Comprendre le conflit israélo palestinien : voilà bien une question et une préoccupation qui reviennent souvent auprès de nos élèves. Les programmes scolaires témoignent d’ailleurs de la volonté d’inclure des éclairages sur cette question. On peut citer le programme de terminale qui consacre un temps d’étude sur le « Proche et Moyen orient, un foyer de conflits ».

Guider le lecteur

Le projet est donc clair :  » ce livre a été écrit pour aider à comprendre, pour expliquer les faits, les dates, les hommes, les mots, les régions. Il se veut le plus simple et le plus complet possible ». Le public collégiens et lycéens est aussi clairement désigné à la fin de l’introduction, mais il inclut aussi toutes les personnes qui veulent comprendre.
Gérard Dhôtel s’y attelle donc en 25 chapitres. Il est déjà l’auteur de documentaires pour la jeunesse. Un certain nombre de petits encarts figurent dans les chapitres autour d’une question ou pour préciser du vocabulaire, un homme ou un événement. Pour donner à comprendre l’auteur choisit donc une structure découpée en 25 chapitres sans aucun rassemblement en grandes parties. Très souvent dans le livre des points sont faits comme page 112 sur la bande de Gaza. Le jeune lecteur apprendra beaucoup avec ces pastilles. Remarquons également une rapide bibliographie mais sans aucune référence internet !

Peut-on être objectif ?

De façon plus étonnante, on lira pourtant de la part de l’auteur dans l’introduction que ce livre  » ne peut être ni neutre, ni objectif car souvent les faits historiques eux mêmes sont sujets à diverses interprétations « . Prenons plutôt cette déclaration comme une manière de souligner que la question n’est pas simple. Gérard Dhôtel dédie son livre à Ouzi Dekel. Il est peut-être bon de dire de qui il s’agit. Après une brève mission militaire à Gaza, Ouzi Dekel, natif d’un kibboutz, a refusé de servir dans les territoires palestiniens occupés. Son objection lui a valu d’être incarcéré dans une prison militaire israélienne. C’est un militant des mouvements de solidarité avec le peuple palestinien et un des fondateurs du mouvement  » Yesh Gvoul « , regroupant les soldats israéliens refusant de servir dans les territoires occupés. Il est l’auteur des tagueurs de Jabalya en 2001.

Partis pris graphiques

Chaque chapitre commence par un titre et un sous-titre. Quelques lignes dans une autre police et couleur concluent le chapitre. Il faut souligner quelques partis pris de l’ouvrage qui pourront décontenancer. Tout d’abord la place faite aux photographies, ici celles de Rina Castelnuevo. Chacune d’elles contient un rapide commentaire en trois lignes. Elles sont toutes en noir et blanc. Signalons ce site internet pour découvrir d’autres clichés de la même photographe. http://www.andreameislin.com/artists/rina-castelnuovo/
Ensuite, il faut signaler le choix cartographique qui lui, est plus discutable : les cartes ne sont pas classiques dans les couleurs utilisées et peuvent parfois être difficiles à lire comme celle de la page 63 sur la crise de Suez. La carte de la page 89 consacrée à la guerre du Liban se révèle aussi délicate à utiliser car de nombreuses informations cartographiées ne sont pas reprises dans le texte du chapitre.
La carte de la vieille ville de Jérusalem page 119 ne comprend aucune échelle : on se rend certes compte de l’espace concerné grâce à une photographie page 115, mais c’est insuffisant. C’est tout de même une dimension essentielle du conflit.

Un conflit à inscrire dans l’histoire

Trois pages récapitulent tout d’abord un certain nombre de dates auxquelles on pourra se référer. Gérard Dhôtel choisit d’inscrire la question israélo-palestinienne sur un temps long. Il rappelle en quelques pages, très synthétiques, des points de base comme « l’histoire du judaïsme », « d’où viennent les Palestiniens » ou « qu’est-ce que le sionisme ? « . C’est certes rapide mais l’essentiel est dit. Sur la question du sionisme, il rappelle l’antisémitisme en Europe à la fin du XIXème siècle et comment se développe l’idée d’un Etat juif en évoquant évidemment le rôle de Théodor Herzl. L’essentiel de l’ouvrage se consacre à la période de 1947 à aujourd’hui. Les événements attendus sont évoqués comme la guerre du Kippour. D’autres chapitres abordent la question de la résistance palestinienne ou les accords d’Oslo.

Une question aux dimensions internationales

L’auteur met bien en évidence les dimensions internationales de la question notamment page 48 avec la naissance de l’état d’Israël. Les Etats Unis et l’URSS reconnaissent ce nouveau pays. Ce n’est pas le cas de cinq pays arabes ce qui provoque le premier conflit en 1948. Il évoque d’autres épisodes comme Suez avec les raisons du conflit, le déroulé et les conséquences. Il évoque aussi la résistance palestinienne qui prend des formes extrêmes avec la prise d’otages de Munich. La guerre au Liban est évoquée ainsi que les massacres de Sabra et Chatila en 1982. Un chapitre est uniquement consacré aux colonies et fait bien le point sur cette situation très particulière.

Où en est-on et où va-t-on ?

L’ouvrage se termine par quelques propositions de scénarios pour le futur. C’est certes rapide, mais permet utilement de rassembler plusieurs faits et de redire quelques fractures pour l’instant irréconciliables : la question des colonies, celle des réfugiés et celle du statut de Jérusalem. Aux pages 132 et 133, on lira de très utiles pages sur « Où en est Israël aujourd’hui ? » avec la question de la nationalité, et en parlant par exemple des droits restreints pour les Arabes d’Israël. Un panorama du paysage politique aide à comprendre les fractures actuelles de la société israélienne.

Le pari est-il tenu ? Indéniablement oui, car en moins de 150 pages beaucoup d’aspects sont abordés. On sera plus réticent sur les choix cartographiques, mais si tout à chacun connaissait le contenu de ce livre, la question israélo-palestinienne paraitrait moins obscure à beaucoup.

© Jean-Pierre Costille, Clionautes.