, Université Clermont-Auvergne ; Chaire Santé et Territoires ; Clermont Recherche Management), Milhan Chaze (Ingénieur de recherche ; ; Chaire de recherche Santé et Territoires, UMR Territoires) « Intercommunalité, mobilité et santé, l’intérêt du diagnostic partagé entre acteurs : le cas d’un établissement public de coopération intercommunale » (p. 183-200).

LA GOUVERNANCE INTERCOMMUNALE DES QUESTIONS DE SANTÉ

La troisième partie (p. 201-428) est composée de trois chapitres : « Les techniques de gouvernance » (p. 203-286), « Une gouvernance intercommunale à intégrer dans le système des valeurs » (p. 287-352) et « Défis et différenciations des gouvernances » (p. 353-428) constituées respectivement de 5 puis 4 et 5 articles, soit 14 au total. Cette troisième et dernière partie questionne la gouvernance de la santé via l’acteur intercommunal.

 Les techniques de gouvernance

Le chapitre 1 (p. 203-286) présente les techniques qui s’y développent, entre logique d’ingénierie, solidarité et attractivité territoriales, avec les cinq contributions de :

– Sandrine Cueille (Maître de conférences en sciences de gestion et du management à l’Université à Pau et des Pays de l’Adour – LiREM, E2S-UPPA), Pauline Dubois (Directrice des Solidarités et de la Santé, Communauté d’agglomération Pau Béarn Pyrénées, Présidente de l’Association des cadres territoriaux de l’action sociale – ACTAS) « Le développement de « compétences santé » par les villes et intercommunalités. Quel mode de gouvernance pour les Contrats locaux de santé (CLS) ? » (p. 205-220)

– Julien Thomas (Maître de conférences en droit public à l’Université d’Orléans, CRJ Pothier) « Le contrat de réciprocité comme instrument de pilotage des politiques de santé ? » (p. 221-234)

– Concetta Pennuto (Professeure en histoire des sciences à l’Université de Tours) « L’enjeu de la maîtrise des données de santé. Un exemple de topographie médicale au XIXe siècle : Joseph-Charles Lebrun, médecin au Mans » (p. 235-252)

– Agathe Fontenelle (Professeure en histoire des sciences à l’Université de Tours) « L’intercommunalité et l’expertise en santé publique » (p. 253-268)

– Christophe Alaux (Professeure des Universités, Aix-Marseille Université, Chaire Attractivité et Nouveau Marketing Territorial, Centre d’Études et de Recherche en Gestion d’Aix-Marseille), Laura Carmouze (Maître de conférences, Aix-Marseille Université, Chaire Attractivité et Nouveau Marketing Territorial, Centre d’Études et de Recherche en Gestion d’Aix-Marseille) et Corinne Rochette (Professeure des Universités, Université Clermont-Auvergne ; Chaire Santé et Territoires ; Clermont Recherche Management) « Démarches d’attractivité des métropoles en matière de santé et bien-être » (p. 269-286)

Une gouvernance intercommunale à intégrer dans le système des valeurs

            En 65 pages, le chapitre 2 (p. 287-352) montre l’impact de l’intercommunalité dans le système local des acteurs de santé, le renforçant dans son rôle de proximité et dans le processus de décentralisation de la santé avec les quatre articles de :

– Vincent Vioujas (Directeur d’hôpital, chargé d’enseignement à la Faculté de droit et de sciences politiques d’Aix-en-Provence – AMU -, chercheur associé UMR 7268 ADES – AMU/EFS/CNRS) « La place de l’intercommunalité dans la gouvernance des établissements publics de santé » (p. 289-302)

– Mathieu Touzeil-Divina (Professeur de droit public à l’Université Toulouse Capitole) « L’hôpital de proximité, des actions sociales & intercommunales aux labels & services publics nationaux » (p. 303-328)

