L’actualité littéraire récente a mis en évidence l’extrême popularité de la bande dessinée japonaise en France. En effet, la France est le premier marché du monde pour ce genre qui s’est développé à partir des années 90, dans le sillage des animes diffusés sur les écrans français depuis les années 70. Si ce genre a longtemps été méprisé (dédicace à sainte Ségolène), depuis une dizaine d’années il attire l’attention des chercheurs qui posent désormais un nouveau regard sur lui. C’est dans ce registre que s’inscrit ce petit ouvrage (62 pages) publié par Bounthavy Suvilay, agrégé de lettres modernes et docteur en littérature, intitulé la culture manga, origine et influence de la bande dessinée japonaise.

Cette petite synthèse constitue une première approche pour toute personne n’y connaissant absolument rien. Le premier chapitre intitulé grandeur et décadence du manga au Japon dresse un panorama historique, forcément très superficiel mais n’omettant pas l’essentiel en allant des origines du manga jusqu’à nos jours, posant par la même quelques clés de compréhension expliquant ses origines, son succès et son âge d’or dans le Japon d’après-guerre, et son déclin (très relatif !) depuis les années 90. Le chapitre 2 le manga ou le triomphe du feuilleton pose les clés techniques du manga et ses spécificités, l’aspect feuilleton des histoires, ainsi que les caractéristiques attractives des personnages. Forcément, l’analyse en elle-même est limitée. Ainsi, page 29 le paragraphe consacré à la valorisation des yeux et du visage omet complètement l’évolution graphique et la modernité entreprise par les dessinateurs à partir des années 20 et 30, élément essentiel pour comprendre l’origine de ces fameux grands yeux étoilés qui sont la caractéristique de certains personnages. Le chapitre 3 intitulé l’influence du manga hors du Japon revient sur l’introduction du genre en Europe, précédé par l’arrivée des anime. Le poids et le rôle de certains d’entre eux comme Astro le petit robot, adapté en 1963. On pourrait regretter l’importance qu’accorde l’auteur à son sujet fétiche Dragon Ball, puisqu’il ne distingue et n’identifie vraiment pas les 3 vagues de diffusion qui ont permis l’émergence et la reconnaissance du manga en tant que tel : la période 1961 –1978, (avec les premières diffusions de séries japonaises : le roi Léo et Princesse Saphir au début des années 70) puis 1978-1987 (avec en tête de liste le trio à succès Candy, Goldorak, Lady Oscar) et enfin la période 1987 – 1997 très largement dominée par le Club Dorothée qui popularise le genre et les mangas qui sortent dès lors de leur confidentialité et des librairies japonaises parisiennes.

Mais je reconnais volontiers que je pinaille, car cette synthèse, abordable sur le fond et la forme permettra à certains de rattraper leur retard sur toute une génération dont je fais partie. A ce titre, il pourra être glissé sous le sapin de Noël entre deux volumes de Death Note ou de l’Attaque des Titans.