Ce numéro de la Documentation Photographique a pour thématique « Un monde migrants ». Une thématique d’actualité et qui fait écho à ce qu’on appelle « la crise migratoire » en Europe. Mais c’est aussi, et surtout, un moyen de rappeler que c’est le monde entier qui vit au gré des phénomènes migratoires. Pour les années 2000, on estime le nombre de migrants internationaux à près de 200 millions. Plusieurs facteurs entrent en jeu : pauvreté, conflits, catastrophes environnementales, travail, études, tourisme… Les migrations à l’échelle mondiale transforment les relations internationales.

Ainsi, dans son « avant propos », Catherine Wihtol De Wenden précise que l’étude portera également sur les pays de transit, où les migrants sont vulnérables et peu accompagnés. Il est également question des frontières naturelles (qui pourtant n’existent pas en temps que telles) : mers, fleuves, montagnes ; ou bien artificielles comme les murs érigés par les Etats.

Ce dossier pose les grands enjeux des migrations aujourd’hui et invite le lecteur à réfléchir sur le droit à la mobilité.

Dans la partie « Le point sur » : une grande photographie liée à l’actualité nous interpelle, il s’agit d’une réfugiée syrienne et de son enfant lors de leur arrivée sur l’île de Lesbos en 2015. Catherine Wihtol de Wenden évoque sa proximité avec les migrants via son histoire personnelle. Elle en profite pour rétablir une réalité : ce ne sont pas les plus pauvres qui quittent leur pays – ils n’en ont pas les moyens – mais ceux qui étaient à la recherche d’opportunités aujourd’hui comme il y a un siècle. On enchaîne alors par une histoire des migrations de masse, à commencer par l’esclavage avec le commerce triangulaire. Mais il est étonnant de relever que d’autres migrations- notamment au sein de l’Afrique – ne sont pas mentionnées alors qu’il y eut des migrations qui relèvent de bien des siècles avant la traite négrière. L’avènement d’une immigration de masse au XIXe siècle est traitée dans un long paragraphe où les raisons pour lesquelles les populations ont choisi de migrer sont évoquées (il est intéressant de constater que ce paragraphe pourrait s’appliquer à notre époque). Mais dans la seconde moitié du XIXe siècle on s’intéresse plus précisément aux populations : qui, quand, où, comment.

Ensuite, il est davantage question des migrations liées aux bouleversements politiques du XXe siècle ; pour accompagner le propos une photographie des Boat People quittant le Vietnam. Enfin, un paragraphe traite des migrations « d’hier à aujourd’hui ».

Puis, la géographie reprend sa place par l’étude des échelles migratoires : intercontinentales, mondiales, régionales, internes (c’est à dire au sein d’un même pays). Il est question également des status juridiques très divers selon les pays. La suite logique porte sur les migrations légales/illégales, le contrôle des frontières, les passeurs, etc.

Dans la partie « Thèmes et documents » :

– « Statuts juridiques et migrations » :

  • Le premier sujet porte sur les migrants et réfugiés (double page). Au sein des paragraphes, nous faisons la distinction entre un migrant et un réfugié à l’aide de définitions précises. Des données importantes y sont écrites : de quelles régions du monde les migrants viennent-ils majoritairement, les pays d’arrivée etc. Sur la deuxième page, deux cartes (flux migratoires dans le monde et réfugiés dans le monde) ainsi que les sources officielles concernant les définitions de migrant et réfugié.
  • Le deuxième sujet de cette thématique porte sur les « étrangers et nationaux » où l’on comprend que la différence entre les deux concerne le domaine juridique. Selon les pays, il y a un droit du sol, droit du sang. Il est également question dans ce sujet de la naturalisation. Pour « illustrer » cette lecture, nous avons une carte portant sur l’accès à la nationalité pour les étrangers dans le monde.
  • Le troisième sujet traite de l’invention du passeport et l’obligation de visa. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ils ne datent pas d’aujourd’hui.
  • Dernier sujet : des migrants sans statut.