– Florence Lerique (Professeure de droit public à l’Université Bordeaux Montaigne, Institut Léon Duguit) « La métropolisation des contrats locaux de santé, une décentralisation qui ne dit pas son nom » (p. 329-338)

– Yann Bourgueil (Médecin spécialisé en santé publique, Chaire Santé Publique, Sciences Po Paris) « L’intégration de l’intercommunalité dans le système des soins de proximité » (p. 339-352)

 Défis et différenciations des gouvernances

            Enfin, en 75 pages, le chapitre 3 (p. 353-428) pose les défis que doit relever l’acteur intercommunal, dans sa capacité à se différencier et à proposer un modèle alternatif de gouvernance, avec les cinq interventions de :

– Émilie Marcovici (Maître de conférences en droit – Université Jean Moulin Lyon 3) « Les métropoles peuvent-elles se différencier des autres intercommunalités concernant la santé ? » (p. 355-368) ;

– Nicolas Robert (Ancien directeur général des services de la communauté de communes Chablis Villages et Terroirs, Maire d’Athie dans l’Yonne) « L’intercommunalité rurale, pilote de la politique territoriale de santé » (p. 369-382) ;

– Jean-Christophe Cervantès (ATER – Doctorant en droit public, Université Clermont-Auvergne – École de droit, Centre Michel de l’Hospital – EA 4232) « Intercommunalité et subsidiarité en matière de santé » (p. 383-398)

– Nathalie Dubost (Professeure en sciences de gestion, laboratoire VALLOREM, Université d’Orléans) « Comment penser la performance de la gouvernance collaborative pour améliorer l’accès de soins ? Une (re)lecture stratégique du modèle de Ansell et Gash » (p. 399-414) ;

– Martine Long (Maître de conférences HDR en droit public à l’Université d’Angers) « La crise sanitaire : frein ou accélérateur de l’émergence intercommunale en matière de santé ? » (p. 415-428).

CONCLUSION

La Santé par la coopération intercommunale : la panacée ?

            À Pierre Allorant est revenue le redoutable privilège d’écrire la conclusion (p. 429-436) de l’ouvrage et de faire la synthèse des 26 communications. Comme le rappelle Pierre Allorant, le colloque avait pour mission d’offrir « un vaste panel d’expériences innovantes sur le territoire français en matière de coopération intercommunale dans le domaine de la santé, des 22 métropoles à de plus modestes communautés de communes rurales. La richesse du tableau s’accompagne d’une grande pluralité d’approches des phénomènes, où presque toutes les sciences sociales ont été mobilisées, dans une complémentarité parfois associée au sein même communication » (p. 429) (ainsi droit public et aménagement dans la communication de Sylvain Dournel & Émilie Charpentier). De plus, les chercheurs de la plateforme orléanaise ont souhaité élargir leur réflexion et la confronter à d’autres travaux menés sur d’autres intercommunalités, grâce à une comparaison des initiatives prises à la Métropole de Lyon (Nadia Arab), en passant par les hôpitaux de proximité et les intercommunalités rurales dans l’Yonne (Nicolas Robert), et même un regard comparé international sur les politiques de Gand en Belgique flamande et à Vancouver au Canada anglophone (Christophe Alaux, Laura Carmouze et Corinne Rochette).

            Concernant les 22 autres interventions, Pierre Allorant les a regroupées en 6 points :

  • Hygiène et urbanisme : les interactions des municipalités et de l’administration préfectorale :

La pandémie mondiale de Covid-19, aux effets sur l’intercommunalité étudié par Martine Long, a remis au premier plan le duo classique d’acteurs publics : le maire et le préfet ; Pierre Belda montre que l’intérêt des pouvoirs publics pour l’hygiène remonte aux travaux des grands médecins des Lumières sur la vaccination comme l’atteste les travaux de topographie médicale au XIXe siècle de l’hygiéniste manceau Joseph-Charles Le Brun, présentés par Concetta Pennuto ;

  • Hôpital de proximité et accès aux soins :

