La collection de la documentation photographique bien connue des enseignants a largement rénové sa présentation et même sa démarche. Destinée à venir en aide très concrètement aux professeurs dans les classes en fournissant une palette de documents commentés, elle propose des exercices d’application et des supports « rétroprojetables » sous forme de transparents correspondant aux documents contenus dans le dossier.

Moderniste reconnu, professeur à Paris VIII, Joeël Cornette propose ici une réflexion originale et surtout novatrice sur l’absolutisme, une notion qui n’est pas contemporaine de l’époque où elle a été mise en œuvre, entre la Renaissance et les Lumières. Cette notion dont il conteste le caractère démodé qui lui est parfois attribué, serait, d’après lui, à reconstruire.

Le point sur l’absolutisme

Dans les définitions et fondements de l’absolutisme, l’auteur oppose les approches françaises et anglaises, avec le caractère « sacral » du Royaume des Lys, différent de ce que l’on peut observer outre Manche, ou encore outre Pyrénées. L’Etat Royal s’identifie au corps du Roi tandis que les formes de pouvoir absolu se voient, surtout pendant les périodes de faiblesses physiques du souverain, (Minorités, régences), contestées, paradoxalement ou logiquement par ceux qui en sont les plus proches. Le ralliement du Prince de Condé à la Fronde est, somme toute cohérent ; ce grand serviteur de l’Etat attendant en retour contreparties et reconnaissance.
Les Lumières participent d’une déconstruction de l’absolutisme, avec une contestation conservatrice socialement, celle des Parlements, et celle, plus intellectuelle, qui s’exprime dans l’Encyclopédie par exemple.
Louis XVI à cet égard, mérite sans doute une réhabilitation. Conscient des limites, notamment fiscales de la monarchie absolue, il a soutenu des réformes qui auraient pu conduire à une monarchie tempérée ou, mais son tempérament l’y conduisait peu, à un despotisme éclairé.

Cette présentation rapide dans la première partie du dossier permet de disposer rapidement d’une mise au point très claire et surtout très actuelle sur les approches récentes de la question.

Les documents

Bien entendu, c’est sur les documents que l’intérêt de ce support pour la classe se révèle.
Ces derniers associent des textes littéraires, comme cet extrait commenté du Cid de Corneille – et on mesure ici l’intérêt d’une approche pluri disciplinaire – des extraits de Jean Bodin, le théoricien politique des six livres de la république, des miniatures ou des photographies d’architecture. Le fil conducteur est ici clairement affirmé, avec une réflexion sur les différentes pratiques conduisant à l’absolutisme ou relevant de ce concept.
Au passage, Joël Cornette entreprend un travail de réhabilitation du Roi Henri III, considéré comme un faible entouré de mignons, il apparaît, comme Louis XII bien avant lui, comme un Prince qui aurait pu sans doute bâtir un Etat absolu en introduisant la notion de distance du souverain par rapport à son entourage.
Cette approche s’oppose à celle du même Henri III, cette fois ci Roi assassin, (du Duc de Guise) et l’exploitation politique qui en fut faite à l’époque. A cet égard, les trois gravures sur bois présentées dans le dossier sont exemplaires de ce que pouvait être les ressorts de la propagande, on dirait aujourd’hui de la communication politique.

Tout à fait passionnante également, la présentation des trois tableaux de Rubens du cycle de Marie de Médicis, présentant un absolutisme décliné au féminin, mettant en scène la souveraine parée des attributs de la puissance, ce qui était largement discutable du point de vue de la Loi salique.

La violence d’état permettra aussi aux enseignants, avec les gravures de Jacques Callot, de montrer à leurs élèves que les violences télévisuelles des séries américaines ne sont pas si novatrices que cela. L’estrapade rejoint le bûcher et la roue dans la minutieuse description faite par le graveur des malheurs de la guerre.

Le dossier est complété par des propositions de travaux sur les transparents fournis qui auraient pu être davantage étoffés. Les trois exercices fournis sont de très classiques analyses d’images, portant sur le Roi Louis XII en majesté, l’assassinat du Duc de Guise et le plan de Versailles.

Pourtant, la richesse du dossier, le fait que ces documents soient rarement présentés dans les manuels et en même temps parfaitement exemplaires de la notion étudiée permet de le considérer comme un outil de travail nouveau. La qualité du texte de Joël Cornette apporte un enrichissement à l’enseignant qui pourra également renouveler son approche de l’absolutisme et en tirer profit pour tracer des pistes pédagogiques particulièrement sur le champ pluridisciplinaire.

Bruno Modica