Entre beau-livre et mise au point cartographique de haute volée, La carte de France séduit un large public, du collectionneur à l’enseignant en passant par l’étudiant.

Objet scientifique (la mesure, la métrique) et artisanal (lisibilité, attrait de l’ouvrage), l’histoire de la carte de France concçue par Jean-Luc Arnaud recèle quantité d’évolutions oubliées et de petites révolutions. Le territoire français propose un socle d’étude singulièrement intéressant et Jean-Luc Arnaud, directeur de recherches au CNRS fondateur du site Cartomundi (www.cartomundi.fr), le sonde avec brio, de 1750 à l’arrivée de la numérisation. Au terme de cette somme de 448 pages parées de 630 reproductions qui fera date, le lecteur mesurera tout le poids du sous-titre « histoire et techniques ». En effet, J-L Arnaud déploie une montagne de références au sein des deux parties. Tout d’abord, Deux siècles de production se focalise sur les aspects de la production cartographique, puis Séries, éditions particulières et dérivés, est consacrée à la présentation des documents et organisée série par série, suivant l’ordre chronologique des publications.

Un savoir-faire exceptionnel

Après une mise au point sur le temps long débutée avec l’expérience fondatrice de Cassini, l’auteur propose une vertigineuse seconde partie, mine de cartes parfois insoupçonnables. Ce second temps marie des cartes très variées tant dans leur objet (capacité des ponts routiers, tourisme, fortifications, géologie…) que dans leur échelle, avec des commentaires denses et concis qui autorisent non seulement une rapide contextualisation de ces productions dans le temps, mais aussi des repères dans l’évolution même des techniques cartographiques (couleurs, impressions, pliages…), influencées ou non par les avancées internationales.

Un patrimoine à valoriser….

Fort de ce savoir-faire cartographique exceptionnel développé depuis le XVIIIe siècle, la France constitue un espace à part dans l’histoire de la cartographie planétaire et dispose aujourd’hui d’un imposant patrimoine de relevés aussi scrupuleux que divers et anciens. Traditionnellement peu scruté par la recherche historique au profit de supports plus anciens, l’objet « carte de France contemporaine» intéressera toutefois tant l’historien que le géographe, le sociologue ou l’anthropologue. Une part de ces derniers y apprendra que les cartes de France sont soit des monographies où une seule carte suffit à représenter le territoire hexagonal, ou des séries géographiques, pour lesquelles il faut, selon l’échelle, de deux à des dizaines de cartes afin de représenter ce même territoire. Ainsi, la fameuse Série Bleue IGN ou série géographique de la carte de France au 1:25 000 (1cm carte = 250 m terrain) complète mesure quarante mètres de côté !

.et à diffuser

L’ouvrage souligne par ailleurs que ces richesses cartographiques qui couvrent 250 ans méritent d’autres éclairages et une valorisation publique et/ou privée accrue afin de poursuivre le processus de vulgarisation qui caractérise l’évolution de ce média à part, longtemps apanage du pouvoir et des états-majors. Aujourd’hui et depuis une quinzaine d’années, les cartes sont devenues l’expression non plus d’un dessin mais d’une base de données. Le progrès sans doute.

Les sources convoquent Les Mémorial(s) publiés par le Dépôt de la guerre à partir de 1802, les rapports d’activités du Service géographique de l’armée, de l’Institut géographique national. Mais surtout la cartothèque de l’IGN qui offre pléthore de supports cartographiques, préparatoires ou achevés.

Au total, nous feuilletons autant un beau-livre – cet ouvrage intègre la collection Arts – factuellement irréprochable (impression, couleurs, mise en page) qu’un grand ouvrage de vulgaraisation grâce à l’éditeur marseillais Parenthèses qui confirme ici toute son audace et sa pertinence éditoriales.

La présentation de l’éditeur :

https://editionsparentheses.com/La-Carte-de-France