Le professeur toulousain Mathieu Touzeil-Divina a montré pourquoi « l’hôpital de proximité est à la santé ce que la pédagogie est à l’Université : un idéal et parfois un label sinon un mythe plus qu’une réalité ». De même, Vincent Vioujas montre clairement l’intégration progressive des EPCI dans la gouvernance hospitalière. Cette responsabilité nouvelle, assumée par Intercommunalités de France (l’ADCF) devra faire la part entre l’exigence d’expertise en santé publique, peu accessible dans le cadre communal (Agathe Fontenelle) et le désir de subsidiarité, indispensable à la proximité (Jean-Christophe Cervantès), le tout dans le respect du cadre légal et réglementaire, à l’interface du code général des collectivités territoriales et du code de la santé publique (Benoît Apollis) ;

  • Les outils délimités de la coopération intercommunale :

Plusieurs intervenants ont revisité les outils de coopération intercommunale du Contrat Local de Santé (Sandrine Cueille et Pauline Dubois, Florence Lerique parfois métropolitain (Nolwenn Duclos), à la Communauté Professionnelle Territoriale de Santé, en passant par le recours des élus à la création des Maisons de Santé Pluridisciplinaires, parfois vues par les intercommunalités comme remède miracle à la pénurie de professionnels de soin, avec la télémédecine comme palliatif à l’enclavement, posant la question de la mobilité (Corinne Rochette et Milhan Chaze). La place des élus communautaires dans la gouvernance du service public de soins demeure marginale, peu étendue par les lois successives jusqu’à la récente loi 3DS ouvrant l’expérimentation et la différenciation territoriales (Émilie Marcovici). Guillaume Chevillard et Guillaume Rousset montrent bien que l’intercommunalité ne dispose pas de tous les outils utiles pour lutter contre les inégalités territoriales de santé mais l’essor des MSP dans les marges rurales et les espaces périurbains sous-dotés a favorisé l’installation de jeunes médecins désireux d’une pratique en équipe pluridisciplinaire ;

  • Accès aux soins et déterminants de la « santé bien-être » :

À cette aune, les documents d’urbanisme tiennent une place majeure comme instrument d’intervention environnementale et de planification urbaine (Corinne Manson), en particulier les PLU intercommunaux qui envisagent habitat, logement, déplacements, pollution, risques et pèsent pour les 4/5e de la santé d’un habitant. Cette approche globale de la santé permet d’échapper aux contraintes d’une offre de soins structurellement déficitaire, d’où des effets négatifs évidents. Par exemple, la médecine de prévention, scolaire, du travail, universitaire et potentiellement intercommunale (Fouad Eddazi) demeure le parent pauvre du système français, encore trop hospitalo-centré et curatif. Comme alternative, le sport-santé apparaît en plein développement au moment où explosent obésité, diabète et maladies liées à l’excès de sédentarité, singulièrement chez les jeunes (70% des adultes, 90% des enfants), rendant indispensable l’articulation avec le projet alimentaire, le plan de déplacement, le projet éducatif, pour une qualité de vie durable. C’est ainsi que l’action sociale intercommunale apparaît comme une perspective prometteuse pour rechercher l’amélioration de la santé des personnes, par-delà la seule offre de soins (François Priet).

L’objectif de « ville hospitalière », avec les modèles étrangers de Gand et de Vancouver, s’impose désormais au détriment de la trop fameuse « attractivité » et d’un marketing territorial qui ne saurait se limiter à des slogans publicitaires. Instrument prometteur de solidarité ville-campagne, par exemple entre la métropole de Tours et les intercommunalités d’Indre-et-Loire, le contrat de réciprocité (Julien Thomas) laisse encore sur leur faim les acteurs des territoires, tel le président de Loches Sud Touraine, porteur d’un témoignage significatif dans un département d’Indre-et-Loire pourtant doté d’un CHU : Gérard Hénault ne voit guère venir de solidarité concrète, sans doute faute d’un vivier suffisant de professionnels apte à satisfaire une « gouvernance collaborative » (Nathalie Dubost).

