Cette BD nous propose de suivre le parcours de deux jeunes femmes, Libussa et Vlasta, au tempérament fougueux et guerrier, prises dans le fléau de la guerre qui touche la Bohême au VIIIe siècle de notre ère. Héritière de son père Croc de Bohême, Libussa doit s’affirmer face aux envahisseurs mais aussi face aux membres de son clan qui refusent la domination d’une femme.
Cette BD est un mélange subtil entre réalité et fiction, servie par un dessin impeccable très représentatif du style historico-fantasy. Ce mélange intervient à plusieurs niveaux. Tout d’abord, les traces historiques de Croc et de Libussa sont ténues et beaucoup ne sont que des légendes you des propos rapportés des siècles plus tard, notamment dans la Chronique de Cosme de Prague datant du XIIe siècle. Croc et Libussa seraient ainsi à l’origine de la dynastie des Premyslides qui a dominé une partie de l’Europe de l’Est jusqu’au XVIe siècle. Mais la fin de l’ouvrage ne va pas forcément dans ce sens et penche vers une version plus émouvante du destin de Libussa.
Mélange aussi entre fiction et réalité à travers les combats, les stratégies d’alliances, l’atmosphère climatique et paysagère, tout à fait réalistes et plausibles. En face, la présence de dragons, de sorcellerie, dans la pure tradition héroïque-fantasy, le personnage illustrant au mieux cette thématique étant Téta, une des soeurs de Libusse, et qui possède un don de vision et de dialogue avec les anciens dieux. Sorcellerie et paganisme qui se retrouvent combattus par les troupes du fils de Charlemagne, Charles le Jeune, accompagné de hordes de convertisseurs chrétiens qui ne tolèrent aucune entorse à l’imposition de leur doctrine. Charles le Jeune qui meurt d’une attaque cérébrale, tel que le signalent plusieurs sources.
Ce mélange constant ne perd en rien le lecteur qui est parfaitement immergé dans cette histoire. Le rythme est parfaitement dosé, les auteurs prenant le temps de développer plusieurs personnages, mettant en scène la vie quotidienne et des épisodes réels de cette époque, mais aussi accélérant le temps dans les scènes de combat et le réduisant lors des scènes plus intimistes. Une belle découverte au final.