– « Des terres d’accueil » :

  • Le premier sujet traite de « l’Europe, un continent d’immigration malgré lui ». Un titre qui peut surprendre, mais l’on comprend assez vite par le côté historique qu’il s’agissait  de revenir sur l’idée que les Européens migraient vers les autres continents, en ce sens l’Europe « peine à se considérer comme terre d’immigration ».
  • Le deuxième sujet porte sur « Les nouveaux mondes, terres d’installation ». Ici, ce sont des pays bien définis tels que le Canada, les Etats-Unis, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et certains pays d’Amérique latine dont il est question. Dans ces pays, la cohabitation avec les natifs peut parfois poser problème ; en particulier en termes de droits.
  • Le troisième sujet concerne le Golfe persique, où se fait une migration sud-sud.

– « Corridors migratoires » :

  • Le premier sujet porte sur « la crise migratoire dans le sud de la Méditerranée ». Les données fournies vont de 2000 à 2019, et sont plus précis pour les dernières années. Le Maghreb est étudié comme étant un espace de transit, et la Méditerranée comme étant surnommée « le cimetière marin » en vue du nombre de morts important.
  • Le deuxième sujet traite des réfugiés et migrants en Turquie. Les Syriens sont en particulier étudiés dans cette double page.
  • Le troisième sujet concerne le Mexique comme pays de transit ou pôle attractif. Pour ce sujet, il est question des migrations entre le Mexique et les Etats-Unis ; une frontière très contrôlée mais traversée.
  • Le quatrième sujet porte sur l’économie du passage aux frontières et trafics. Bien qu’elle soit présente dans d’autres sujets, il est important de s’y attarder pour mieux en comprendre les rouages. Les exemples de Ceuta et Melilla sont développés.
  • Le cinquième sujet : migrants en transit dans l’espace public. Ici il est question de squats, de bidonvilles, des campements informels dans le Nord de Paris. Sont évoqués les conditions de vie, l’aide apportée, le rôle des pouvoirs publics, l’image qu’ont les populations de ces migrants, etc.
  • Dernier sujet : migrants en rétention. Il s’agit d’étudier les « hotspots » ou centre de tri visant à distinguer les migrants demandeurs d’asile des autres qui ont des ambitions plus professionnelles.

– « Echelles et temporalités des migrations »

  • Le premier sujet traite des ensembles migratoires régionaux. L’étude porte ici sur l’Amérique du Sud et le continent africain. Il est important de comprendre que les flux Sud-Sud et Nord-Sud ont rejoint en nombre les migrations Sud-Nord et Nord-Nord.
  • Le deuxième sujet est précis car il traite des migrations chinoises. Migrations internes comme externes sont étudiées.
  • Le troisième sujet porte sur les camps de réfugiés. Après avoir évoqué les réfugiés précédemment, ici l’étude porte davantage sur les camps de réfugiés un peu partout dans le monde (Calais, Zaatari en Jordanie, Kakuma au Kenya, en Inde, en Birmanie…).
  • Le quatrième sujet traite de la diaspora indienne, la plus importante au monde avec la chinoise par le nombre et par la diversité des profils.
  • Le dernier sujet porte sur les migrations temporaires et saisonnières ; autrement appelées migrations à durée limitée. Souvent il s’agit de migrations professionnelles.

– « Défis et enjeux pour demain » :

  • Le premier sujet porte sur l’intégration des immigrés. Tout d’abord l’auteur revient sur l’utilisation du terme d’intégration pour resituer un peu l’histoire de ladite intégration. Le cas de la France est analysé, ainsi que le cas anglais.
  • Le deuxième sujet porte sur les discriminations et ségrégations urbaines. Petit topo historique en introduction sur la lutte contre les discriminations qui commence dans la deuxième moitié du XXe siècle aux Etats-Unis. Différents acteurs sont donc ici en jeux.
  • Troisième sujet « combattre les idées reçues ». Sont donc analysées les suivantes : un immigré coûte plus cher qu’il ne rapporte, il suffit d’arrêter les migrations en fermant les frontières, le développement des pays pauvres est une alternative aux migrations.
  • Quatrième sujet : les migrations et échanges économiques et culturels. Selon l’auteur les migrations sont clairement une vertu  « en termes de transferts de fonds et de métissages, sources de créativité et de production artistique ». C’est aussi le programme de ce paragraphe.
  • Dernier sujet : le droit international à la mobilité.

Un nouveau numéro intéressant car il traite de l’actualité, comporte des données récentes et permet d’expliquer les phénomènes migratoires en général. Les études portant sur des sujets plus précis sont également appréciables car ils permettent d’approfondir certains points.