Titulaire de la chaire de Santé publique à Sciences Po, le docteur Yann Bourgueil a ausculté l’intégration de l’intercommunalité dans le système des soins de proximité, rappelant l’excellence du modèle établi à la Libération, puis les performances du système dual pensé par Robert et Michel Debré en 1958, CHU/médecine libérale ambulatoire, cette organisation ne fournissant plus la réponse au vieillissement et à la pénurie de professionnels et de moyens ;

  • De « La métropole et les autres » aux transitions avec les autres intercommunalités

Dès l’ouverture, l’importance de la question et des travaux de cette recherche avait été marquée par la présence en soutien de la Présidente du programme national, la sociologue Marie-Christine Milet, vice-présidente de l’université de Toulouse, de l’Architecte urbaniste en chef de l’État Hélène Peskine, secrétaire permanente du Plan urbanisme construction architecture, du Premier Maire Adjoint d’Orléans Florent Montillot et du Président de l’université, Éric Blond. Tous ont relevé l’originalité de cette focalisation des acteurs du territoire sur l’accès aux soins et ses choquantes inégalités sociales et territoriales, et le caractère totalement inédit de l’impact d’une publication’ qui a abouti sur le bureau de l’ancien premier ministre Jean Castex, contribuant, avec « l’union sacrée » des élus régionaux et de la société civile (CESER) à une décision politique majeure : la première création en métropole d’un CHU et d’une faculté de médecine depuis 1976, réalisée entre fin février et le 1 septembre 2022 ;

  • Quelle offre de santé demain pour les habitants des intercommunalités ? 

Selon Pierre Allorant, « les conclusions du CNR Santé, lancé en octobre 2022 par le ministre de la Santé, sur fond d’interrogation concernant l’ampleur et les conséquences du supposé « Exode urbain » post-covid, croiseront-elles les pistes de nouvelle vague de décentralisation évoquées comme chantier institutionnel du quinquennat ? Les premiers axes qui s’en dégagent, en parallèle d’une possible reconfiguration des quatre méga-régions, consisterait à simplifier les strates territoriales en clarifiant les compétences autour de trois blocs : « la proximité pour les communes et leurs regroupements (qui partagent les mêmes élus) ; le développement territorial et la solidarité pour le duo départements-régions ; le bloc régalien (État et Union Européenne) ». Au surplus, les territoires les plus denses et urbanisés, métropoles et communautés d’agglomération pourraient perdre le cadre départemental, réduisant d’un quart les 101 départements français, réservés aux mises en articulation des campagnes et des communautés de communes. Dans ces hypothèses, l’action publique en santé emprunterait-elle d’autres voies ? » (p. 435).

Toujours d’après Pierre Allorant, « Toutefois, combiné à l’ancrage territorial renforcé de la formation des professionnels de santé, ancien et soutenu par les régions dans le cadre des Instituts de Formation aux Soins Infirmiers (IFSI), cette reconfiguration ne risquerait-elle pas d’accréditer et d’entériner une gradation de la qualité de soins en fonction du périmètre d’influence des agglomérations urbaines ? Aux métropoles, l’exclusivité des CHU et de leur cortège de médecins spécialistes y compris en clinique et libéral, à leur périphérie proche, les généralistes, aux communautés de communes de la ruralité, l’hospitalisation des personnes âgées et la résurgence des « officiers de santé » avec les Infirmières de Pratiques Avancées (IPA) en accès direct ? » (p. 435).

Dans le foisonnement des 26 communications, il en ressort que les outils de l’intercommunalité (interventions et planifications, environnementales et d’urbanisme, documents d’urbanisme) constituent des leviers majeurs pour agir concrètement et améliorer les déterminants de la santé, l’environnement dans lequel vivent les habitants des villes, des zones péri-urbaines et des campagnes, sans soucier des délimitations communales.