Les premiers pas de Joseph Kessel en Orient
Disparu en 1979, Joseph Kessel est l’une des grandes figures de la littérature au XXe siècle. De la Russie à l’Ethiopie, des tripots chinois aux aérodromes de l’Aéropostale, en passant par l’Afghanistan qu’il aimait tant, la vie de Kessel est une véritable ode à l’aventure. Tour à tour soldat, écrivain ou reporter, il parcourt le globe à la recherche de personnages hauts en couleur, avec une sensibilité particulière pour ceux que la vie n’a pas épargné.
L’adaptation de son parcours sous la forme d’un roman graphique a été réalisée par l’artiste Jörg Mailliet et le journaliste Cyrille Charpentier. Après un premier galon d’essai dans la revue XXI, le duo retrace les premières années de Joseph Kessel en Orient puis en Afrique dans ce premier tome. En 1918, Kessel embarque en direction des Etats-Unis, puis de l’Extrême-Orient russe.
Quand Joseph Kessel embarque pour Vladivostok sur le Ulysses S. Grant au matin du 11 novembre 1918, il n’en est pas à sa première traversée d’un océan. Il ne garde que peu de souvenirs du premier voyage qui mena sa famille de la pampa argentine aux steppes d’Asie centrale, le début pour lui d’une (très) longue série. Son père, Samuel Kessel, était originaire de Lituanie, alors annexée à la Russie tsariste. Rêvant de devenir médecin, il avait dû batailler contre les los interdisant aux Juif l’accès à l’administration et à l’université. […] En lien avec la famille Rothschild, Samuel Kessel a accepté de rejoindre une colonie juive fondée par le baron en Argentine. C’est dans la petite bourgade de Villa Clara que naît en 1898 le premier enfant de Samuel et Raïssa, Joseph. [..] Joseph grandit sur les rives de l’Oural, de 1905 à 1908. Puis la famille Kessel s’établit définitivement en France, d’abord à Nice, où vit une importante communauté russe, et enfin à Paris. A 16 ans, Joseph Kessel a ainsi traversé le monde de part en part, ce qui a peut être initié chez lui ce goût immodéré de l’aventure qui ne le quittera jamais.
Kessel – La naissance du lion, Les Arènes, 2022, page 8.
En mentant sur son âge, Kessel entre dans l’armée de l’air à 17 ans, puis rejoint les volontaires français désirant soutenir l’armée blanche dans une Russie qui se remet à peine de la Révolution de 1917. A Vladivostok, il travaille avec la Légion Tchèque. Ne pouvant rentrant en Tchécoslovaquie (page 113), ces soldats tchèques ont suivi la ligne du Transsibérien jusqu’à l’Océan Pacifique. Parlant couramment la langue russe, Kessel devient alors le logisticien en charge du transport de munitions vers l’Ouest. Il découvre ainsi le fonctionnement de la gare de fret, où les pots-de-vin sont un atout pour réquisitionner des wagons souvent occupés par des réfugiés de la guerre civile. A son retour, il publie un roman nommé « les temps sauvages ».
En 1930, le journal Le Matin lui a donné « carte blanche et un budget illimité » (page 127). Sa mission ? Raconter la vie des derniers trafiquants d’esclaves de la Corne de l’Afrique. Quatre ans plus tôt, le négus a officiellement interdit l’esclavage en signant la Convention relative à l’esclavage. Mais le trafic existe toujours, de façon discrète. Pour suivre les dernières caravanes traversant l’Ethiopie et la mer Rouge, le reporter suit les conseils d’Henry de Monfreid, un contrebandier qui vend des armes et du hashish. Il parvient ainsi à suivre la caravane de Saïd, un marchand d’esclaves.
Source : Extrait tiré du livre « Kessel – La naissance du lion » publié chez Glénat, 2022, page 9
En conclusion, ce premier tome retrace les premières aventures de Kessel de 1917 au début des années 1930. Par un trait sobre et une trame narrative prenante, les deux auteurs parviennent à plonger le lecteur dans le tumulte des aventures de l’écrivain-voyageur. Accessible dès le collège, ce tome peut devenir une porte d’entrée pour découvrir les aventures hors du commun et le style inimitable de l’auteur « du Lion ».
Pour aller plus loin :
Antoine BARONNET @ Clionautes